AME, contribution des plus aisés, taxe sur les billets d’avion... Que contient le budget 2025 de la commission mixte paritaire ?
Le chemin législatif est encore loin d’être terminé pour le budget de l’État en 2025. Mais une première étape a déjà été franchie vendredi, avec une version commune du texte proposée par 14 députés et sénateurs à l’occasion d’une commission mixte paritaire. Ce lundi, le premier ministre François Bayrou va le soumettre à l’Assemblée nationale.
Le chef du gouvernement déjà exprimé son intention d’utiliser l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le texte sans vote, qui peut encore être amendé jusqu’à la dernière minute, pour éviter la censure des députés. Mais les élus de La France insoumise ont d’ores et déjà annoncé leur intention de déposer une motion de censure. Le Figaro fait le point sur ce que contient le texte validé par la commission mixte paritaire, qui peut encore subir des ajustements.
Le budget de l’AME réduit de 111 millions d’euros
La majorité de droite du Sénat souhaitait diminuer l’aide médicale d’État (AME) de 200 millions d’euros. Les crédits accordés à l’AME seront finalement réduits de 111 millions d’euros, selon le texte de la commission mixte paritaire, sur un budget total de 1,3 milliard d’euros. Le chef de file des députés socialistes, Boris Vallaud, n’a pas caché son mécontentement vendredi, sur le réseau social X : «Nous ne sommes pas satisfaits de la baisse des crédits de l’AME. Nous demandions le rétablissement des 200 millions d’euros coupés au Sénat. Toute atteinte à l’AME est une faute. Nous n’accepterons en aucune manière de réduction des soins des étrangers dans l’année.»
Les contributions des plus aisés et des grandes entreprises maintenues
Si cette version du texte est adoptée lundi à l’Assemblée nationale, les plus aisés pourraient être mis à contribution durant un an, contre deux initialement. La contribution différentielle sur les hauts revenus doit permettre d’imposer à hauteur de 20% minimum les contribuables dont le revenu fiscal de référence dépasse les 250.000 euros, multipliés par deux pour un couple. Cette mesure vise à gagner deux milliards d’euros de recettes.
Les grandes entreprises sont, elles aussi, mises à contribution avec une taxe exceptionnelle qui devrait s’élever à 20,6% du montant de l’impôt sur les bénéfices de 2024, pour celles ayant généré entre 1 et 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Cette contribution s’élèverait à 41,2% pour les entreprises ayant dépassé les 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Au total, 400 grandes entreprises seraient concernées par cette mesure. Cette dernière pourrait faire grincer des dents le PDG de LVMH, Bernard Arnault, qui a exprimé mardi son désaccord : «Quand on revient en France et qu’on voit qu’on s’apprête à augmenter de 40% les impôts des entreprises qui fabriquent en France, c’est incroyable. Pour pousser à la délocalisation c’est idéal !» L’armateur CMA-CGM serait, lui aussi, visé par une taxe exceptionnelle d’un an inscrite dans le texte.
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Des taxes revues à la hausse
Plusieurs taxes ont été revues à la hausse par la commission mixte paritaire, à commencer par celle de solidarité sur les billets d’avion. Elle est ainsi passée de 2,63 euros à 7,30 euros pour un billet en classe économique vers une destination française ou européenne. Au total, le dispositif rapporterait environ 800 à 850 millions d’euros à l’État, calcule un parlementaire.
La taxe sur les rachats d’actions et sur les transactions financières est aussi concernée par une hausse, de 0,3 à 0,4%. Autres propositions inscrites dans le texte : un malus renforcé sur l’achat de voitures thermiques et une fiscalité augmentée sur les chaudières à gaz.
Les arrêts maladie des fonctionnaires plus remboursés à 100%
Dans la fonction publique, les agents semblent épargnés par l’allongement du délai de carence des arrêts maladie, de 1 à 3 jours. Mais ils risquent d’être affectés par une baisse de leur indemnisation de 100 à 90% de leurs arrêts maladie.
Les budgets des ministères réajustés
Pour réduire le déficit à 5,4% du PIB, des coupes budgétaires ont été décidées dans plusieurs ministères, notamment sur l’Aide au développement, à la Culture, à l’Agriculture, à la Recherche et à l’Enseignement supérieur. Le budget sur l’Écologie est, lui, relevé de 300 millions d’euros, pour renflouer le Fonds vert qui finance les communes dans leur transition écologique. Le budget du Sport, que le gouvernement avait envisagé de diminuer ces derniers jours malgré la fronde du secteur, a été sanctuarisé dans sa version proposée à l’automne, déjà nettement réduite par rapport à 2024.
L’effort financier demandé aux collectivités locales, lui, a été stabilisé depuis plusieurs semaines sur la version du Sénat, soit environ 2,2 milliards d’euros demandés aux territoires. Avec, pour les départements, la possibilité de relever le plafond des frais de notaires (DMTO) de 0,5 point, sauf pour les primo-accédants. Pour les régions, la possibilité de prélever sur les entreprises un «versement mobilité» jusqu’à 0,2%, voté au Sénat, a vu son taux ramené à 0,15%.
Dénoncé par toutes les oppositions pour son coût et son manque d’efficacité, le service national universel (SNU) a vu ses crédits diminuer, résistant encore à ce stade à une suppression pure et simple. Les crédits de l’Agence bio, supprimés au Sénat, ont aussi été rétablis, comme promis par le gouvernement.
Maintien des 4000 postes d’enseignants
Le gouvernement avait finalement renoncé à la suppression de ces postes, un avis suivi par la commission mixte paritaire. Les postes de 4000 enseignants sont donc maintenus dans le texte proposé lundi à l’Assemblée nationale. Mais à budget constant : les 50 millions d’euros nécessaires à ce rétablissement seront prélevés ailleurs dans le budget de l’Éducation.
«Nous allons créer 2000 postes d’accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) pour poursuivre la dynamique de l’école inclusive», avait indiqué mi-janvier la ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, au Parisien. «Le budget de l’Éducation nationale est sanctuarisé, c’est un geste fort de la part du gouvernement pour l’école et nos enfants.»
Les avantages des anciens premiers ministres et présidents sauvegardés
La sénatrice centriste de l’Orne, Nathalie Goulet, avait déposé un amendement pour supprimer les avantages des anciens premiers ministres et présidents, estimés à 2,8 millions d’euros. Sa proposition n’a finalement pas été retenue par la commission mixte paritaire, qui a décidé de continuer d’octroyer ces avantages aux élus, comme une voiture avec un chauffeur ou un secrétariat.