Incident à l'Assemblée : Rachida Dati reconnaît des "débats vifs" mais conteste toute "agression"

Pas d'"agression", ni d'"insultes" ou de "menaces" : telle est la version donnée, mercredi 2 avril, par la ministre de la Culture Rachida Dati qui est revenue sur un incident survenu la veille au soir avec une fonctionnaire de l'Assemblée nationale, alors que la Commission des affaires culturelles et de l'éducation examinait la réforme de l’audiovisuel public. Les débats prévus avec les députés n'avaient alors pas pu reprendre.

"J'ai vu des communiqués" disant "qu'il y avait eu une agression, qu'il y a eu des menaces, qu'il y a eu des insultes. Elles n'ont jamais existé", a martelé, mercredi 2 avril, Rachida Dati lors de la reprise de l'examen du projet de réforme de l'audiovisuel public en commission à l'Assemblée.

Celui-ci a tourné court, une suspension des travaux étant intervenue vers 15h, aussitôt après les explications de la ministre de la Culture sur cet incident. Ils pourraient reprendre à 18h30 mais sans certitude : le bureau de la commission se réunissait en milieu d'après-midi pour envisager la suite, selon un député.

L'examen de ce texte avait été suspendu mardi soir, après ce que des députés de gauche ont dénoncé comme un "grave" incident entre Rachida Dati et une administratrice de l'Assemblée.

Mercredi, la ministre a reconnu "des débats vifs" entre des membres de son ministère et la fonctionnaire. Selon elle, la discussion portait sur le refus d'accepter un amendement que le ministère souhaitait déposer en réponse aux "amendements d'obstruction" des opposants au texte. 

"Je me suis interrogée et j'ai interrogé l'administratrice pour dire pourquoi cet amendement n'était pas accordée", a affirmé Rachida Dati.

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"Une réponse un peu vive"

"Il y a eu une réponse un peu vive, on s'en est expliquées et l'incident était clos", a-t-elle poursuivi. "Je ne souhaite pas que cette commission soit instrumentalisée pour d'autres raisons d'obstruction ou politiciennes", a-t-elle insisté, avant que la séance soit à nouveau suspendue.

Auparavant, dans un propos introductif, la présidente de la commission, Fatiha Keloua Hachi (PS), avait souhaité que Rachida Dati "s'excuse", en pointant "des faits graves". Elle avait publié la veille un communiqué dans lequel elle estimait que les conditions "d'un débat apaisé n'existait pas. 

Devant la presse, l'écologiste Sophie Taillé-Pollian a également estimé durant la nouvelle suspension mercredi que "les conditions (de poursuite des débats) semblent difficiles à réunir en présence de Rachida Dati". "Nous sommes en attente d'une réponse du gouvernement pour savoir si un autre ministre peut défendre le texte", a-t-elle affirmé.

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Dans un courrier mercredi au ministre des Relations avec le Parlement, la présidente du groupe écologiste Cyrielle Chatelain a demandé le report des discussions sur la proposition de loi, déplorant des "conditions d'examen inacceptables", entre l'incident avec la ministre, les amendements de dernière minute et l'absence d'étude d'impact de la réforme. 

Un serpent de mer relancé par Mme Dati

Même si la proposition de loi n'était pas validée en commission, elle pourrait tout de même être examinée dans l'hémicycle. La date prévue est le 10 avril, mais cela pourrait être retardé par l'examen préalable d'un autre texte sur la simplification de la vie économique.

Déjà validée en première lecture au Sénat en 2023, la proposition de loi portant la réforme prévoit de créer une holding, France Médias, qui chapeauterait France Télévisions, Radio France, l'Ina (Institut national de l'audiovisuel), sous l'autorité d'un(e) président(e).

Contrairement aux plans initiaux, France Médias Monde, branche internationale de l'audiovisuel public français (RFI, France 24), pourrait en être exclue.

Serpent de mer relancé par Mme Dati à son arrivée au ministère début 2024, le projet d'origine prévoyait carrément une fusion des sociétés, dans une sorte de BBC à la française, mais il a été interrompu par la dissolution de l'Assemblée à l'été.

Aujourd'hui, "cette réforme n'est pas un projet de fusion" et elle "ne se fera pas contre l'intérêt des salariés", a affirmé Mme Dati mardi. Quelque 15 à 16 000 postes sont concernés.

Des grèves contre le projet ont eu lieu lundi et mardi dans les entreprises en question, Radio France et France Télévisions en tête.

Rachida Dati, qui a déjà dit viser les municipales à Paris en 2026, espère une adoption définitive de la réforme à l'été.

Le calendrier est cependant serré et réunir une majorité des voix des députés n'est pas acquis. Si les macronistes et la droite soutiennent le projet, la gauche est vent debout et le Rassemblement national peut se poser en arbitre.

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Avec AFP