Hot Milk, une adaptation du roman de Deborah Levy qui manque cruellement d’émotions
Un été très chaud en Espagne. Sofia (Emma Mackey) accompagne sa mère, Rose (Fiona Shaw), à Almeria, une station balnéaire pour y consulter le mystérieux docteur Gómez, qui pourrait soigner la maladie de Rose, clouée à un fauteuil roulant. Sofia en profite pour sortir de son cocon familial et croquer la vie à pleine dent, en s’abandonnant au charme d’Ingrid, une jeune aventureuse vivant sous ses propres règles. Mais Rose voit cette émancipation d’un mauvais œil et veut tout faire pour récupérer sa petite fille qui n’en est plus une...Pour son premier long-métrage en tant que réalisatrice, Rebecca Lenkiewicz - scénariste de She Said, le film retraçant l’enquête journalistique de 2017 ayant révélé l’affaire Harvey Weinstein - a décidé d’adapter Hot Milk, le roman de la britannique Deborah Levy. Une adaptation dispensable, peut-on lire dans la presse, ressortie unanime sur le film disponible en salles depuis le 28 mai.
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Dans sa critique intitulée « Hot Milk une adaptation du roman de Deborah Levy très dispensable », Le Nouvel Obs ne peut être plus clair. « Quelle funeste erreur de jugement a pu pousser les remarquables Vicky Krieps et Fiona Show à se fourvoyer dans cette intrigue amoureuse au romanesque anorexique mise en scène comme un roman-photo ? (...) Cette histoire de coup de foudre irrépressible n’est jamais ni sensuelle, ni abrasive. Juste une dispensable adaptation éponyme du roman de Deborah Levy à laquelle personne ne semble croire. » Si Rebecca Lenkiewicz respecte à la lettre le récit de la romancière, la réalisatrice britannique peine à restituer l’atmosphère et les émotions du livre. « Fidèle à la trame du roman, Hot Milk, malgré sa mise en scène sensorielle, peine à en restituer le trouble vénéneux. L’atmosphère instable du livre où l’on doute sans cesse de la véritable nature ou signification de ce qui est présenté se traduit mal à l’image », souligne Le Monde.
« Cette romance, qui illustre l’aspiration de l’héroïne, peine à sortir des sentiers battus et se greffe au forceps à l’intrigue. La néo-cinéaste, n’arrivant pas à tenir son cap, livre une dernière scène maladroite à souhait, plombant la délicatesse qui traversait l’œuvre jusqu’alors », ajoute Sud Ouest . De son côté, Les Échos , regrette que le film « manque malheureusement d’intensité ». Un avis partagé par le média de référence américain Variety . « L’adaptation du roman de Deborah Levy ne parvient pas à retranscrire ce que ressent réellement Sofie, étouffée par sa mère qui ne la laisse toujours pas vivre à 30 ans. » Le scénario « piétine sous un soleil de plomb, figé dans la même torpeur que ses protagonistes. Le drame se cantonne à la carte postale d’une ville que l’on arpente sans relâche et sans but, à pied, en voiture ou en fauteuil roulant…», ajoute Télérama .
Un jeu d’acteur qui sauve le film ?
Le film se démarque toutefois grâce à son casting. Selon Les Échos, Hot Milk ne « retient l’attention que pour ses personnages secondaires incarnés par les guest-stars Vicky Krieps (à cheval) et Vincent Perez (en blouse blanche médicale) ». Les actrices Fiona Shaw et Emma Mackey « incarnent avec finesse les deux rôles principaux », salue La Croix , même si cela « ne parvient pas à sauver ce film boiteux ». « Fiona Shaw est à la fois bouillonnante et désopilante dans son rôle de femme enferrée dans le déni, clouée dans sa chaise et avec sa bouche pour seule arme, tirant chaque phrase comme une rafale », ajoute L’Humanité .
« De ce casting ambitieux, plus qu’Emma Mackey et Vicky Krieps, c’est finalement l’actrice irlandaise Fiona Shaw qui tire le mieux son épingle du jeu en mère hypocondriaque et acariâtre, cherchant à garder sous sa coupe sa fille, dont elle est devenue totalement dépendante », considère de son côté Le Monde. À l’inverse du Dauphiné Libéré , déclarant que le « film trébuche sur sa narration bancale, et sur des seconds rôles — celui de Perez en tête — qui frisent le grotesque ».
La presse anglo-saxonne semble de son côté plus enthousiaste sur le projet. The Guardian n’a pas hésité à mettre 3 étoiles sur 5. « Le jeu d’actrice de Fiona Shaw est excellent. Sa performance donne du ton au film. Quant à Emma Mackey et Vicky Krieps, elles sont également formidables. » The Independent donne, lui, 4 étoiles au long-métrage. « Il y a de tout : des moments drôles, des moments explosifs et même de la romance ! (...) La sensibilité de Hot Milk est bien plus proche de celle des réalisateurs européens comme Yorgos Lanthimos (Pauvres Créatures ) et Jessica Hausner (Little Joe) comparé à ce que peuvent proposer les cinéastes britanniques.»