«Attention au zombie derrière !» : on a testé ces salles de loisirs immersives qui mixent réalité virtuelle et laser game

Un quai de métro sombre et désert. D’un côté, des rails désaffectés, de l’autre, un escalator hors service. Des graffitis tapissent les murs de carreaux blancs. Des coulées de sang aussi… Débarque alors sans crier gare une horde de zombies aux yeux rouges. À peine le temps de tirer sur l’un qu’un autre fonce vers nous. Ça crie, ça hurle des indications. «Attention au zombie derrière !» «J’ai besoin de me soigner» «J’ai plus de munitions !» Puis une voix nous intime : «C’est fini, vous pouvez retirer vos casques.» L’adrénaline est telle, qu’on en oublierait presque que cette scène, tout droit sortie de films de SF, n’est pas réelle. Elle se passe au travers de casques de réalité virtuelle (VR), dans une salle complètement vide de près de 100 m2, en plein cœur de Paris.

The Gate VR propose des sessions de 30 minutes dans des salles de près de 100 m2. Julien Da Sois / Le Figaro

C’est là, dans le 8e arrondissement de la capitale, que The Gate VR a décidé d’ouvrir son premier espace, mélangeant VR et laser game, en novembre dernier. Équipés d’un casque de VR sur les oreilles et devant les yeux, et d’une arme connectée dans les mains, les joueurs se retrouvent propulsés à l’intérieur de mondes imaginaires, semblables à ceux que l’on trouve dans des jeux vidéo classiques. Dans ses trois arènes accessibles jusqu’à six personnes, The Gate VR propose pas moins de douze jeux différents, développés par des éditeurs spécialisés externes, pour des sessions de 30 minutes (pour 29,90 à 34,90 euros par joueur). Cela va de tirs de zombies à des aventures magiques pour enfants en passant par des défis d’esport dans lesquels deux équipes s’affrontent dans des combats intenses. 

Dans «Infection Origins», les joueurs doivent tirer sur des zombies assoiffés de sang. The Gate VR

Ces derniers sont particulièrement prenants et amusants, car ils reposent sur une mécanique simple, celle du PvP («Player versus Player», «Joueur contre Joueur» en français). L’occasion de tirer (virtuellement) sur ses amis… et de les chambrer gentiment. Et The Gate VR compte encore diversifier son catalogue : notamment y ajouter «un jeu horreur, à sensation», confie Jérôme Guilmet, cofondateur de l’entreprise. Mais aussi pourquoi pas proposer à l’avenir «des contenus culturels, par exemple une expérience immersive sur la vie de Napoléon ». En parallèle, l’autre grand objectif est d’ «améliorer le rendu visuel, car les choses évoluent vite», reconnaît l’entrepreneur.

Accessible, et pas uniquement aux «gamers»

Si The Gate VR se présente comme «l’avant-garde des expériences de réalité virtuelle en “free roaming”», c’est-à-dire en déplacement libre, il n’est pas le premier à se lancer sur le créneau en France. Dans l’Hexagone, le pionnier s’appelle EVA (Esport Virtual Arenas), dont la création remonte en 2018 et dont la première salle en franchisé a ouvert en 2021, en région parisienne, à Beauchamp (Val-d’Oise). Depuis, la start-up tricolore a enchaîné les ouvertures, et compte désormais près de 50 salles dans le monde, dont une quarantaine en France. Elle vient même d’inaugurer, début décembre, son premier espace en propre (donc non franchisé), à l’est de Paris, à Montreuil (Seine-Saint-Denis).

«Il était primordial pour nous d’avoir notre première salle exploitée 100% par le siège et proposer une expérience encore plus premium et complète à notre communauté et nos clients», explique Jean Mariotte, PDG et l’un des trois cofondateurs d’EVA. En plus de deux immenses arènes de 500 m2 chacune, cet espace de 3000 m2 propose des stands de fléchettes en réalité augmentée, un restaurant d’un chef ainsi qu’un plateau TV pour diffuser les compétitions. Comparé à The Gate VR, qui se veut «plus grand public» et davantage axé sur «le divertissement», précise Jérôme Guilmet, EVA a davantage une approche «esportive». «On veut démocratiser la scène VR esport», confirme Stéphanie Belle, co-fondatrice de la start-up, qui a lancé des ligues et des compétitions d’EVA. «Même si le produit se veut vraiment accessible», ajoute-t-elle.

