XV de France : 2007 et la seule victoire des Bleus dans le Tournoi des six nations une année impaire
«On sait que c’est long, il reste deux matches à jouer à l’extérieur (...) Si on joue comme ça, on ira gagner partout». Signé Antoine Dupont, dans les vestiaires de Twickenham (dans des propos rapportés par France Rugby ), après le frustrant revers des Bleus face au XV de la Rose, le 8 février dernier. Cela ne surprendra certainement personne, mais le capitaine de l’équipe de France avait vu juste. Un mois plus tard, les hommes de Fabien Galthié ont inversé la tendance et s’offrent une opportunité rêvée, ce samedi contre l’Écosse, de décrocher un 27e titre dans la mythique compétition européenne.
Rassurons les perplexes concernant une victoire finale (dans le Tournoi des six nations) sans Grand Chelem : ce dernier n’arrive, en moyenne, que tous les sept ans côté français. Il n’a d’ailleurs jamais été réalisé par les Bleus une année impaire (comprenant déplacements en Angleterre et en Irlande), vieille rengaine qui prospère, preuve de l’exploit que cela représenterait s’il était un jour réalisé.
Les coïncidences avec 2007
En attendant, revenons 18 ans en arrière, lors de la seule victoire finale française dans le Tournoi des six nations, hors année paire, en 2007. Harinordoquy, Betsen, Ibanez, Clerc ou encore Jauzion, comme pour la génération Dupont, les grands noms ne manquaient pas dans cette équipe de France dirigée par Bernard Laporte. Plusieurs mois avant la Coupe du monde dans l’Hexagone, les Bleus triomphaient donc au Stade de France, décrochant leur quatrième Tournoi depuis l’arrivée de l’Italie en 2000, et conservant ainsi leur titre après celui obtenu en 2006, seule fois dans l’histoire du rugby français.
Et les coïncidences sont nombreuses lorsqu’on compare ce titre avec l’édition 2025. À l’époque, les Bleus s’étaient notamment imposés en Irlande (2e journée) - succès auréolé d’un mythique essai en solitaire de Vincent Clerc dans les derniers instants - avant de s’incliner en Angleterre (4e journée). Un revers, 26-18, à Twickenham, qui était forcément resté en travers de la gorge des joueurs au maillot frappé du coq : «En jouant comme il faut, nous aurions pu gagner. Mais nous avons joué n’importe comment», constatait le troisième ligne emblématique Sébastien Chabal après le coup de sifflet final, dans des propos rapportés par Le Monde, quand Bernard Laporte avait trouvé ses joueurs «fragiles et trop en dedans», se rapprochant étrangement du sentiment ressenti après le Crunch perdu par les Bleus cette année.
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Pour rester dans les points communs, XV de France, XV de la Rose et XV du Trèfle avaient tous perdu un match et affrontaient respectivement, lors de la dernière journée, l’Écosse, le pays de Galles et l’Italie. Exactement le même scénario qui nous est offert ce samedi.
Un merveilleux dénouement pour les Bleus
À une exception près. La tâche était, à l’époque, bien plus ardue côté français. S’il suffit, pour les hommes de Fabien Galthié, de s’imposer sans regarder le goal-average d’ores et déjà soigné, Ibanez et les siens étaient eux dans l’obligation de gagner avec 24 points d’avance pour être sacrés, l’Irlande s’étant largement imposée en Italie, 51 à 26, en ouverture de cette cinquième et dernière journée. «Déjà, on voulait gagner le match avec le bonus, puis saisir l’opportunité. La philosophie, c’était vraiment de construire cette victoire. Et après si on pouvait aller au-delà des points, c’était du bonus. Il fallait vraiment mettre une chronologie à notre match», expliquait le deuxième ligne Pascal Papé auprès de RMC Sport .
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Au terme d’un premier acte disputé, les hommes de Bernard Laporte rentraient avec six points d’avance à la pause, avant d’accélérer dans le second, grâce à des essais de David Marty, Cédric Heymans et Olivier Milloud. À quelques minutes de la fin, les Bleus menaient ainsi, 39-14, et entrevoyaient le sacre. Mais le coup de poignard était asséné par Euan Murray à la 77e minute, qui inscrivait un cruel essai en bout de ligne côté gauche, mettant fin aux espoirs de victoire finale française. 39-19.
On avait soulevé le trophée dans un stade vide
Pascal Papé
Les Bleus ne lâchaient pourtant rien, se remobilisaient instantanément, et, poussés par des supporters en ébullition, parvenaient une fois de plus dans les 22 mètres adverses, emballant une dernière action irrespirable. Après plusieurs temps de jeu au près, c’est finalement le troisième-ligne remplaçant, Elvis Vermeulen, qui franchissait la ligne à la 82e minute de jeu. Sans conviction, l’arbitre sud-africain, Craig Joubert, - bien connu du rugby tricolore - demandait la vidéo avant de finalement accorder l’essai de la libération. Le Stade de France explosait, pour un succès, 46-19, resté mythique dans l’histoire de cette équipe de France.
Dernier match de cette édition 2007, l’Angleterre devait désormais s’imposer avec 56 points d’avance face au pays de Galles. Mission impossible pour la Rose, qui finissait même par s’incliner à Cardiff. Deux heures après leur succès contre le Chardon, les Bleus de Raphaël Ibanez remportaient ainsi le Tournoi des six nations, dernière victoire en date du XV de France sans Grand Chelem. Attente oblige, les supporters avaient été invités à quitter l’écrin de Saint-Denis, participant à l’histoire de cet après-midi enchanté. «On avait fêté et soulevé le trophée dans un stade vide», se souvient Pascal Papé. Si les Bleus venaient à s’imposer ce samedi, la fête se ferait cette fois-ci en grande pompe, devant 80.000 personnes, pour un 27e sacre aussi souhaité qu’un nouveau Grand Chelem, qui attendra, lui, l’année prochaine...