PODCAST. Guerre entre Israël et le Hamas : l'espoir et la menace

"Salut les amis, toujours vivant !" Vous l'entendez régulièrement dans ce podcast : le journaliste Rami Abou Jamous fait partie des déplacés de Gaza installé à Rafah. Dans un groupe de messagerie, il partage son quotidien et ses analyses. Aujourd'hui, il raconte ce désir de normalité qui hante les civils dans le sud, alimenté par les pour parlés de paix qui ont eu lieu le vendredi 23 février à Paris.

"Hier matin, quand je suis sorti autour de chez moi, tout le monde était autour de moi, raconte Rami. Cette fois-ci, je suis le francophone (...) Tout le monde est venu me voir en me demandant : "Alors, tes amis français, qu'est-ce qu'ils t'ont dit ? Comment ça se passe, est-ce que tout va bien ?" Ça m'a fait rire parce que tout le monde croyait que j'étais le Macron de Gaza." Rami tente de les rassurer : "Ils ont envie d'entendre des choses positives. Parmi les gens qui étaient autour, le fils d'un ami m'a dit : 'Tonton Rami, si on retourne à Gaza, je vais t'inviter à une pizza !' (...) Le petit, il ne sait même pas qu'il n'y a plus de pizzeria, plus de restaurants, tout est détruit. J'ai bien aimé son côté rêveur."

Un espoir entretenu par Joe Biden

L'espoir est aussi entretenu par le président américain lui-même. Lundi 26 février, une glace à la main, Joe Biden donne un horizon. Difficile de savoir s'il parle de la réalité ou du désir de son administration de se défaire de cette guerre qui pèse de plus en plus dans la campagne présidentielle américaine, et qui menace d'embraser la région à l'approche du Ramadan. "J'ai espoir que d'ici lundi prochain, nous aurons un cessez-le-feu", avait déclaré plus tôt Joe Biden. "Mon conseiller à la sécurité nationale me dit que nous en sommes proches, ce n'est pas encore fait", a-t-il nuancé.

Après les discussions en Égypte, à Paris, à Doha, les positions semblent s'être assouplies autour d'une trêve et d'un échange de prisonniers. Un cade général aurait été établi. L'espoir a aujourd'hui sa place dit Daniel Rigoulet-Roze, chercheur à l'institut Français d'Analyse stratégique, invité des matins de France Culture, mardi 27 février. "Il semblerait que le Hamas ait revu à la baisse ses exigences maximalistes initiales, en l'occurrence le fait de vouloir une trêve pérenne, et puis le retrait total des forces israéliennes, explique-t-il. Et du côté israélien semble-t-il, qui demandait la libération de tous les otages en une seule fois, également une exigence modulée. Donc ça prend forme mais il faut être très prudent."

Mais si les États-Unis espèrent réduire la pression avec cette éventuelle trêve, le Premier ministre israélien n'y voit qu'une parenthèse. En anglais, Sur CBS, Benyamin Netanyahu impose son agenda. L'opération militaire sur Rafah reste l'objectif final malgré le risque humanitaire.

"Une situation de chaos"

Le risque d'une opération militaire dans un secteur a très haute densité de population est pris très au sérieux. Les Egyptiens sont soupçonnés d'avoir construit un camp sécurisé pour les Palestiniens qui passeraient la frontière. Mais cette réserve est sous-dimensionnée et l'enclave est globalement en ruine. "Les bombardements sur tout Gaza et à Rafah en particulier ont détruit jusqu'à 70% des habitations, ce sont des chiffres qu'on n'avait même pas vus pendant la Seconde Guerre mondiale, estime Alain Gresh, fondateur du magazine Orient 21. Donc on est dans une situation de chaos."

"Il y a un million de réfugiés à Rafah qui viennent des autres parties de Gaza et on ne voit pas comment les évacuer. Les évacuer où ? Ailleurs, il y a encore des combats et l'armée israélienne ne les laissera pas rentrer dans leur ville d'origine."

Alain Gresh, fondateur du magazine "Orient 21"

Dans ce contexte, les Etats-Unis ont obtenu une avancée aussi côté palestinien, comme pour les Israéliens dans le cadre la trêve la portée du geste reste encore difficilement évaluable. Mais l'Autorité palestinienne a amorcé sa réforme en faisant tomber son gouvernement de technocrate, pour un autre gouvernement de technocrate.

L'ordre de grandeur devient abyssal et on ne sait pas ou il s'arrêtera. Le ministère de la Santé du Hamas a annoncé jeudi 29 février que le conflit avec Israël, commencé le 7 octobre, avait fait "plus de 30 000" morts à Gaza. Les deux tiers sont des victimes civiles, avec un nombre important de femmes et d'enfants. Le 7 octobre, près de 1200 Israéliens ont été exécutées par le Hamas.

En fin d'épisode, Ines Abdel Razek, directrice générale de l'institut palestinien pour la diplomatie publique à Ramallah, nous confie son analyse sur le conflit. 

Dans cet épisode : Rami Abou Jamous, Daniel Rigoulet-Roze, Alain Gresh, Ines Abdel Razek
Réalisation : Etienne Monin, Chérif Bitelmaldji et Pauline Pennanec'h