Sites nucléaires visés, hauts responsables militaires tués, réplique de Téhéran… Ce que l'on sait des frappes menées par Israël en Iran
Une escalade majeure aux conséquences encore incertaines. L'armée israélienne a mené des raids aériens contre l'Iran, vendredi 13 juin, ciblant des sites nucléaires et tuant des hauts responsables militaires de la République islamique. "Nous avons mené de premières frappes couronnées de succès et, avec l'aide de Dieu, nous allons accomplir bien plus encore", a déclaré le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou. La diplomatie iranienne a affirmé avoir le "droit légitime" de répondre à l'attaque, tandis que le chef de l'Etat Ali Khamenei a promis à Israël un sort "amer et douloureux".
Franceinfo revient sur cette opération, baptisée "Lion dressé" par l'Etat hébreu, et qui survient alors qu'un nouveau cycle de négociations entre Washington et Téhéran sur le programme nucléaire iranien devait avoir lieu dimanche.
Quelque 200 avions mobilisés pour viser une centaine de cibles, plusieurs sites nucléaires touchés
L'armée israélienne affirme qu'environ 200 avions ont participé à cette opération menée durant la nuit contre une centaine de cibles, des installations nucléaires et des sites militaires à travers le pays. Ses avions de chasse ont frappé "des dizaines de cibles militaires, y compris des cibles nucléaires dans différentes régions de l'Iran", a précisé dans la nuit un premier communiqué émis par l'armée. Des explosions ont été rapportées à Téhéran, la capitale iranienne. La télévision publique iranienne a fait état de flammes et de fumée au quartier général des Gardiens de la révolution, l'armée idéologique de la République islamique, dans l'est de la ville.
L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), gendarme nucléaire de l'ONU, a confirmé que l'important site d'enrichissement d'uranium de Natanz, dans la province centrale d'Ispahan, avait été visé. Il a été "touché plusieurs fois", a rapporté la télévision d'Etat, en montrant des images de fumée épaisse s'échappant du site. Israël "a frappé au cœur du programme de missiles balistiques de l'Iran", s'est félicité le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, saluant une opération "couronnée de succès". L'AEIA a assuré surveiller "de près la situation profondément préoccupante en Iran".
Après les raids nocturnes, l'armée israélienne a fait savoir vendredi matin que ses avions de combat continuaient de mener des frappes. "Nos pilotes ont attaqué et continuent d'attaquer des cibles militaires et des cibles liées au programme nucléaire dans diverses régions d'Iran", a commenté le général de brigade Effie Defrin dans un message télévisé diffusé à 7 heures (heure de Paris).
De hauts responsables militaires et scientifiques tués, Téhéran fait état d'au moins 50 civils blessés
Le chef d'état-major iranien Mohammed Bagheri a été tué lors de l'attaque israélienne, a annoncé la télévision d'Etat iranienne. Les agences de presse Mehr et Tasnim ont également rapporté la mort du chef des Gardiens de la révolution, le général Hossein Salami. Les médias locaux ont enfin fait état de la mort d'un autre important responsable du même corps, Gholam Ali Rashid.
Plusieurs scientifiques de premier plan impliqués dans le programme nucléaire iranien ont été éliminés. "Abdolhamid Minouchehr, Ahmadreza Zolfaghari, Amirhossein Feqhi, Motalleblizadeh, Mohammad Mehdi Tehranchi, et Fereydoun Abbasi sont les scientifiques nucléaires martyrs" de l'attaque d'Israël, a énuméré l'agence de presse Tasnim news.
Des civils auraient par ailleurs été touchés. Au moins 50 personnes, dont des femmes et enfants, ont été blessés dans de "fortes explosions" qui ont visé des immeubles résidentiels de la capitale, affirme la télévision iranienne.
L'Iran a déjà commencé à riposter, l'état d'urgence décrété en Israël
Les forces israéliennes tentaient vendredi matin d'"intercepter" une centaine de drones lancés par l'Iran en représailles, a déclaré le porte-parole de l'armée israélienne. Peu avant, la diplomatie iranienne avait affirmé avoir le "droit légitime" de répondre à l'attaque, tandis que le guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, a promis à Israël un sort "amer et douloureux".
Aussitôt l'attaque lancée, le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a décrété l'état d'urgence sur tout le territoire. Une "attaque de missiles et de drones" sur Israël est attendue, a-t-il prévenu. Les écoles sont fermées, les rassemblements interdits et la population invitée à rester près des abris. Les dirigeants de l'Etat hébreu se trouvent dans des lieux sûrs. "Vous allez peut-être devoir rester pour des périodes longues, peut-être plus longues que ce que nous avons connus, dans les abris", a averti le Premier ministre israélien.
Israël estime que Téhéran s'approchait d'un "point de non-retour" vers la bombe atomique
Israël avait appelé jeudi la communauté internationale à "une réponse décisive" après l'adoption par l'AIEA d'une résolution condamnant Téhéran pour non-respect de ses obligations nucléaires. L'Etat hébreu, qui redoute d'être ciblé en cas d'acquisition de l'arme atomique par l'Iran, dénonçait "une menace imminente pour la sécurité et la stabilité régionales et internationales".
Pour justifier le lancement de son attaque, l'armée israélienne a dit vendredi disposer de renseignements prouvant que Téhéran s'approchait du "point de non-retour" vers la bombe atomique. Selon elle, "le régime iranien avait un plan concret pour détruire l'Etat d'Israël".
Washington redoutait jeudi un "conflit massif"
Cette offensive d'ampleur intervient dans un contexte de brusque montée des tensions. Les craintes d'une frappe imminente d'Israël grandissaient en amont des pourparlers entre les Etats-Unis et l'Iran sur son programme nucléaire, prévus dimanche. Donald Trump avait d'ailleurs reconnu publiquement jeudi que le scénario militaire était possible. Il avait déclaré qu'une frappe israélienne contre l'Iran pouvait "très bien se produire" et que le risque d'un "conflit massif" au Moyen-Orient avait conduit les Etats-Unis à réduire la présence leur personnel diplomatique dans la région, en Irak notamment.
Faisant référence aux discussions en cours avec les Iraniens, le président américain avait d'ailleurs appelé jeudi Benyamin Nétanyahou à la retenue. "Je ne veux pas qu'ils interviennent, parce que je pense que cela ferait tout capoter", avait ainsi lancé le milliardaire depuis la Maison Blanche.
L'ONU appelle les deux parties à la "retenue maximale"
Oman, médiateur entre Washington et Téhéran, a condamné une "escalade dangereuse" tandis que l'ONU a appelé les deux parties à la "retenue maximale". L'Arabie saoudite, poids lourd régional, a condamné les frappes israéliennes, les qualifiant d'"agressions" et de "violations flagrantes" du droit international.
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, assure de son côté que "la France suit avec la plus grande attention l'évolution de la situation au Moyen-Orient". "Nous appelons toutes les parties à la retenue et à éviter toute escalade susceptible de compromettre la stabilité régionale", a écrit le chef de la diplomatie sur le réseau social X.
Israël a expliqué aux Etats-Unis que frapper l'Iran était "nécessaire pour sa défense", a déclaré le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio. Les Etats-Unis nient être impliqués dans les frappes israéliennes, mais Donald Trump affirme avoir été prévenu à l'avance par Israël.