«Je prends beaucoup de plaisir» : retour gagnant à Paris pour Fournier, comme un poisson dans l’eau à l’Olympiakos

«J’ai envie de profiter mais vous me faites chier». Signé Evan Fournier, éclatant de rire, lorsqu’on lui demande comment il vit le fait de revenir à Paris, chez lui. De l’humour évidemment pour l’arrière international tricolore, auteur de 18 points en un peu plus de 30 minutes lors de la victoire de «son» Olympiakos sur le parquet du Paris Basketball (73-90), lors de la 25e journée de l’Euroligue. Victoire en forme de revanche, deux mois après le succès parisien à Athènes (90-96), et qui permet à Fournier et compagnie de conforter leur place en tête du classement.

Malgré l’ampleur du score, les locaux ont donné du fil à retordre à l’Olympiakos, revenant à deux possessions dans le dernier quart-temps après avoir accusé un débours de 20 points avant le repos. «Il faut leur donner du crédit, a assuré Fournier, qui a répondu aux questions des journalistes devant la porte du vestiaire grec. Cette équipe a un style de jeu qui fait qu’elle est toujours dans le match, il y a beaucoup de possessions, de tirs, un gros rythme. C’est un jeu de "runs", on sait qu’ils jouent sur l’euphorie parfois, notamment avec Nadir (Hifi) qui tire à trois points... Ils peuvent s’enflammer très vite. On a su garder notre calme», a-t-il ajouté, lui qui avait d’ailleurs proposé ses services à Paris, septième au classement, l’été dernier. «Le timing n’était pas le bon»avait indiqué le président Kahn au Figaro .

Le plein d’émotion

Et le dirigeant étasunien de poursuivre : «J’espère qu’il réalisera une grande saison avec l’Olympiakos… à part sur les deux matchs contre nous (rires)». Raté… Fournier n’a toutefois pas caché avoir été rattrapé par l’émotion de jouer dans la capitale, lui le natif de Saint-Maurice : «Je ne pensais pas que ça allait m’arriver mais j’avais de l’émotion au début du match, beaucoup d’adrénaline et c’est souvent un piège. Dans ces matchs, il faut faire descendre cela».

Il faut dire que le Paris Basket a rendu hommage à l’arrière de 32 ans avant le coup d’envoi pour sa participation à la campagne olympique, l’été dernier. Avec l’argent à la clé, qui a oublié ce parcours des Tricolores à Paris 2024 ? «C’était sympa, un beau petit hommage que le club de Paris m’a fait. Ils n’étaient pas obligés de le faire, donc c’était cool. Ça fait plaisir de voir mes amis, ma famille dans les tribunes. J’étais venu l’année dernière pour un match de play-offs contre Cholet en tant que spectateur et maintenant, comme joueur, c’est une belle salle», a-t-il indiqué, estimant que «l’expérience» de l’Olympiakos, le «roster vraiment bien garni et le système» ont fait la différence.

Mon objectif, c’est de gagner l’Euroligue.

Evan Fournier

Évidemment, l’équipe de France n’a pas évolué à l’Adidas Arena l’été dernier, mais au stade Pierre-Mauroy de Villeneuve d’Ascq puis à l’Accor Arena. Le fait de revenir à Paris a-t-il néanmoins ravivé la flamme olympique chez l’international tricolore (118 sél.). «Non pas du tout, pas ici, c’est derrière moi tout cela. Si j’avais été à Bercy, là, forcément... En fonction de l’endroit où je suis ou des gens que je vois, ça différent aussi. En voyant des gens comme Mathias (Lessort), c’est impossible de ne pas en parler, on a vécu une aventure humaine extraordinaire», a-t-il reconnu, lui qui retrouvera d’ailleurs les Bleus très prochainement, mi-février, comme trois autres vice-champions olympiques. «Je suis content de revoir les gars, remettre le maillot, mais c’est un peu dur de se projeter. Mon objectif, c’est de gagner l’Euroligue», a-t-il juré.