EVA vient d’inaugurer sa première salle gérée en propre, à Montreuil (Seine-Saint-Denis). Julien Da Sois / Le Figaro

On ne peut que lui donner raison. Si la prise en main de l’arme peut s’avérer un tout petit peu délicate, en raison des différents boutons à apprivoiser, le reste est extrêmement intuitif. Et l’immersion grâce au casque VR, totale. Un test du jeu de tir en PvP «After-H : Battle Arena» suffit pour s’en rendre compte. Il nous emmène dans plusieurs «maps», toutes dans un univers post-apocalyptique. Avec l’objectif de battre l’équipe adverse dans différents modes de jeu (match à mort, domination, capture du point central...). De rares bugs n’empêchent pas d’apprécier la fluidité du gameplay et le rendu assez exceptionnel des graphismes. Le résultat de trois ans de développement, en interne.

Le jeu d’EVA «After-H : Battle Arena» plonge les joueurs dans un univers post-apocalyptique. EVA

Une expérience également physique

Dès le départ, EVA a, en effet, fait le choix de créer une équipe dédiée aux jeux, aujourd'hui constituée d’une quinzaine de personnes - sur la cinquantaine de salariés de l’entreprise. La société propose aujourd’hui «seulement» deux jeux, réservables pour des sessions de 40 minutes pour dix joueurs au maximum (20 euros par personne en heures creuses et 25 euros en heure pleine) : «After-H : Battle Arena» et «Moon of The Dead», dans lequel il faut survivre à des escouades de zombies. «Mais avec une grande profondeur de jeu», souligne Stéphanie Belle, insistant sur les nombreuses cartes, les différents modes de jeu, le choix des armes ou encore l’arrivée constante de nouveautés «grâce à un système de saisons». Par ailleurs, un troisième jeu sera lancé en 2025, sans que l’on en sache plus pour l’instant… «Dans l’idéal, on aimerait lancer un nouveau jeu par an», indique Marie Soudet, brand manager chez EVA.

Le matériel nécessaire se limite à une arme connectée et un casque VR. EVA

Sans vraiment avoir eu l’impression de faire un vrai effort physique, on ressort d’une session, chez EVA comme chez The Gate VR, lessivé. «Les joueurs parcourent en moyenne 1,4 km par session de jeu», affirme-t-on chez la première. Avant The Gate VR, quelques autres entreprises avaient, en France, rejoint EVA sur ce créneau des activités mixant VR et jeux vidéo. On peut citer par exemple Zero Latency VR, qui vient d’ouvrir une quatrième salle dans l’Hexagone, à Dammarie-les-Lys (Seine-et-Marne). «C’est quelque chose qui est en train d’arriver en France», observe Benjamin Chevalier, président du SPACE, l’association française des espaces de loisirs indoor, prédisant que «ce marché va grossir rapidement». «Ces lieux proposent une expérience radicalement différente. On est vraiment dans le jeu», note-t-il.

Et puis, comme on le souligne chez EVA, «on fait marcher la VR pour les gens que ça rend malade habituellement». Pas de maux de tête ou de vertiges pendant le jeu, car «on se déplace réellement dans la salle», explique Stéphanie Belle. De quoi donner en tout cas de belles perspectives à ce nouveau loisir. EVA, qui affiche un chiffre d’affaires de 12 millions d’euros en 2024 (plus de 30 millions d’euros pour le réseau de franchises), a déjà signé 37 nouvelles salles dans le monde pour 2025, prévoyant de s’étendre dans 13 autres pays (après les États-Unis, l’Espagne, la Belgique ou l’Arabie saoudite). L’ambition est également là chez The Gate VR. Jérôme Guilmet le reconnaît : le concept a été pensé dans une démarche «d’expansion et de réplication, en propre et en franchisé».