Le travail peu qualifié s’est «effondré de 40% en 30 ans» en France

Le nombre total d'heures travaillées par les personnes peu qualifiées s'est «effondré de 40% en 30 ans» en France, contrairement à l'Allemagne, au Royaume-Uni ou aux États-Unis, selon une étude publiée ce mardi 4 mars par le Conseil d'analyse économique (CAE). «Cette évolution est très spécifique à la France, on ne la retrouve pas dans les pays voisins», a déclaré l'économiste Camille Landais, coauteur de l'étude «Plein emploi, pourquoi et comment ?», lors d'une présentation à la presse. Les auteurs de l'étude ne sont pas parvenus à l'expliquer, la désindustrialisation très forte en France ne pouvant pas être seule en cause, selon Camille Landais.

L'étude compare l'évolution du marché du travail depuis 55 ans dans quatre pays établit que les Français travaillent en moyenne 100 heures de moins par an que les Allemands et les Britanniques et 300 heures de moins que les Américains. «Cet écart par rapport à nos voisins européens s'explique entièrement par la faiblesse du taux d'emploi français et non pas par le nombre moyen d'heures de travail des personnes en emploi», précise l'étude.

Insertion professionnelle lente et difficile pour les jeunes

L'écart «vient à 100% des jeunes et des seniors», a précisé l'économiste Antoine Bozio, autre coauteur de l'étude, alors que «dans la tranche d'âge des 30-54 ans, aucune différence d'emploi n'est observable avec les États-Unis, l'Allemagne ou le Royaume-Uni». Chez les jeunes, la France se distingue par une insertion particulièrement lente et difficile sur le marché de l'emploi. Ainsi, deux ans après leur fin d'études, les jeunes qui ont mis fin à leurs études à 18 ans ont un taux d'emploi (52%) plus faible de 15 points de pourcentage par rapport à l'Allemagne et de 30 points par rapport au Royaume-Uni.

Chez les seniors, la France a désormais un taux d'emploi supérieur aux États-Unis et au Royaume-Uni pour la tranche d'âge des 55-59 ans, mais elle accuse toujours un retard chez les 60-64 ans, malgré «une remontée progressive à partir des années 2000 mais moins rapide qu'ailleurs» et notamment en Allemagne. Cette remontée s'explique dans un premier temps par la fin des dispositifs de préretraite, puis par les réformes successives impactant l'âge de départ (Fillon et Borne) et le nombre d'annuités nécessaires pour une pension à taux plein (Touraine).

L'étude relève enfin que la hausse du travail féminin, qui a longtemps été un moteur de l'augmentation du nombre total d'heures travaillées, «s'essouffle et stagne désormais». Pour y remédier, il faudrait que les politiques publiques «aident les femmes à surmonter le choc qu'elles prennent dans la figure au moment de l'arrivée des enfants», d'après Camille Landais.