La France est-elle capable de regarder en face l’ampleur des massacres perpétrés par l’armée française lors de la colonisation de l’Algérie dès le XIXe siècle ? Sur le plateau de RTL, face à Jean-Michel Apathie, la vice-présidente LR du conseil régional d’Île-de-France, Florence Portelli, ne semble pas connaître l’existence de ces massacres ou choisit volontairement de les occulter.
Alors que les deux invités débattent de l’État algérien, qui a refusé de coopérer à la procédure d’expulsion du principal suspect de l’attentat de Mulhouse (Haut-Rhin), perpétré le 22 février, Jean-Michel Apathie lance : « Chaque année, nous commémorons le massacre d’Oradour-sur-Glane, c’est-à-dire le massacre de tout un village. Mais nous en avons fait des centaines en Algérie. Est-ce qu’on en a conscience ? » Le massacre d’Oradour-sur-Glane, en Haute-Vienne, a été orchestré le 10 juin 1944 par une division blindée SS : 643 hommes, femmes et enfants ont été fusillés et brûlés vifs. Indignation immédiate sur le plateau.
« Il a raison, il n’a pas fait d’erreurs historiques »
L’animateur Thomas Sotto s’étrangle : « On s’est comportés comme des nazis en Algérie ? » Jean-Michel Apathie : « Les nazis n’existaient pas, nous ne nous sommes pas comportés comme les nazis, ce sont les nazis qui se sont comportés comme nous l’avons fait en Algérie ! » Le journaliste rappelle alors le recours aux « enfumades » : lorsque les Algériens se réfugiaient dans des grottes, les soldats français amenaient des fagots et y allumaient le feu pour les asphyxier ou les brûler vifs.
Cette remarque n’a pas manqué de scandaliser Florence Portelli, qui y voit une « insulte au peuple français ». Avant que les réseaux sociaux ne s’en emparent, avec une vague de haine de la part du Printemps républicain, de la droite et de l’extrême droite. « La comparaison osée par Jean-Michel Apathie est une odieuse falsification de l’histoire », peste Jordan Bardella (RN) contre celui « qui ne manque jamais une occasion de salir la réputation et le passé de la France ».
Pourtant, Jean-Michel Apathie n’a pas réécrit l’histoire. « Il a raison, il n’a pas fait d’erreurs historiques », explique Alain Ruscio, historien et auteur de la Première Guerre d’Algérie. Une histoire de conquête et de résistance, 1830-1852 (la Découverte, octobre 2024). Si les nazis ne se sont pas inspirés de l’armée française pour commettre leurs crimes, les soldats français ont bien perpétré des enfumades sur le sol algérien.
« Trois, notamment, sont référencées. Quand une tribu opposait une résistance, les Français, pour éviter de perdre des hommes, amenaient des fagots devant les grottes et y mettaient le feu. Tout cela figure sous la plume de certains généraux qui s’en vantaient, dont le général Thomas Robert Bugeaud lui-même. » Un ordre formel signé par ce dernier à l’intention de ses officiers stipule : « Si ces gredins se retirent dans leurs cavernes, fumez-les à outrance, comme des renards. » Un chapitre qui colle mal aux partisans du « glorieux » roman national français.
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