Avec un budget reconduit à 4,5 milliards d’euros pour 2025, le ministère de la Culture s’estime «préservé» par rapport aux autres ministères. Mais les 15 millions d’euros de moins pour les crédits monuments historiques, ainsi qu’une enveloppe pour le patrimoine croissant d’un petit 0,6%, lui font admettre que « le compte n’y est pas » pour les monuments et les musées.
« Ce budget ne permettra pas de faire face au mur d'investissements que nous avons devant nous », remarque l’entourage de Rachida Dati. Ce « mur » se décompose en deux pans : les gros travaux structurels dans des équipements culturels vieillissants - dont le Musée d’Orsay, ou la Cité des sciences et de l’Industrie - et les grands projets voulus par la présidence de la République, auxquels il est délicat pour Rachida Dati de renoncer. Parmi eux, se trouvent un futur musée sur Notre-Dame de Paris, la maison du dessin de Presse, à Paris, ou le musée du Terrorisme, à Suresnes.
Côté travaux, le ministère met en avant, pour 2025, la poursuite de la reconversion de l’ancienne abbaye prison de Clairvaux, dans le Grand Est (14,3 millions d’euros), un programme de restauration du château de Gaillon en Normandie (4,3 millions), les travaux de la cathédrale Saint-Pierre et Saint-Paul de Nantes (6 millions), engagés à la suite de l’incendie de juillet 2020.
L’augmentation des capacités de stockage du site des Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine (17,7 millions) ou la mise aux normes du Palais de la Cité (4,9 millions) sont également programmées. La rue de Valois a par ailleurs confirmé les immenses investissements (amiante, mises aux normes) au Centre Pompidou, qui devraient fermer ses portes l’année prochaine et jusqu’à 2030.
Le patrimoine religieux, quant à lui, bénéficiera de la poursuite du plan Cathédrale, ainsi que de la collecte nationale lancée par Emmanuel Macron, en septembre 2023. Elle a jusque-là récolté 12,3 millions d’euros, ce qui la met loin du compte puisque le but est de rassembler 200 millions d’euros, d’ici cinq ans. Le ministère souhaite la dynamiser, en élargissant le nombre de fondations pouvant être collecteur des fonds.
Restent les grands projets dévoreurs de crédits, auxquels le ministère ne veut pas renoncer de manière frontale. Pour cela, Rachida Dati compte sur un amendement au budget, porté par le gouvernement, dans le débat parlementaire. On ne sait quelle forme pourrait prendre la mesure. Une somme globale? Une nouvelle taxe ou l’affection d’une taxe existante au patrimoine? Mais si elle est votée, elle permettrait d'obtenir un effort supplémentaire «conséquent». 2025 serait alors une année exceptionnelle pour le patrimoine. Les projets ou grands travaux qui pourraient en bénéficier ne sont pas encore décidés ou, du moins, ne sont pas encore publics.
Certes, il faudra trouver une majorité parlementaire pour voter cet amendement, mais selon l’entourage de la ministre le sujet peut « rassembler dans un pays divisé ». Pour faire bonne mesure, et aider par ailleurs à financer le plan ruralité annoncée par Rachida Dati (20 millions d’euros en 2025), la ministre de la Culture a annoncé, vendredi 11 octobre, dans Le Monde , une réforme «en profondeur» du Pass Culture. Mesure voulue par Emmanuel Macron, dont l'efficacité fait débat, elle représente 210 millions d’euros dans le budget Culture. En deux ans, près de 3,4 millions de jeunes en ont bénéficié, et 84% des 18 ans ont touché 300 euros pour des sorties, des livres ou des places de cinéma.
Un rapport de l'Inspection générale des affaires culturelles (Igac), non public, a montré qu'à défaut de guider les jeunes vers les offres culturelles, le Pass Culture est devenu un objet de « reproduction sociale ». Ce qui n'est pas très étonnant. La ministre souhaite donc « donner davantage aux jeunes de conditions modestes », ce qui selon elle ne remettrait pas en cause le côté universel de la mesure.
Une part des 300 euros versés aux 18 ans sera par ailleurs fléchée vers le spectacle vivant, qui représente 1% des dépenses, alors que les achats de BD et mangas sont légion. « Pourquoi ne pas rêver aussi d’un pass qui permette de géolocaliser l’offre près de chez soi, d’organiser un covoiturage, ou de partager des recommandations ? », s’interroge la ministre, qui estime que le pass réformé « peut contribuer à un nouvel âge d’or de la culture en France ».