Guerre en Ukraine : l'émissaire américain imagine une séparation de l'Ukraine sur le modèle de Berlin de l'après-Seconde Guerre mondiale

La réunion entre son collègue Steve Witkoff et Vladimir Poutine lui donnera-t-elle raison ? L'émissaire des Etats-Unis pour l'Ukraine, Keith Kellogg, a évoqué la possibilité de découper l'Ukraine sur le modèle du "Berlin d'après la Deuxième Guerre mondiale", mais sans les Etats-Unis, en créant des "zones de responsabilité" européennes et russes séparées par le fleuve Dniepr, dans une interview au quotidien britannique Times samedi 12 avril.

Après plus de trois ans d'une invasion meurtrière déclenchée par Vladimir Poutine le 24 février 2022, et des avancées extrêmement limitées vers une trêve, plusieurs pays tels que la France et le Royaume-Uni se sont dits favorables à l'idée d'une présence militaire européenne de maintien de la paix en Ukraine, dont ils proposent même de faire partie une fois le conflit terminé. "Vous pourriez presque faire ressembler cela à ce qui s'est passé avec Berlin après la Deuxième Guerre mondiale, quand vous aviez une zone russe, une zone française, une zone britannique, une zone américaine", dépeint le général Kellogg dans un entretien publié samedi par le Times.

Et pour remplacer le mur de séparation construit en 1961 dans la capitale allemande (puis abattu en 1989 en pleine déliquescence de l'URSS), l'émissaire américain pense au fleuve Dniepr, "un obstacle majeur" naturel qui coupe l'Ukraine et même Kiev du Nord au Sud. La France et le Royaume-Uni seraient à l'ouest du fleuve, la Russie à l'est et les troupes ukrainiennes au milieu, avec une "zone démilitarisée" entre les deux belligérants. Les Etats-Unis n'enverraient aucune force armée, a assuré le responsable.

"Zones de responsabilité" et zone démilitarisée

"Vous regardez une carte et vous créez, faute d'avoir un meilleur terme, une zone démilitarisée (DMZ). Les deux camps reculent chacun de 15 kilomètres", explique l'émissaire américain. Une zone tampon post-guerre, mais de seulement quatre kilomètres de large, existe par exemple entre les Corées du Nord et du Sud depuis 1953. "Vous pouvez surveiller ça plutôt facilement", affirme Keith Kellogg, qui ajoute cependant : "Y aura-t-il des violations ? Probablement, parce qu'il y en a toujours".

Selon Keith Kellogg, une présence anglo-française sous la forme d'une "force de garantie" de la paix ne serait "pas du tout provocatrice" pour Moscou. Cette affirmation interroge, alors que parmi les "justifications" de Moscou pour lancer son invasion meurtrière figurait justement le rapprochement de pays anciennement intégrés à l'URSS avec les alliances militaires occidentales. Le Times souligne également que la comparaison entre l'Allemagne nazie vaincue et l'Ukraine, qui dispose d'un gouvernement fonctionnel et pro-occidental, pourrait cripser Kiev – d'autant plus que Moscou justifie également son invasion par une prétendue "dénazification" de l'Ukraine.

Dans une publication mettant en avant l'entretien avec l'émissaire, le Times a évoqué une "partition" de l'Ukraine comme un volet d'un éventuel accord de paix. Mais Keith Kellogg a estimé que ses propos avaient été "mal interprétés". "Je parlais d'une force de résilience post-cessez-le-feu, en soutien de la souveraineté de l'Ukraine. Je faisais référence à des zones de responsabilité pour une force alliée (sans troupes américaines). Je ne faisais PAS référence à une partition de l'Ukraine", a-t-il écrit sur X, écartant l'idée d'un redécoupage territorial.