«Du génie ? Non, juste beaucoup de travail»… Comment Yu Zidi est devenue, à 12 ans, l’attraction des Mondiaux de natation
Lancée dans un formidable défi de remporter cinq titres en individuel lors des Mondiaux de natation à Singapour, ce qui lui permettrait de faire aussi bien que la légende Michael Phelps en 2007, Summer McIntosh aura bien besoin de cela pour ne pas se faire voler la vedette par une gamine de 12 ans. Ainsi, lundi soir, le public de l’OCBC Arena de Singapour n’avait d’yeux que pour la Chinoise Yu Zidi lors de la finale du 200m 4 nages remportée justement par la Canadienne, qui apparaîtrait presque comme une ancêtre du haut de ses… 18 ans seulement. Un engouement phénoménal lié, évidemment, à son âge, mais aussi à ses origines asiatiques et au fort contingent de fans chinois dans l’enceinte singapourienne, ce qui aide à faire monter la température.
Néanmoins, la vague Yu Zidi a fini par intéresser les journalistes du monde entier présents à Singapour, curieux de découvrir – ne serait-ce que physiquement – le phénomène. Avec son quasi 1,70m et ses épaules déjà impressionnantes, la toute jeune adolescente en impose déjà. Même si son visage poupin et son sourire, qu’elle semble arborer en toute occasion, trahissent davantage ses 12 ans. Ou presque 13, puisqu’elle fêtera son anniversaire le 16 octobre prochain. Sa manière de répondre aux questions, empreinte de timidité, ne trompe pas également. Notamment lorsqu’il lui a été demandé si elle se considérait comme une génie : «Non, pas du tout», rétorque-t-elle, toute gênée. «C’est juste le fruit de beaucoup de travail.»
Ce lundi, la Chinoise de 12 ans a bien failli réaliser un exploit majuscule lors de la finale du 200m 4 nages, qu’elle a terminé à la 4e place (en 2’09’’21), à seulement six petits centièmes de secondes de la Canadienne Mary-Sophie Harvey. 3e à mi-parcours après le papillon et le dos, Yu Zidi a ensuite souffert lors du passage de la brasse – son point faible –, ce qui l’a fait reculer au 7e rang. Mais elle a été l’autrice d’une superbe remontée en crawl pour finalement échouer au pied du podium. Au grand désarroi d’une audience électrisée, qui avait pris fait et cause pour l’adolescente. Mais celle-ci préférait garder le sourire au moment de répondre aux médias de son pays : «Mon objectif initial était simplement de donner le meilleur de moi-même et de tenter de monter sur le podium, même si je pensais que c’était hors de portée. Je voulais simplement tenter ma chance. J’en suis passé très près aujourd’hui, alors je continuerai à travailler dur à mon retour.»
Une 4e place qui demeure une grande première à son âge lors des Championnats du monde et qui, surtout, confirme son potentiel hors-norme. Son entraîneur Li Chao a loué son «excellent sens de la course», et sa concentration qui «dépasse largement» celle des sportifs de son âge. L’entraîneur australien de l’équipe chinoise Michael Bohl va même plus loin : «Je n’ai jamais vu une fille de 12 ans nager de cette façon», a-t-il affirmé à la télévision d’État CCTV. «Si elle continue sur cette lancée, elle deviendra un pilier de la natation chinoise». Yu Zidi est ainsi devenue la plus jeune nageuse en finale mondiale depuis la Japonaise Kyoko Iwasaki, qui avait 14 ans et 6 jours lorsqu’elle a remporté la médaille d’or au 200m brasse lors des Championnats du monde à Perth, en Australie, le 6 janvier 1991.
C’est en cherchant à se rafraîchir l’été qu’elle avait découvert les piscines, totalement par hasard à l’âge de 6 ans. «Cet été-là, il faisait vraiment super chaud, alors je suis allée au parc aquatique avec mon père», a-t-elle raconté à l’agence de presse officielle Chine nouvelle. «J’allais souvent dans les piscines pour me rafraîchir (...) et un entraîneur m’a repérée», a-t-elle expliqué. Aujourd’hui, elle jongle entre les cours à l’école, les entraînements et les attentes qu’implique son statut d’étoile montante du sport chinois. «Mes journées sont très remplies, je n’ai pas beaucoup de temps. Mais c’est aussi très enrichissant», a commenté la jeune adolescente, qui s’entraîne dans la province du Hubei.
Sur cette finale, je ne peux pas dire que je suis totalement satisfaite, mais ça va. Je dois continuer à travailler dur.
Yu Zidi
Évidemment, une telle ascension à un si jeune âge n’a pas manqué de soulever interrogations et critiques. Mais la Chinoise préfère ne pas répondre et se concentrer, encore et toujours, sur la valeur du travail qu’elle effectue. Et qu’elle entend poursuivre. «Ma brasse a encore besoin de beaucoup de travail. C’est un aspect sur lequel je vais certainement me concentrer pour m’améliorer à l’avenir. Sur cette finale, je ne peux pas dire que je suis totalement satisfaite, mais ça va. Je dois continuer à travailler dur.» Mais avant cela, elle n’en a pas fini avec ces Mondiaux à Singapour puisque dès mercredi, elle replongera dans le bassin à l’occasion des séries du 200m papillon, où elle peut très clairement viser une place en finale, avant de finir dimanche sur le 400m 4 nages. Le public n’a donc pas fini de vibrer avec elle.