Pourra-t-on encore utiliser ses tickets restaurant pour faire ses courses en 2025 ? Provoquée par la gauche alliée au Rassemblement national, la chute du gouvernement, le mercredi 4 décembre, a provoqué un séisme dont les secousses commencent tout juste à se faire ressentir sur l’économie tricolore. En censurant l’équipe de Michel Barnier, les députés de l’opposition ont par exemple provoqué un revers pour le budget de millions de ménages et accordé, dans le même temps, une victoire inespérée, au moins temporaire, aux restaurateurs.
En novembre dernier, les députés avaient adopté une proposition de loi visant à prolonger en 2025 la dérogation d’usage des titres-restaurant pour tout produit alimentaire établie à partir de 2022. Objectif de ce texte porté par l’élue (Droite républicaine) Anne-Laure Blin : permettre aux 5,4 millions de Français bénéficiant de tickets-restaurant de les utiliser «pour l’achat de produits alimentaires non directement consommables», comme les pâtes ou la farine, l’an prochain, et non juste pour des produits consommables immédiatement. Un moyen de soutenir le pouvoir d’achat des Français, alors que ceux-ci soutiennent massivement cet élargissement établi au cœur de la crise inflationniste. «Selon une étude menée par la Commission nationale des tickets restaurants (CNTR) en mars 2024, 96% des bénéficiaires de titres-restaurant se déclarent “favorables” à la prolongation de la dérogation», cite ainsi l’examen des motifs du texte.
Soutenue par les différents groupes politiques, la proposition de loi avait été adoptée à l’unanimité par les députés, qui en avaient profité pour prolonger le dispositif jusqu’au 31 décembre 2026. Et ce, «afin de ne pas avoir à voter à nouveau une prolongation de ce dispositif l’an prochain si une réforme systémique des titres-restaurant n’était pas entrée en vigueur». De son côté, le gouvernement soutenait une prolongation, tout en se disant «défavorable à une pérennisation». La secrétaire d’État à la Consommation, Laurence Garnier, s’en remettait à la «sagesse de l’Assemblée», mais privilégiait une réforme en profondeur du titre-restaurant.
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Suspension des travaux
Adoptée à l’Assemblée nationale, la proposition de loi est ensuite partie au Sénat, où elle devait être étudiée par la commission des affaires sociales dans les meilleurs délais. «Nous sommes confrontés à un calendrier contraint : la dérogation expirera le 31 décembre, le texte doit donc achever son parcours législatif rapidement», alertait Laurence Garnier, à l’Assemblée. Or, la censure du gouvernement a mis un coup d’arrêt à l’examen du texte, qui ne doit reprendre que le 11 décembre, « sous réserve de la nomination d’un nouveau gouvernement».
Le temps presse donc pour faire aboutir les travaux parlementaires, alors que le chef de l’État n’a toujours pas nommé de successeur à Michel Barnier. Celui-ci devra ensuite former son équipe et la navette parlementaire devra s’achever en temps et en heure. «Si rien ne se passe, vous reviendrez à l’ancien temps, vous achèterez des produits comme des fruits et légumes, sandwichs, plats déjà préparés, mais vous ne pourrez plus acheter de farine, de riz ou de pâtes sèches», confirmait à nos confrères de Franceinfo Romain Vidal, pour la CNTR. Si le texte n’est pas voté à temps, la prolongation pourra être déterminée avec un peu de retard. Mais, le cas échéant, les Français devront se passer de leurs tickets restaurant pour réaliser les achats du quotidien. De quoi satisfaire les restaurateurs, vent debout contre la possibilité d’utiliser ces titres ailleurs que dans leurs établissements.