L'Unesco place sous "protection renforcée provisoire" 34 sites libanais menacés par la guerre
L'Unesco a annoncé, lundi 18 novembre, le placement sous "protection renforcée provisoire" 34 sites culturels au Liban menacés par les bombardements israéliens, et l'octroi d'une assistance financière d'urgence pour sauver le patrimoine du pays du Cèdre.
Cette décision a été actée au terme d'une "session extraordinaire" du Comité pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé, tenue à la demande du Liban, dans les locaux parisiens de l'Unesco.
Les sites et biens culturels concernés "bénéficient désormais du plus haut niveau d'immunité contre les attaques et les utilisations à des fins militaires", selon le communiqué de l'organisation de l'ONU, qui prévient que "le non-respect de ces clauses constituerait une violation grave de la Convention de La Haye de 1954 et ouvrirait la possibilité de poursuites".

La guerre entre l’armée israélienne et le Hezbollah, en cours depuis le 23 septembre, a touché les cités de Baalbeck (est) et Tyr (sud), dont les sites antiques font la renommée du Liban et de son secteur touristique. Le 6 novembre, des frappes israéliennes sur Baalbeck ont touché un secteur proche du temple plurimillénaire, considéré par l’Unesco comme "l'un des vestiges les plus imposants de l'architecture romaine impériale à son apogée”.
Six classés au patrimoine mondial de l'Unesco
La liste de l’Unesco inclut notamment six sites classés au patrimoine mondial de l'Unesco dont le temple de Baalbeck, les sites archéologiques de Tyr, Anjar et Byblos, ainsi que la forêt des Cèdres du Liban.
"L'Unesco entretient avec le Liban une coopération profonde et ancienne. Nous ne ménagerons aucun effort pour apporter toute l'expertise et l'assistance nécessaires pour protéger son patrimoine exceptionnel", a déclaré la directrice générale de l'organisation Audrey Azoulay.
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Réagissant à cette décision, le Premier ministre libanais Najib Mikati a salué dans un communiqué "une victoire pour le droit et un camouflet retentissant pour l'ennemi israélien qui poursuit ses attaques destructrices contre le Liban".
"Ce jugement constitue un puissant moyen de dissuasion contre l'ennemi israélien, car il qualifie toute attaque contre des sites archéologiques de crime de guerre, justifiant la poursuite des responsables devant les tribunaux internationaux", a-t-il ajouté.
"Des pertes irrémédiables"
"Il n'y a pas de mot pour qualifier ce qui se passe actuellement au Liban, notamment sur le plan du patrimoine qui n’appartient pas seulement aux Libanais, mais au monde entier, déplore Joumana Chahal Timéry, conservatrice du patrimoine et fondatrice de l'association Patrimoine Tripoli Liban. Il faut que les belligérants s'éloignent le plus possible des zones protégées et classés au patrimoine mondial de l'Unesco car nous sommes en train de perdre tout notre héritage, et à travers ces 34 sites, c'est l'identité du Liban et de la région qui est concernée".

La conservatrice rappelle que les bombardements "peuvent mettre à mal les structures de ces sites et peuvent à court ou à long terme, en raison des secousses et des vibrations, occasionner des pertes irrémédiables”.
"Il faut qu’un cessez-le-feu soit conclu le plus rapidement possible pour que les attaques contre la population d'abord, et les destructions des biens et des sites historiques, cessent, ajoute-t-elle. Hélas, l’histoire a montré combien de sites ont été détruits par des conflits armés complètement absurdes, irrationnels et inacceptables, qui tuent des personnes et qui anéantissent des richesses extraordinaires et des civilisations entières".
L'ONG Change Lebanon avait adressé dimanche une pétition à l'Unesco l’appelant à sauver le patrimoine libanais et à "mettre en œuvre tous les moyens" et "des mesures renforcées jusqu'aux sanctions", pour "protéger ces trésors irremplaçables". Plus de 300 personnalités du monde de la culture, dont des archéologues et des universitaires, avaient signé l'appel.
Avec AFP