Guerre en Ukraine : Hongrie, Suisse, Autriche... Ces pays prêts à accueillir une rencontre entre Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky
Une rencontre entre Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky aura-t-elle lieu ? Le président ukrainien a assuré, mercredi 20 août, qu'elle ne serait possible qu'après avoir déterminé les grandes lignes d'un accord sur les garanties de sécurité pour l'Ukraine. En attendant, le choix du pays et de la ville où pourrait se tenir ce moment historique s'apparente à un casse-tête.
D'une part, le mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) émis en 2023 contre Vladimir Poutine oblige les Etats signataires du Statut de Rome à procéder à l'arrestation du président russe s'il pénètre leur sol. D'autre part, les deux parties entretiennent souvent des relations distinctes avec les candidats. Franceinfo fait le point sur les pays et villes évoqués pour accueillir les éventuels pourparlers.
En Russie : l'offre de Vladimir Poutine
L'idée de discussions organisées à Moscou a été suggérée par Vladimir Poutine à Donald Trump lors de leur entretien téléphonique, à l'issue de la réunion de lundi entre le président américain, Volodymyr Zelensky et plusieurs dirigeants européens à la Maison-Blanche. Cependant, la capitale russe a peu de chances d'être choisie. "Nous estimons qu'il est juste (…) que la rencontre ait lieu dans une Europe neutre", a expliqué mercredi le dirigeant ukrainien.
En Suisse : la suggestion d'Emmanuel Macron
De son côté, Emmanuel Macron penche notamment pour la Suisse. Genève se situe dans "un pays neutre", a expliqué le chef de l'Etat. La ville accueille déjà sur son territoire le siège européen des Nations unies. Malgré le mandat d'arrêt international émis par la CPI, le pays s'est dit prêt à accueillir les négociations. Le gouvernement fédéral helvète peut en effet accorder "l'immunité à une personne qui est sous mandat d'arrêt international", si elle vient "pour une conférence de paix, pas pour des raisons privées", a déclaré le ministre des Affaires étrangères suisse, Ignazio Cassis.
Si Volodymyr Zelensky a fait savoir que la Suisse lui conviendrait, cette option risque de ne pas plaire au Kremlin. La Russie boude la Suisse, qui a décidé d'infliger à Moscou les sanctions décidées par l'Union européenne et imposées depuis l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie en 2022.
"J'ai constamment rappelé cette disponibilité [à organiser des rencontres] lors de mes contacts avec le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, ces derniers mois", a souligné Ignazio Cassis, qui n'a pas rompu les contacts diplomatiques. Mais "on m'a répondu que depuis que la Suisse a adopté les sanctions européennes, ils ont naturellement perdu un peu l'envie" de venir. Néanmoins, fin juillet, la présidente du Sénat russe, Valentina Matvienko, par ailleurs visée par des sanctions pour son soutien à la guerre, s'était rendue à Genève pour une conférence des présidents de parlements internationaux.
En Turquie : le pays habitué aux rounds de négociations
C'est peut-être la solution qui pourrait le plus contenter les deux camps. La Turquie a été citée jeudi par Volodymyr Zelensky une des destinations envisagées. Le choix ne surprend pas, au vu de l'importance prise par le pays ces dernières années dans les négociations internationales. Depuis mai, la Turquie a ainsi abrité à trois reprises à Istanbul des négociations entre des représentants de Kiev et Moscou, qui n'ont pas permis de franches avancées, mais qui ont débouché sur des échanges de prisonniers.
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a informé mercredi Vladimir Poutine que son pays soutiendrait un processus associant "toutes les parties" en faveur de la paix en Ukraine. Dans son communiqué, Ankara souligne que Vladimir Poutine a "remercié le président Erdogan pour avoir accueilli des pourparlers de paix".
Malgré son appartenance à l'Alliance atlantique, la Turquie n'est pas perçue avec défiance par Moscou. Par ailleurs, le pays ne fait pas partie de la CPI et s'est abstenu de se joindre aux sanctions occidentales. Toutefois, il insiste régulièrement sur l'intégrité territoriale de l'Ukraine, et spécifiquement sur celle de la Crimée. La région, dont la Russie a pris le contrôle par la force en 2014, abrite une importante minorité tatare à majorité musulmane.
En Autriche : une solution défendue par Volodymyr Zelensky
L'Autriche s'est portée volontaire pour accueillir à Vienne les deux chefs d'Etat, par le biais de son chancelier, Christian Stocker. Ce dernier a rappelé "la longue tradition" de la capitale en matière de négociations diplomatiques. Elle est du reste le siège de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et l'Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) "Si les négociations ont lieu à Vienne, nous prendrons contact avec la CPI" afin de "clarifier la question" et de "permettre au président Poutine d'y participer", a ajouté la chancellerie dans une déclaration transmise aux médias.
L'Autriche fait partie des solutions envisagées par Volodymyr Zelensky. Grâce à sa position de pont entre les blocs acquise durant la guerre froide, l'Autriche, pays membre de l'UE, mais pas de l'Otan, entretenait auparavant de bonnes relations avec la Russie. Mais les relations entre l'Autriche et la Russie se sont notablement dégradées ces dernières années.
En Hongrie : Viktor Orban, un improbable médiateur ?
Budapest serait le choix privilégié par les Etats-Unis pour une éventuelle réunion trilatérale entre Donald Trump, Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky, affirme le site Politico, qui a interrogé deux personnes proches de la Maison Blanche. La Hongrie s'est déclarée jeudi 21 août disposé à accueillir d'éventuelles négociations de paix sur l'Ukraine. "Je ne connais aucun homme politique européen aujourd'hui, à part Viktor Orban, qui puisse s'entretenir d'égal à égal" avec les présidents américain et russe, a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Peter Szijjarto, lors d'une émission diffusée sur les réseaux sociaux. "Si l'on a besoin de nous (...) et nous fournirons les conditions appropriées, équitables et sûres pour de tels pourparlers", a-t-il ajouté.
Volodymyr Zelensky s'est en revanche montré réticent dans des propos diffusés jeudi. Tenir cette réunion à Budapest "n'est pas facile" vu le rapprochement entre la Hongrie et la Russie, a-t-il souligné. Les relations sont tendues entre Kiev et Budapest, Viktor Orban s'opposant à toute aide militaire à Kiev et à son entrée à l'UE. Le dirigeant nationaliste a ainsi organisé une consultation nationale pour contrer l'adhésion de l'Ukraine et fait placarder à travers le pays des affiches moquant le chef d'Etat ukrainien. Par ailleurs, le gouvernement populiste et réactionnaire hongrois a annoncé en avril avoir l'intention de se retirer de la Cour pénale internationale.
La capitale hongroise reste aussi associée à un douloureux épisode pour Kiev. C'est là que l'ancienne république soviétique a conclu en 1994 un accord, connu sous le nom de "mémorandum de Budapest". L'Ukraine avait alors accepté de remettre à la Russie les armes nucléaires stockées sur son territoire en échange de la reconnaissance de ses frontières.