Rappelons qu’Evan Fournier a passé les 12 dernières saisons en NBA. Une aventure qui s’est achevée en eau de boudin, après avoir été placardisé par son entraîneur à New York, Tom Thibodeau, et un trade dans l’une des pires équipes de la ligue nord-américaine, Detroit. Sans offre à son goût en NBA, Fournier a fait le choix de rentrer en Europe et de découvrir l’Euroligue. Direction la Grèce, l’Olympiakos et la ferveur du stade de la Paix et l’Amitié.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’intéressé ne regrette pas son choix. «Je prends beaucoup de plaisir, c’est au-delà de mes espérances au niveau de l’organisation de l’Olympiakos, l’amour que me portent les fans. On espère terminer l’année en beauté», a-t-il décrit, relevant que «le niveau est intéressant (en Euroligue). Si je suis surpris, ce n’est pas par rapport au niveau, mais au style de jeu. On nous vend un style de jeu à l’ancienne, des scores bas, des possessions lentes. Mais ce n’est pas ça du tout pour la majorité des équipes. Comme ce soir... On est l’une des rares équipes qui essaie de jouer lentement et de mettre la balle à l’intérieur, d’avoir de l’alternance... Un peu à l’ancienne mais façon moderne quand même. Il y a énormément d’équipes qui se rapprochent de plus en plus du style NBA».

Pas de trade, un poids en moins

S’il y a bien une chose qui change avec la NBA, c’est qu’Evan Fournier ne risque pas de se faire échanger sans son consentement, comme c’est possible au sein de la NBA et comme c’est arrivé à la surprise générale à Luka Doncic et Anthony Davis il y a quelques jours. «J’avoue beaucoup moins suivre la NBA mais j’étais très surpris pour ce qui est du trade Doncic/Davis, forcément, ça ne paraît pas réel. Mais je pense qu’au final, c’est bien pour la ligue», a-t-il explicité.

Et de poursuivre : «A mon âge, quand tu as une famille et que tu as constamment l’épée de Damoclès de te faire trader, ça devient très dur. Un mois et demi après ma signature à l’Olympiakos, ma femme me disait : "donc là, on est là pendant deux ans, c’est sûr ?". Je lui ai dit : "oui ne t'inquiète pas, tout va très bien se passer on sera là pour deux ans au minimum" (sourire). Il faut prévoir avec les écoles, des trucs cons, le loyer de la maison... C’est un confort et une sérénité très agréables». On imagine bien…

Pour moi, la culture est plus forte que l’argent.

Evan Fournier

Après avoir quitté la NBA l’été dernier, Evan Fournier pourrait-il être rattrapé par la ligue nord-américaine en Europe ? En tout cas, Adam Silver n’écarte pas l’idée d’une NBA Europe à l’avenir. Il se dit même ici et là qu’il aurait sollicité des clubs de football comme Manchester City ou le PSG afin d’intégrer ce potentiel futur championnat, dont on ne sait d’ailleurs pas trop s’il aurait vocation à supplanter l’Euroligue ou à travailler avec elle, voire en parallèle.

«Que voulez-vous que je dise... Je ne sais pas. La NBA a un pouvoir énorme, c’est l’une des plus grosses marques au monde, a d’abord souligné l’ancien joueur de Nanterre et Poitiers, passé par Denver, Orlando et Boston avant NYC en NBA. Mais tu ne peux pas lutter face à l’amour que les Européens ont pour l’Olympiakos, le Pana, le Fener... Ça veut dire quelque chose pour eux, c’est plus qu’un club. Je pense qu’il y a une erreur de calcul de la NBA par rapport à cela. Tu ne peux pas arriver faire un club à Manchester City, les Anglais s’en branlent du basket... Pour moi, la culture est plus forte que l’argent. Après, les Américains ont un tel savoir-faire sur le business qu’ils monteront sûrement quelque chose de très beau et très cohérent, mais je pense que ça aura moins de cœur». Une chose est sûre : on ne perd jamais son temps en tendant son micro à Evan Fournier.