Libération de Nicolas Sarkozy : ces affaires politico-financières qui menacent encore l’ancien président

Après vingt jours derrière les barreaux, Nicolas Sarkozy est sorti de prison lundi après-midi. La cour d’appel de Paris a accepté sa libération sous contrôle judiciaire et lui a interdit d’entrer en contact avec de hauts responsables judiciaires, à commencer par son ami, le garde des Sceaux Gérald Darmanin.

Condamné en première instance à une peine de cinq ans d’emprisonnement ferme, assortie d’un mandat de dépôt avec exécution provisoire dans l’affaire du financement libyen de sa campagne de 2007, Nicolas Sarkozy a fait appel. Présumé innocent, son second procès se tiendra à partir du mois de mars 2026. Qu’il soit condamné ou relaxé devant la cour d’appel, l’ancien chef de l’État n’en aura pas fini avec la justice française. Le dossier libyen n’est que l’une des nombreuses affaires politico-financières qui le concernent. Si certaines ont débouché sur des non-lieux (affaire Bettencourt, Tapie, de Karachi...), une autre a donné lieu à une condamnation définitive (affaire Bismuth) et d’autres, enfin, sont toujours en cours. Le Figaro les passe en revue.

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Affaire Bygmalion : la Cour de cassation tranchera le 26 novembre

L’affaire Bygmalion n’est pas terminée, mais son dénouement est proche. La Cour de cassation se prononcera le 26 novembre sur le pourvoi de Nicolas Sarkozy. Condamné en première instance à un an de prison ferme, il avait écopé d’un an d’emprisonnement dont six mois ferme aménagés (bracelet électronique, semi-liberté...) le 14 février 2024 devant la cour d’appel de Paris pour le financement illégal de sa campagne présidentielle perdue de 2012. Le pourvoi devant la Cour de cassation est l’ultime recours judiciaire de l’ancien chef de l’État dans cette affaire. S’il est rejeté, comme l’a préconisé l’avocate générale à l’audience, le jugement d’appel sera confirmé et une deuxième condamnation pénale définitive sera inscrite au casier judiciaire de Nicolas Sarkozy, après l’affaire des écoutes (voir plus bas).

Dans ce dossier, les investigations ont révélé que, pour masquer l’explosion des dépenses de sa campagne - près de 43 millions d’euros pour un maximum autorisé de 22,5 millions -, un système de double facturation avait été mis en place imputant à l’UMP (devenu LR), sous couvert de conventions fictives, une grosse partie du coût des meetings. Contrairement à ses coprévenus, l’ex-chef de l’État n’était pas mis en cause pour ce système de fausses factures, mais comme bénéficiaire, en tant que candidat, d’un financement politique illégal. Nicolas Sarkozy a contesté «vigoureusement toute responsabilité pénale», dénonçant «fables» et «mensonges». La cour de cassation juge le seul respect du droit en appel, non le fond du dossier : si elle donnait raison à Nicolas Sarkozy, un nouveau procès pourrait être ordonné dans cette affaire.

Rétractation de Ziad Takieddine : mis en examen

Le 11 novembre 2020, le Franco-Libanais Ziad Takieddine, de longue date l’un des principaux témoins à charge contre Nicolas Sarkozy dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle 2007, opère une spectaculaire volte-face sur BFMTV et dans Paris Match. Il assure que l’ex-chef de l’État n’a «pas touché un centime, cash ou pas cash, pour l’élection présidentielle» de 2007 de la part de Kadhafi. Auditionné à Beyrouth en janvier 2021 par les juges français, Ziad Takieddine recommence à incriminer Nicolas Sarkozy en assurant que ses propos de novembre avaient été «déformés» par Paris Match, qui «appartient à un ami de Sarkozy». L’hebdomadaire est encore la propriété du groupe Lagardère, dont Nicolas Sarkozy est membre du conseil d’administration.

En mai 2021, une information judiciaire est ouverte sur les conditions de préparation de l’interview avec en ligne de mire des soupçons de subornation de témoin. Le 5 juin 2021, la patronne de l’agence de paparazzi Bestimage, «Mimi» Marchand, de son vrai nom Michèle Marchand, proche du couple Sarkozy, est mise en examen et placée sous contrôle judiciaire, notamment pour «subornation de témoin». D’autres mises en examen suivront dont celle du publicitaire Arnaud de la Villesbrunne, ancien directeur de l’agence Publicis, de l’homme d’affaires Pierre Reynaud (décédé en mai 2023), de l’intermédiaire Noël Dubus (déjà condamné pour escroquerie) ou encore de l’entrepreneur David Layani.

Toutes ces personnes sont soupçonnées, à des degrés d’implication divers, d’avoir œuvré au retrait par Takieddine, avec contrepartie, de ses propos mettant en cause l’ancien chef de l’État, qui pourrait avoir donné son aval à l’opération. En octobre 2023, Nicolas Sarkozy est à son tour mis en examen pour recel de subornation et de témoin et association de malfaiteurs en vue de la préparation d’escroqueries au jugement en bande organisée. En juillet 2024, son épouse, Carla Bruni-Sarkozy, est à son tour mise en examen pour «recel de subornation de témoin» et «participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre l’infraction d’escroquerie au jugement en bande organisée». Elle a été placée sous contrôle judiciaire. Ziad Takieddine est, lui, décédé en septembre dernier.

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Affaire russe (Reso-Garantia) : enquête préliminaire

Une enquête préliminaire pour «trafic d’influence» a été ouverte contre Nicolas Sarkozy par le Parquet national financier (PNF) à l’été 2020. Selon Mediapart, qui a dévoilé l’affaire, elle concerne les rémunérations dont il a bénéficié de la part d’une société d’assurances russe, Reso Garantia, contrôlée par deux milliardaires russes d’origine arménienne, Sergueï et Nikolaï Sarkissov. Nicolas Sarkozy aurait conclu en 2019 un contrat portant sur plusieurs années pour un montant de 3 millions d’euros.

Il aurait déjà touché 500.000 euros début 2020 sur son compte à la banque Edmond de Rothschild, toujours d’après Mediapart. «La justice cherche à vérifier si l’ancien chef de l’État a seulement agi comme consultant, ce qui serait parfaitement légal, ou s’il se serait adonné à des activités de lobbying potentiellement délictuelles pour le compte des oligarques russes», affirme le média fondé par Edwy Plenel. L’enquête du PNF est toujours en cours.

Coupe du monde au Qatar : plainte déposée

Le PNF enquête aussi depuis 2019 sur l’attribution controversée du Mondial-2022 au Qatar. Nicolas Sarkozy est l’un des protagonistes du volet parisien de ce «Qatargate». Au cœur des soupçons figure un déjeuner tenu en 2010 entre Nicolas Sarkozy, alors président de la République, deux hauts dirigeants qataris et Michel Platini, à l’époque patron de l’UEFA. Une semaine plus tard, l’ancien footballeur apportait son suffrage au Qatar pour recevoir la Coupe du monde 2022. L’association Anticor a déposé plainte en avril 2023 contre Nicolas Sarkozy pour «trafic d’influence» et «corruption d’un agent public étranger».