"On ne s'en est pas remis" : un an après les Jeux, la nouvelle tournée de Gojira aura une "touche" de Paris 2024

Ils ne sont toujours pas descendus de leur nuage, un an après la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024. Les membres du groupe de métal français Gojira caressent toujours leurs souvenirs de leur participation à l'un des événements les plus populaires et les plus regardés en 2024. Leur performance a même été récompensée en février par le Grammy de la meilleure prestation métal pour leur interprétation de Mea Culpa (Ah ! Ça ira !) avec une Marie-Antoinette décapitée.

Le groupe origianire des Landes est à présent de retour en France pour une tournée événement de 13 dates qui démarrera le 29 juillet au Festival de Carcassonne et se terminera le 12 décembre à Strasbourg. Il y aura une étape à Paris, ville frappée à jamais par les années olympiques, à l'Accor Arena en novembre.

Franceinfo : Quels souvenirs gardez-vous de la cérémonie d'ouverture et de votre prestation à la Conciergerie ?

Mario Duplantier : Beaucoup de joie ! C'était très gratifiant de participer à cet événement historique et un gros boost pour notre carrière. Ça reste chaud dans mon cœur et on ne s'en est pas complètement remis. Je garde précieusement le challenge d'avoir dû gérer mon stress. Car monter sur une scène en sachant que tu vas être vu par plus d'un milliard de personnes à travers la planète est très particulier. Et ce, malgré tous les festivals où nous avons joué précédemment, notamment des énormes comme en Pologne devant 500 000 personnes. Mentalement, ça bouscule et je vais grandir de ce challenge.

Ce qui est très bizarre et paradoxal, c'est qu'il n'y avait pas grand monde face à nous, à la Conciergerie, quelques personnes seulement assises sur des chaises. Vingt minutes avant notre intervention, j'ai vraiment commencé à stresser. Mais une fois sur mon estrade, quand j'ai vu les lumières s'allumer et les bateaux des délégations défiler, je suis parti en mode "show". La bête en moi s'est réveillée. Je me suis dit : "Maintenant, il ne faut plus douter. C'est toi qui tiens les reines et tu vas tout donner."

Avez-vous vu une analogie entre votre groupe et les sportifs sous vos yeux, des athlètes qui se préparent durant de longues années et dont la performance, comme la vôtre, se joue en quelques minutes, voire quelques secondes ?

On peut parler de moment de vérité, exactement. C'est un peu le même "combat" car les musiciens dans notre style de musique très épique doivent bien se connaître physiquement. Moi-même, j'essaie d'avoir une vie plus ou moins athlétique avec une discipline alimentaire et nutritionnelle. Je fais du cardio, j'ai un coach, je m'entraîne beaucoup, car le métal est une musique très sportive. J'étais content de faire partie de cet événement, aussi, pour ça.

Qu'avez-vous ressenti quand l'organisation de Paris 2024 vous a appelés pour vous proposer de participer à la cérémonie d'ouverture ?

Il faut savoir que les "métalleux", en général, sont assez marginalisés. La plupart de ces musiciens sont des extras sensibles qui ont une perspective du monde un petit peu décalée, plutôt anti-conventionnelle, ils aiment bien aller voir derrière les choses. Les JO sont un événement tellement "mainstream" et adoubé par la société que ça peut refroidir ceux qui ont un esprit "rebelle". Quand on nous l'annonce, on est petit peu dubitatifs pendant quelques minutes. On se dit :

"Ce n'est peut-être pas très en accord avec notre nature profonde, nos convictions ou notre tendance à être underground ou mal compris."

Mario Duplantier, batteur du groupe de métal, Gojira

à franceinfo

Mais comme nous avons beaucoup roulé notre bosse et que nous avons beaucoup voyagé, nous avons aussi compris que le monde est plus complexe que nous le pensions, que le mal ne se dissimule pas partout. Je suis moins manichéen qu'avant. Et puis, on a aussi connu la galère de nous faire connaître et de vivre de notre musique. Donc quand on nous propose de jouer du métal à un événement comme celui-ci, il faut se dire : "Pourquoi pas et ça peut peut-être ouvrir les esprits". Notre réponse a finalement été très rapide et c'était une évidence d'y participer. 

Et que vous demande alors Thomas Jolly ?

Ce qu'il y a de magnifique avec Thomas Jolly, Daphné Bürki (en charge des costumes) ou Victor Le Masne (compositeur), c'est qu'on a clairement affaire à des gens atypiques, très humbles, qui ont une ouverture d'esprit totale. Ils avaient envie de casser les codes. Il n'y a eu aucune restriction, ils nous ont dit : "Soyez vous-même, lâchez-vous". On était libres à 100% dans l'écriture de notre mouvement musical. Ils nous ont fait venir non pas pour nous canaliser, mais pour qu'on explose et qu'on représente une forme d'explosion. Je les remercie encore.

Après une série de concerts à l'étranger, vous revenez en France pour une tournée qui passera notamment par l'Accor Arena à Paris, le Dôme de Marseille, Bordeaux, Lyon... Cette tournée aura-t-elle une saveur particulière, teintée par les Jeux ?

Quand on a annoncé la tournée française, deux mois après les JO, je pense que beaucoup de gens, qui ne seraient jamais venus à nous, ont acheté des billets par curiosité. Je vois ces concerts presque comme une fête collective, c'est-à-dire : "Rappelez-vous les JO, ça a été un événement mondial et on en faisait partie. Là, on est dans notre pays, célébrons ça." Évidemment, on va jouer le morceau des Jeux et la chanteuse lyrique Marina Viotti sera présente quelques fois, ce qui est nouveau pour nous parce qu'on a habituellement très peu d'invités sur scène.

Mario Duplantier du groupe Gojira lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux de Paris 2024 (AFP)
Mario Duplantier du groupe Gojira lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux de Paris 2024 (AFP)

Les JO vont contribuer à apporter une aura et un supplément d'âme à cette tournée. Nous partons quand même sur 12 dates. En général, quand on ramène 15 000 personnes à Bercy, c'est déjà pas mal pour le potentiel de "métalleux" en France. Mais cette année, on est sûr des jauges de 10 000 places sur 12 dates, soit quasiment 120 000 personnes au total. C'est une grosse tournée française. 

Qu'est-ce que les Jeux continuent d'apporter au groupe ?

Pour les morceaux qui arrivent et que l'on est en train d'écrire, en termes de messages et de musique, je ne vois pas l'impact des JO. En revanche, ils ont changé quelques dynamiques dans le groupe, notamment sur le fait de s'habiller un peu différemment pour être davantage des personnages de scène. Nous, on a toujours prôné la sobriété. On était jusque-là des mecs lambda, pas lookés, pas tatoués. Mais depuis les JO, effectivement, nos habits ont changé. On a bien aimé ce qu'on portait pendant la cérémonie d'ouverture, on a trouvé ça épique. Mon frère, par exemple, a arrêté de mettre son t-shirt noir banal pour mettre une veste un peu plus classe, un peu à la "Mad Max". Donc il y aura "une touche Daphné Bürki" dans la tournée.