Rares sont les comédies romantiques qui se penchent sur l’après « happy end » de leur héroïne, les coups du sort, les revers qu’elles subissent, ou qui les laissent vieillir. C’est la petite révolution de Bridget Jones : folle de lui, épilogue attachant des aventures de la plus emblématique célibataire du septième art. La Londonienne a désormais 52 ans et deux adorables enfants, Billy et Mabel, nés de ses amours avec Mark Darcy. Le chevaleresque et coincé avocat défenseur des droits de l’homme (joué par Colin Firth) a trouvé la mort dans une explosion au Soudan, laissant Bridget veuve et mère célibataire. Elle ne s’inquiète plus pour son poids mais de savoir si ses enfants peuvent s’épanouir en l’absence de leur père. Et lutte contre le syndrome de l’imposteur face aux mamans parfaites de l’école.

Après avoir porté le deuil de Mark, il est temps pour Bridget d’aller de l’avant et de se rouvrir aux rencontres, y compris de se mettre sur Tinder ! Un sacré choc générationnel et des cultures. À sa grande surprise, elle ne va pas manquer pas de prétendants entre le professeur de ses enfants (Chiwetel Ejiofor) et un charmant employé d’un parc londonien âgé d’à peine 29 ans (Leo Woodall) !

Incarnée avec une joie de vivre irrésistible par Renée Zellweger, Bridget Jones reste chaotique, gaffeuse, fantasque, entourée d’une bande de fidèles dysfonctionnels et d’une gynécologue ange de patience (formidable Emma Thompson), médecin traitant et psy malgré elle. Toutefois émane de ce volet un ton plus touchant, mélancolique et adulte. Le burlesque et la comédie romantique cèdent, quand il le faut, le pas aux choses de la vie. Le temps passe, les proches disparaissent. Comment entretenir leur souvenir ? Baby-sitter préféré de Mabel et Billy, le playboy cabot Daniel Cleaver est devenu un vieux beau qui craint d’être passé à côté de l’essentiel. La caméra scrute sans merci les rides et la chevelure grisonnante de Hugh Grant.

Née de la plume de Helen Fielding dans les années 1990, Bridget Jones est le fruit de son époque. Son obsession des kilos, sa quête du prince charmant, ses minauderies ont été vilipendées par les féministes. Folle de lui modernise cet héritage ambivalent et le met à la page MeToo : elle donne son consentement avant de se faire embrasser, fréquente un jeunot (un tropisme à la mode à Hollywood de Babygirl à L’Idée d’être avec toi). En dépit des décennies, Bridget Jones résiste et continue de nous interroger sur la représentation des femmes à l’écran.