«Laissez tomber, on perd notre temps» : comment Mélenchon a poussé la gauche à sacrifier les campagnes au profit des métropoles

Réservé aux abonnés

«Laissez tomber, on perd notre temps» : comment Mélenchon a poussé la gauche à sacrifier les campagnes au profit des métropoles

Une personne regarde les affiches de campagne de la députée sortante Danielle Simonnet (LFI NUPES, opposition de gauche), aux élections législatives anticipées, contre la candidate officielle désignée par LFI pour le Nouveau Front Populaire Céline Verzeletti (soutenue par Jean Luc Mélenchon) à Paris, France le 30 juin 2024 AMAURY CORNU / Hans Lucas via AFP

RÉCIT - Les récentes élections ont réinstauré un clivage territorial entre la gauche des villes et la droite des champs. Plusieurs voix s’élèvent pour y remédier à en vue de la présidentielle.

Beaucoup en ont déjà fait l’amère expérience : une petite phrase malencontreuse au détour d’un discours peut suffire à éclipser tout le reste du développement, et mettre, le cas échéant, le feu aux poudres. Ainsi, dans une récente apologie de «l’élite intellectuelle» de la Martinique, «lieu assez spécial et tout petit endroit»Jean-Luc Mélenchon a affirmé que, comparativement, dans le département de la Lozère, «vous n’avez pas ça». Sous-entendu le département du sud de la France n’a pas cette qualité d’«élite d’intellectuelle». Les Lozériens, qui n’avaient rien demandé, ont assez peu goûté le trait d’esprit. Les élus locaux se sont chargés de répliquer et la presse régionale en a fait ses choux gras. Pas du genre à faire amende honorable, Jean-Luc Mélenchon a tout de même consenti à se rendre dans le département pour témoigner de son attachement, à grand renfort d’envolées lyriques et du style «hussard noir» qu’il cultive à longueur de réunions publiques.

La maladresse de Jean-Luc Mélenchon rappelle à certains égards la tirade quelques années plus tôt de son opposant Raphaël Glucksmann. «Quand je vais à New York ou à Berlin, je me sens plus chez moi, a priori, culturellement, que quand je me rends en Picardie», avait déclaré l’essayiste à la télévision. Il le constatait certes pour le regretter, confessant qu’il s’agit là d’un «problème», mais la petite phrase continue d’alimenter les procès en déconnexion qui visent l’eurodéputé aux ambitions nationales. En réalité, les réflexions des deux hommes, qui se réclament l’un et l’autre de la gauche malgré leurs sérieux différends, sont surtout symptomatiques d’un certain rapport de ce camp aux territoires ruraux et périurbains, teinté au pire de mépris, au mieux de méconnaissance. Le constat s’observe inexorablement dans les enquêtes d’opinion et se vérifie élection après élection : la gauche a rompu le lien avec les campagnes.

Cet article est réservé aux abonnés. Il vous reste 83% à découvrir.

Vous avez envie de lire la suite ?

Débloquez tous les articles immédiatement. Sans engagement.

Déjà abonné ? Connectez-vous