"J'ai réalisé que la série télévisée était prophétique dès j'ai lu le livre" : les équipes qui ont réalisé la série décrivent son lien avec l'époque actuelle

Il y a huit ans, "La Servante écarlate" sortait au début de la première administration Donald Trump. La dystopie d'une Amérique qui virait à la dictature, où les femmes étaient ramenées sous le joug de la religion, au rôle de fécondatrice et où les libertés étaient reniées dans le pays renommé Gilead.

Sa sixième et dernière saison est disponible depuis mardi 8 avril. La série s'achève cette fois avec une lutte finale menée par son héroïne June, séparée depuis le début de sa famille et de ses enfants par des États-Unis devenus totalitaires. Pour Bruce Miller, qui signe cette série depuis sa création, ce n'est pas la série qui est prophétique, mais le roman de Margaret Atwood qu'il a choisi d'adapter. "J'ai réalisé que l'histoire serait prophétique dès que j'ai lu le livre", se souvient-il.

"Je l'ai lu quand j'étais à l'université, quand il est sorti. Je me suis dit que c'était parfait pour l’époque qu’on traversait : avec la majorité morale en Amérique et Ronald Reagan. Je me suis dit : mon Dieu, c'est exactement ça !"

Bruce Miller, le créateur de la série "La Servante écarlate"

à franceinfo

"Et puis je l'ai relu régulièrement. Et à chaque fois que je le lisais, j'avais à nouveau l'impression qu'il était toujours prophétique.", explique Bruce Miller. Au fil des saisons, les auteurs ont pu exprimer leurs craintes, parfois prophétiques. "Par exemple, pour la deuxième saison, j'ai écrit une scène de réunion entre June et sa fille pendant dix minutes. J'ai écrit cette scène en décembre 2017, et quand elle a été diffusée en juin 2018, notre propre pays séparait parents et enfants à la frontière", se souvient Yahlin Chang, l'une des co-scénaristes de la série.

"Quand j'ai écrit cette scène, j'avais fait des recherches sur la situation dans des pays en guerre comme la Bosnie, le Rwanda, le Congo. Mais je ne pensais pas que ça se passerait dans notre propre pays au moment de la diffusion", raconte Yahlin Chang.

Pour la scénariste, la série a une vertu : "L'histoire que nous racontons montre à quel point notre mode de vie et notre démocratie sont fragiles. Et à quel point il serait facile de les briser." Pour le créateur, Bruce Miller, la série a aussi une morale : "Je ne sais pas si la série télévisée fonctionne de cette manière, mais j'espère que le roman de Margaret Atwood encourage les gens à résister."