La maire de Bourg-lès-Valence, qui a refusé de célébrer un mariage suspect, visée par une plainte de SOS Racisme
«J’irai m’expliquer devant les tribunaux s’il le faut», anticipait-elle déjà il y a un mois. La maire divers droite de Bourg-lès-Valence (Drôme), Marlène Mourier, est aujourd’hui visée par une plainte de SOS Racisme pour avoir refusé de célébrer l’union de deux de ses administrés pour lesquels elle suspectait un mariage blanc, le 17 mai dernier. Des suspicions étayées par les propres déclarations du candidat au mariage, un ressortissant tunisien d’une trentaine d’années en situation irrégulière sur le territoire français. Installé dans la région depuis plusieurs années, où il travaille, il est cependant inconnu des services de police et ne fait donc pas l’objet d’une OQTF.
Pour la maire, le profil de la future mariée a également alimenté les soupçons d’union «insincère». Âgée de 49 ans et mère de six enfants, cette dernière est présentée comme «fragile». L’intéressée assurait néanmoins vouloir se marier par amour. Une lettre anonyme, semblant émaner de l’entourage de la quadragénaire pour dissuader les élus de célébrer cette union, avait été reçue en mairie.
Pas de motif pour refuser ce mariage selon le parquet
C’était de toute façon la volonté affirmée de la maire. «Je ne veux pas célébrer une union pour laquelle je me rendrais complice de violation des règles de droit et de manipulation de l’institution du mariage», assénait-elle. Ce faisant, l’édile s’exposait à des poursuites, comme le lui avaient rappelé le procureur de la République et le député local Paul Christophle (PS). Sollicité par la maire selon la procédure habituelle, le parquet de Valence n’avait en effet pas trouvé de motif pour refuser ce mariage et avait ordonné qu’il soit célébré.
«Monsieur K. n’a jamais indiqué se marier uniquement pour les papiers, objectait le procureur de la République dans un courrier consulté par Le Figaro. La volonté de se marier pour régulariser une situation administrative n’est pas exclusive d’un amour sincère». Problème pour Marlène Mourier, le courrier mentionne aussi qu’«aucune investigation» n’a été effectuée par les services de police dans ce dossier. «Quand nous rendons un avis défavorable, il n’est quasiment jamais suivi», déplore l’édile.
S’il a dit qu’il faisait ça pour les papiers, c’est normal qu’elle refuse
Une commerçante de Bourg-lès-Valence (Drôme)
Le samedi suivant, Marlène Mourier avait tenu son engagement en refusant d’unir les fiancés. Ces derniers s’étaient pourtant bien présentés entre les parterres enherbés jouxtant la salle des mariages de cette ville-dortoir de 20.000 habitants, mais avaient trouvé porte close. Une décision qui les habitants avaient plutôt comprise. Et pour cause, lors de l’audience préalable à laquelle doivent se plier tous les futurs époux, le candidat au mariage avait lui-même dit vouloir se «marier pour les papiers», et signé sa déclaration. Lors des auditions menées par les policiers, il a aussi évoqué son «amour sincère» pour sa future épouse.
«On est du côté de la maire, oui», validait alors un de ses électeurs devant la mairie auprès du Figaro. «Si on se marie, c’est parce qu’on s’aime. C’est bizarre de le faire pour des papiers», embrayait une vieille dame apprêtée derrière ses petites lunettes de soleil. «S’il a dit qu’il faisait ça pour les papiers, c’est normal qu’elle refuse», acquiesce une commerçante derrière son étal de baklavas. Pour SOS Racisme, cette position relève en revanche d’une attitude discriminatoire à l’encontre des candidats au mariage. C’est le motif de la plainte déposé par l’association, que nous n’avons pu joindre dans l’immédiat. «Je ne suis pas raciste, se défend Marlène Mourier, je célèbre de nombreux mariages de personnes d’origine tunisienne, algérienne, arménienne et je reçois de nombreux étrangers lors de mes permanences».
SOS Racisme s’appuie sur la décision rendue par le procureur de la République de Valence, qui ne voyait pas de raison de s’opposer à cette union. À l’instar de Robert Ménard à Béziers, Marlène Mourier se dit désormais prête à se défendre devant les tribunaux. «Si le procureur veut me poursuivre qu’il me poursuive», lançait ainsi le mois dernier l’édile drômoise qui a reçu le soutien de nombreux élus RN et LR de la région, dont Laurent Wauquiez. La décision de donner suite ou non à la plainte de SOS Racisme revient désormais au procureur de Valence. En attendant, Marlène Mourier a récemment été invitée à l’Assemblée nationale par le sénateur centriste Stéphane Demilly, à l’origine de l’adoption du texte sur l’interdiction des mariages pour les OQTF à la chambre haute.