« Personne n’y comprend rien » : quand Yannick Kergoat dissipe l’écran de fumée entretenu par Sarkozy

C’est l’affaire des affaires, celle qui pourrait définitivement enterrer Nicolas Sarkozy. Profitant de l’ouverture du procès pour le financement libyen de la campagne présidentielle de l’ancien locataire de l’Élysée, le documentariste Yannick Kergoat éclaire ce scandale politico-financier. Lorsque celui-ci a éclaté avec l’enquête des journalistes de Mediapart Fabrice Arfi, Karl Laske et Antton Rouget. Nicolas Sarkozy a lancé sa contre-offensive en pérorant dans des médias amis et sur les plateaux de télévision : « Personne n’y comprend rien. »

Le réalisateur de « la (Très) Grande Évasion » et des « Nouveaux Chiens de garde » (avec Gilles Balbastre) l’a pris au mot et tente de démêler les fils d’un dossier dont l’ordonnance de renvoi fait plus de 500 pages. Il a donc dû faire des choix et laisser certains aspects de côté. Son parti pris narratif repose sur l’enquête journalistique et pas sur un récit chronologique. Mais cet ensemble déconstruit reste fluide, car il s’appuie sur des bases solides et un dispositif cinématographique simple. Fabrice Arfi et Karl Laske expliquent les faits. Ils sont mis en miroir avec les démentis télévisuels de Nicolas Sarkozy, dont le talent de comédien éclate en pleine lumière.

Cette tragédie qui provoqua 170 morts

S’y agrègent également quelques grands témoins. François Molins, l’ancien procureur général près la Cour de cassation, évoque les attaques répétées de l’ancien président et de son clan contre les magistrats et la justice. L’économiste des médias Julia Cagé pointe les liens intimes entre l’ex-locataire de l’Élysée, des patrons de presse et des journalistes en vue. Patrick Haimzadeh, un ancien diplomate en poste en Libye, parle de cette dictature militaire avec laquelle des hauts représentants de l’État ont frayé. Quant à Danièle Klein, sœur de l’une des victimes de l’attentat du DC 10 de la compagnie UTA, orchestré en 1989 par des proches de Kadhafi, elle rappelle comment cette affaire a des liens directs avec nos vies du fait de la tentative d’abandonner les poursuites contre le commanditaire de cette tragédie qui provoqua 170 morts. Malgré les drames, puisque en toile de fond il y a également la guerre en Libye, le film recèle des moments de comédie tels les aveux et rétractations de l’homme d’affaires Ziad Takieddine ou les interventions de Mimi Marchand, conseillère en image appelée à la rescousse pour sauver le soldat Sarkozy. S’y ajoutent aussi des personnages troubles tels Alexandre Djouhri, intermédiaire et rival de Takieddine.

Ce documentaire citoyen passionnant a été produit grâce à une campagne de financement participatif, pour laquelle plus de 10 000 personnes ont donné plus de 500 000 euros afin de donner corps à ce projet qui oppose des faits et des preuves matérielles à la réalité alternative proposée par Nicolas Sarkozy. C’est peu dire que la démonstration est imparable. Et si le film s’ouvre avec un panneau indiquant que tous les protagonistes, mis en cause dans ce documentaire, sont présumés innocents, leur implication laisse peu de place au doute.

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Personne n’y comprend rien de Yannick Kergoat, 1 h 43, France

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