Pourquoi les taxis manifestent contre la baisse prévue des tarifs du transport médical

Les taxis ne veulent pas perdre la manne que leur apportent les transports sanitaires. Depuis ce lundi, des chauffeurs en colère ont décidé de perturber la circulation dans le pays, pour protester contre la mise en place d’une nouvelle convention de l’Assurance-maladie. Celle-ci doit entrer en vigueur en janvier 2025 et modifier à la baisse les tarifs conventionnés des transports médicaux de personnes par les taxis, afin de pouvoir alléger la facture de ce dispositif pour la Sécurité sociale. En 2023, ce mécanisme, pris en charge à plus de 90 %, a représenté un coût de 6,8 milliards d’euros, selon le ministère de la Santé, soit 2,7 % de la consommation de soins et de biens médicaux.

Le gouvernement Barnier, désormais menacé par la censure déposée lundi par LFI, est attelé depuis sa nomination à la tâche laborieuse de trouver plusieurs milliards d’euros pour tenter de ramener le déficit public sous la barre de 5 % du PIB en 2025. Il table sur une économie d’au moins 300 millions d’euros dans les transports sanitaires entre 2025 et 2027 - dont 150 millions pour les taxis - en partie grâce à une baisse drastique des tarifs conventionnés. « Ce que propose Thomas Fatôme (le directeur général de la Caisse nationale d’assurance-maladie, NDLR), c’est qu’on roule à -60 % de nos tarifs préfectoraux, et c’est scandaleux », déplore Christophe Van Lierde, premier vice-président de la Fédération nationale des artisans du taxi.

L’inquiétude des associations de patients

« Il y a 70.000 taxis en France aujourd’hui, dont 40 000 à 43 000 qui font du transport de malades assis », explique Christophe Van Lierde, rappelant ainsi que le transport sanitaire « est un pan très important de l’économie des taxis » et qu’une telle augmentation des tarifs pourrait « mettre en péril énormément d’entreprises ». Dans certaines zones rurales, le transport médicalisé représente d’ailleurs jusqu’à 90 % du chiffre d’affaires des professionnels, selon la Fédération nationale des artisans du taxi. Baisser les prix de la sorte reviendrait, pour eux, à mettre la clef sous la porte. Le transport sanitaire par taxi, mis en place en 2008, représente toutefois le dispositif actuellement le plus coûteux parmi les différents types de transport médical de personnes, devant les ambulances et les véhicules sanitaires légers.

Les économies souhaitées par le gouvernement inquiètent également les patients, notamment autour de la généralisation du transport partagé. Un décret d’application du budget de la Sécurité sociale prévoit qu’un patient ne pourra désormais plus refuser le partage d’un moyen de transport sanitaire avec une autre personne, sauf si son état de santé est incompatible avec cette mesure (par exemple s’il s’agit d’une personne immunodéprimée). En cas de refus non justifié, il devra lui-même avancer ses frais de transport et ne sera remboursé qu’a posteriori, avec un coefficient de minoration.

Au mois de mai, plus d’une dizaine d’associations, membres du collectif Action Patients, avaient fait part de leurs inquiétudes dans une lettre adressée à l’ancien ministre de la Santé et de la Prévention, Frédéric Valletoux, pour partager leurs craintes sur l’évolution envisagée des transports sanitaires partagés, dont elles redoutent des retombées négatives pour les patients. Action Patients souhaite par exemple que le médecin puisse spécifier que le transport partagé est incompatible avec la situation individuelle du patient, en dehors de la pathologie pour laquelle il doit se déplacer, comme la fatigue liée à l’âge. Les associations demandent en outre que la limite de 30 kilomètres envisagée pour aller chercher une autre personne à transporter soit transformée en une limite de 20 minutes d’allongement de temps de trajet.