Viols collectifs généralisés et esclavage sexuel au Soudan : un rapport de Human Rights Watch dénonce des crimes de guerre et contre l’humanité
Au Soudan, « des combattants violent des femmes et des filles et les détiennent comme esclaves sexuelles », dénonce Human Rights Watch (HRW) dans un rapport publié lundi 16 décembre. L’organisation de défense des droits de l’homme a documenté des dizaines de cas impliquant des femmes et des fillettes, âgées de 7 à 50 ans, victimes des Forces paramilitaires de soutien rapide (FSR) et les milices alliées dans le Sud-Kordofan, ravagé comme le reste du pays par plus d’un an et demi de guerre entre deux généraux rivaux.
« Des survivantes ont raconté avoir été victimes de viols collectifs, devant leurs familles ou pendant de longues périodes, notamment alors qu’elles étaient détenues comme esclaves sexuelles par des combattants de RSF », explique Belkis Wille, directrice adjointe de la division Crises et conflits à Human Rights Watch. « Les États membres des Nations unies et de l’Union africaine devraient agir de toute urgence pour aider les survivantes, protéger les autres femmes et filles, et garantir que justice soit rendue pour ces crimes odieux », ajoute-t-elle.
« Ils ont continué à me violer, tous les six »
La région où les témoignages ont été recueillis, le Sud-Kordofan, est en grande partie contrôlée par le Mouvement populaire de libération du Soudan-Nord (SPLM-N), un groupe armé rebelle qui contrôle les monts Nouba au Soudan et certaines parties de l’État du Nil Bleu. Les RSF, qui combattent l’armée régulière du général Abdel Fattah al-Burhane depuis avril 2023, affrontent également le SPLM-N pour le contrôle de ce territoire.
Selon HRW, de nombreuses victimes ont été violées collectivement chez elles ou chez des voisins, souvent devant leur famille, tandis que certaines ont été enlevées et détenues comme esclaves. Parmi les nombreux récits collectés, une femme de 35 ans, d’origine nouba, rapporte que six combattants des RSF en uniforme beige ont fait irruption chez elle, et que l’un d’eux lui a dit : « Vous, les Nouba, c’est votre jour », avant qu’ils ne la violent collectivement. « Mon mari et mon fils ont essayé de me défendre, alors l’un des combattants des RSF les ont abattus. Puis ils ont continué à me violer, tous les six », a-t-elle raconté.
Enlevée à Fayu une nuit de février, Hania, 18 ans et enceinte de trois mois a déclaré à HRW avoir été emmenée dans une base militaire de RSF où des dizaines d’autres femmes et filles étaient déjà détenues. Les combattants venaient « par groupes de trois tous les matins pour prendre des filles pour les violer et les ramener. Puis, le soir, un autre groupe de trois venait, prenait d’autres filles et les violait », explique-t-elle, ajoutant qu’après des tentatives d’évasion les captives avaient été enchaînées et qu’elles étaient battues. La jeune femme a réussi à s’échapper au bout de trois mois de calvaire.
« La violence sexuelle liée aux conflits constitue une violation grave des droits de l’homme, du droit international humanitaire, ou des lois de la guerre, et un crime de guerre. Les violences sexuelles peuvent constituer des crimes contre l’humanité lorsqu’elles sont commises dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique contre une population civile », rappelle l’ONG qui en appelle à « une action internationale significative pour protéger les civils et rendre justice ».
Fin novembre, le patron du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) de l’ONU, le Britannique Tom Fletcher, avait déjà tiré la sonnette d’alarme et mis en garde contre ce qu’il qualifie de véritable « épidémie de violences sexuelles » contre les femmes dans ce pays africain, plongé dans la pire crise humanitaire. Une mission d’enquête internationale indépendante de l’ONU pour le Soudan a également documenté en octobre une escalade des violences sexuelles, « des viols, de l’exploitation sexuelle et des enlèvements à des fins sexuelles ainsi que des allégations de mariages forcés et de traite d’êtres humains ».
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