Une bataille après l’autre - À voir absolument
Comédie de Paul Thomas Anderson - 2h50
La pagaille règne. À la frontière mexicaine, des migrants s’entassent dans des camps de rétention. Des révolutionnaires à moitié hippies posent des bombes partout. La répression ne plaisante pas. Bienvenue en Amérique. Laquelle ? Celle d’aujourd’hui ou d’après-demain ? La date n’est pas précisée. DiCaprio s’agite, hagard, en ex-terroriste, le cerveau ramolli par les tonnes de drogue qu’il a absorbées. Il faut fuir, toujours fuir. Cela s’effectue à un rythme d’enfer. Anderson mène sa tragicomédie comme on conduit une Ford Mustang sur une route déserte : pied au plancher. C’est la bonne méthode. Le résultat oscille entre burlesque et inquiétude, interrogatoires musclés et sociétés secrètes, sexualité torride et dénonciation. Tel est notre monde. Il n’est guère glorieux, mais quel spectacle ! Mieux vaut en rire. C’est ce qui se passe. On a là un prodige, un génie. É.N.
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Classe moyenne - À voir
Comédie d’Antony Cordier - 1h35
Philippe (Laurent Lafitte), un avocat d’affaires parisien, et sa famille se prélassent en vacances dans leur somptueuse villa. Sa femme (Élodie Bouchez) est une actrice jadis célèbre. Sa fille Garance rêve de marcher sur ses traces. Elle a invité son petit ami Mehdi, qui vient de terminer ses études de droit. Les gardiens (Laure Calamy et Ramzy Bedia), eux, fêtent l’anniversaire de leur fille avec du mousseux. La révolte gronde entre les pauvres et les riches. Un évier bouché fait déborder le vase. Les morceaux d’anthologie se comptent par poignées. Les petits farcis écrasés à coups de smartphone. Ou la bouteille de romanée-conti vidée dans la piscine. Impeccablement écrit et interprété, Classe moyenne, d’Antony Cordier, a un côté Ruben Östlund mâtiné de Parasite. Le filtre de la comédie n’enlève rien à la critique sociale. Elle n’épargne personne. É.N.
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Muganga, celui qui soigne - À voir
Drame de Marie-Hélène Roux - 1h45
En dialecte swahili, Muganga signifie « celui qui soigne ». Inspiré de faits réels, le film raconte la tragédie de milliers de femmes du Sud-Kivu qui subissent viols et mutilations par des milices hutues dans la région des Grands Lacs de la RDC. Depuis une quarantaine d’années, un chirurgien s’y dresse contre la barbarie et s’applique à redonner de l’espoir à ces femmes. Prix Nobel de la paix en 2018, le docteur Denis Mukwege (Isaach de Bankolé) est un juste. Droit dans ses bottes, puissant, classique dans sa facture, le beau film de Marie-Hélène Roux suscite d’abord une profonde colère. Une indignation contre tous ceux qui ont choisi de fermer les yeux face à ce drame trop longtemps mis sous le boisseau. Mais, avec son bel élan graphique, une sincérité qui emporte tout, le film est avant tout porteur d’espoir. O.D.
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À 2 000 mètres d’Andriivka - À voir
Documentaire de Mstyslav Tchernov - 1h51
Passer la publicitéDix, quinze secondes. Il faut un temps d’adaptation pour comprendre que les images qui défilent appartiennent à la réalité. Le journaliste Mstyslav Tchernov s’est frotté à la ligne de front pour documenter l’une des contre-offensives ukrainiennes et montrer ce que l’on ne voit jamais : la guerre telle qu’elle est. Alors que les radios grésillent, des escarmouches s’engagent. La mitraille passe entre les arbres. Les blessés veulent en finir, les survivants en découdre. Est-ce ainsi que les hommes meurent ? À l’écran, des soldats tombent en moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire. Stupeur face à ces morts en direct, rendues plus irréelles encore par les objectifs grand angle des caméras embarquées. Le sort de ces fantômes ne devrait pas laisser insensible l’académie des Oscars, où cette immersion inédite et saisissante représentera l’Ukraine. B.P.
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Rembrandt - À éviter absolument
Thriller de Pierre Schoeller - 1h47
Au cœur de ce drame anxiogène, Pierre Schoeller mêle le thriller d’espionnage, le pamphlet antinucléaire, une love story tragique, voire l’ébauche d’un drame mystique, le tout plombé par un final fantastique à tendance apocalyptique. Malgré le concours sans faille de grands acteurs, le problème de ce long-métrage, c’est qu’il maintient un flou artistique permanent qui perdra même le plus consciencieux des spectateurs. Le sfumato fonctionne dans l’art pictural, mais rarement au cinéma. Bien sûr, on perçoit l’émergence d’un message sur l’urgence climatique à travers les brumes de cette intrigue filandreuse. Hélas, le smog londonien repéré au début de l’histoire a eu le temps de se répandre tout à son aise dans ce film confus et agaçant qui, à force de courir plusieurs lièvres narratifs à la fois... n’en attrape aucun. O.D.