Michel Bassi, celui qui a converti la télévision à la politique

C’est à lui que l’on doit le premier débat télévisé entre les deux finalistes de l’élection présidentielle. En 1974, Michel Bassi arrive à convaincre François Mitterrand et Valéry Giscard d’Estaing d’y participer. L’exercice, toujours très attendu, deviendra un événement télévisuel majeur. Ce soir-là, devant le duo d’animateurs Michel Bassi-Alain Duhamel et des millions de téléspectateurs, VGE lance à son adversaire socialiste la fameuse réplique: «Vous n’avez pas le monopole du cœur.»

Ce fait d’armes journalistique - historique - n’est qu’un jalon de la longue et belle carrière de Michel Bassi, qui vient de rendre son dernier souffle en début de semaine, à l’âge de 89 ans. On peut dire qu’il est, avec Alain Duhamel, le journaliste qui a converti le petit écran à la politique. Sous la houlette de Pierre Desgraupes, les deux hommes présenteront, à partir de 1970, «À armes égales», une émission restée culte, elle aussi. Inspirée de ce qui se faisait alors aux États-Unis, elle opposait des responsables politiques ou des personnalités médiatiques de premier plan. L’époque est encore celle de l’ORTF, d’un audiovisuel sous étroit contrôle gouvernemental, mais les débats n’en sont pas moins musclés.

Porte-parole adjoint à l’Élysée

Né en 1935 à Lille, dans une famille de huit enfants, Michel Bassi entre en journalisme après son service militaire et son passage en Algérie, où il sert sous les ordres de Marcel Bigeard. Il entame sa carrière au Figaro, dont il dirige le service politique dès 1967, à l’âge de 32 ans. Il est de tous les longs voyages du général de Gaulle à l’étranger, qu’il effectue en tandem avec Jean Mauriac, le fils de François, alors journaliste à l’AFP. Souvent le Général leur disait: «Tenez-vous prêts à telle heure, j’aurai quelque chose à vous dire…» Les deux compères rapportaient après les propos présidentiels à leurs collègues.

Observateur passionné de la politique nationale et internationale, Michel Bassi était aussi un grand sportif

Chabaniste dans un journal qui soutient Georges Pompidou, Michel Bassi repère assez vite un certain Valéry Giscard d’Estaing dans le paysage. Pressentant le grand avenir qui attendait ce polytechnicien - comme son propre père -, il écrit sa première biographie, en 1968. À l’élection de ce dernier à la présidence de la République, il décide de quitter le quotidien du rond-point des Champs-Élysées pour rejoindre l’Élysée, comme porte-parole adjoint.

Patron de «France Soir Magazine»

En 1978, il prend la tête de RMC, après un court passage à RTL. Il nomme Jacqueline Chabridon, grande figure du métier, chef du service politique mais doit, sous la pression de la famille princière de Monaco, se séparer de Coluche. Viré à son tour de RMC en 1981 par François Mitterrand, Michel Bassi refuse le chèque qu’on lui propose en contrepartie. Les temps sont durs, jusqu’à ce que Robert Hersant lui confie les clés de France Soir Magazine. L’expérience terminée, il part pour Le Méridional où, pendant cinq ans, il essuie les assauts coléreux de Bernard Tapie qui ferraille contre Jean-Marie Le Pen. Puis il prendra la direction de la Société française de production (SFP), moribonde, en fin de vie.

Observateur passionné de la politique nationale et internationale, Michel Bassi était aussi un grand sportif. Il fut même vice-champion de France universitaire de volley-ball dans sa jeunesse. Dans le dernier quart de son existence, il exerce des fonctions de conseil, notamment en Afrique, et rédige des livres. Parmi eux, La Bataille pour la mairie de Paris (2000) et Cinq présidents à armes égales (Lattès en 2005). Il ne lâche pas, non plus, son éditorial de L’Éclair des Pyrénées, qu’il écrit jusqu’en 2022.

Le Figaro présente ses plus sincères condoléances à sa famille, son fils Éric et sa fille Olivia, ainsi qu’à tous ses proches.