Ce sont les forçats du travail illégal. Comme chaque matin, dès 6h30, des grappes d’hommes, tous sans-papiers, emmitouflés dans des parkas, bonnets enfoncés jusqu’aux yeux, se forment dans la nuit noire. En silence, ils se postent un à un le long de la route départementale qui borde la zone industrielle de Pierrelaye, dans le Val-d’Oise.
Selon un rituel rodé par la répétition des jours, les uns posent leur sac à dos par terre, d’autres l’accrochent à la branche d’un buisson: ils prennent leurs marques, s’installant a priori au hasard. En réalité, dans la nudité de cette campagne matinale, zébrée de routes et hérissée de hangars, toute une organisation se dessine peu à peu, avec ses codes, invariable. Chaque communauté a sa place précise, selon que l’on vient du Maghreb, d’Albanie ou d’Afrique subsaharienne.
En échange de plusieurs heures de peinture, de maçonnerie ou de travaux de déblaiement, on leur glissera quelques billets dans la poche.Amenés par le bus ou le RER depuis diverses villes comme Paris, Saint-Denis ou Argenteuil, tous convergent, sept jours sur sept, vers ce lieu improbable, pour vendre leur bras. Un spot…