Le Groupe Rocher prêt à céder Petit Bateau pour repartir de l’avant
«Ces 18 derniers mois, il y a eu beaucoup de sacrifices faits au niveau du Groupe Rocher pour redresser la barre. Nous sommes désormais prêts à rebondir.» Les mots de Jean-David Schwartz, directeur général exécutif du groupe connu pour sa marque éponyme Yves Rocher, diffusent un parfum de grandes manœuvres. Pour monter en puissance, le groupe a décidé de recentrer son activité sur son savoir-faire historique: la beauté et le soin. Avec ses quatre marques clés : Yves Rocher, qui est la plus attractive du secteur de la beauté en France, Sabon, bien implantée au Japon, Arbonne et Dr Pierre Ricaud.
La direction du groupe envisage ainsi d’engager un processus de cession de ses deux marques éloignées du secteur des cosmétiques, dont l’enseigne phare de vêtements pour enfant Petit Bateau. La période est en effet propice. «Petit Bateau a été en difficulté ces dernières années. Mais nous avons pris les choses en main avec des réductions de coûts de fonctionnement, des fermetures de magasins et la relance du commerce, explique Jean-David Schwartz. En 2024, la croissance du chiffre d’affaires a progressé de 3% dans le monde et de 7% en France. C’est très positif dans ce secteur de l’habillement pour enfant en décroissance.» Le groupe prévoit également de vendre Stanhome, qui fabrique des produits d’entretien de la maison, en plus petite forme. «L’enjeu est de trouver des repreneurs qui offrent de nouvelles perspectives de croissance. Si nous y parvenons d’ici la fin 2025, ce serait bien», confie le directeur général.
Ces deux enseignes ne pèsent pas très lourd dans le chiffre d’affaires du Groupe Rocher, qui s’est élevé à 2,2 milliards d’euros en 2024, soit une progression de 2,4% par rapport à 2023. Dont la moitié (1,1 milliard d’euros) est assurée par sa locomotive Yves Rocher. L’an dernier, Petit Bateau a enregistré un chiffre d’affaires de 250 millions, alors que celui de Stanhome s’est établi à 190 millions d’euros.
Un plan d’investissement de 100 millions d’euros
Cette nouvelle étape s’inscrit dans la continuité du plan stratégique de relance du groupe engagé en 2023. Durant ces derniers 18 mois, la direction a pris le taureau par les cornes pour redresser la barre de ce groupe qui n’avait pas réussi à se remettre de la crise du coronavirus. Cette période très délicate a conduit à la fermeture des réseaux de magasins Yves Rocher en Allemagne, en Suisse et en Autriche, ainsi que des boutiques considérées comme des foyers de pertes dans d’autres pays. Des plans de départs volontaires ont également été mis en place et des mesures prises pour optimiser les achats.
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Les résultats sont au rendez-vous : pour Yves Rocher en France (600 millions de chiffre d’affaires), «nous avons récupéré le million de clients perdu durant la pandémie et notre part de marché est revenue à 8,8%», indique Jean-David Schwartz. Au niveau du groupe, outre le chiffre d’affaires qui a retrouvé des couleurs en 2024, la direction insiste sur un retour de la rentabilité. L’an dernier, l’Ebitda s’est établi à 120 millions d’euros, soit une progression de 25% par rapport à 2023, année de surplace par rapport à 2022.
Désormais, pour monter en puissance sur ses quatre marques de soin et de beauté, le groupe entend se donner les moyens: il prévoit d’investir 100 millions d’euros sur quatre ans, soit une hausse de 50% de ses budgets alloués aux investissements. «Avec ce plan d’investissement, nous voulons relancer massivement notre chiffre d’affaires en investissant dans nos marques phares que sont Yves Rocher et Sabon. C’est la priorité et nous verrons ensuite pour investir dans les autres marques», explique le directeur général.
Outre les rénovations de magasins et l’ouverture de nouvelles boutiques, l’investissement dans la recherche et le développement et les moyens alloués à la communication sur ses marques, Groupe Rocher a l’ambition de renforcer sa présence en Asie. Et pour cause. «L’Asie représente 40% du marché mondial de la cosmétique. La croissance y est donc très forte mais nous avons raté le train. Nous avons commencé à inverser la tendance et nous souhaitons accélérer nos implantations là-bas, détaille Jean-David Schwartz. Avec des objectifs chiffrés : «nous visons une croissance du chiffre d’affaires de +15% en moyenne annuelle d’ici quatre ans, contre 8% aujourd’hui». En Inde notamment, où la direction doit conclure un accord avec un partenaire local en mars prochain pour y développer Yves Rocher.
La présence de l’enseigne en Russie reste toutefois une épine dans le pied, alors que nombre d’entreprises françaises ont décidé de quitter le pays depuis le lancement de l’offensive russe en Ukraine en février 2022. Le sujet est délicat. Le groupe assure y rester en soutien aux équipes sur place. Avec quelque 400 magasins installés dans le pays qui opèrent sous franchise (sauf une vingtaine), «la filiale agit de façon totalement autonome», indique le directeur général. Et d’insister sur l’implication du groupe en Ukraine: «on continue à soutenir les équipes avec des programmes divers. En 2024, la croissance des ventes d’Yves Rocher a progressé de 6,4%.»