La Fête au bouc, Conversation à La Cathédrale... Les œuvres les plus remarquables de Mario Vargas Llosa

Prix Nobel de littérature en 2010 pour « sa cartographie des structures du pouvoir et ses images marquantes de la résistance individuelle, la révolte et la défaite »Mario Vargas Llosa était un véritable penseur du XXe siècle. Son opposition aux dictatures de Trujillo et Odria dans La Fête au bouc et Conversation à La Cathédrale caractérisent son engagement, lui, le seul à pouvoir exprimer « de façon vaste, ambitieuse, complexe » la totalité du monde fictif.

L’écrivain hispano-péruvien est décédé dimanche à l’âge de 89 ans à Lima, où il vivait depuis quelques mois en retrait de la vie publique, comme l’a annoncé sa famille dans un message sur les réseaux sociaux. L’occasion de revenir sur ses œuvres les plus marquantes...

La Fête au bouc (2000)

« Un bon roman dit toujours la vérité, et un mauvais ment », disait Mario Vargas Llosa. L’auteur voyait le roman comme une réponse critique à la réalité. Dans La Fête au Bouc, l’un de ses romans les plus célèbres, il prenait l’exemple du tyran dominicain Rafael Trujillo qui touchait au mensonge par la vérité. Dans ces trente années de terreur, tout était vrai, et cependant tout conduisait au mensonge le plus intolérable. Mario Vargas Llosa y faisait la radiographie d’une société de corruption et de turpitude. Il dénonçait notamment la dictature de Trujillo, ancien président de la République dominicaine, et la terreur du peuple.

La Ville et les Chiens (1963)

La Ville et les Chiens est le premier roman de Mario Vargas Llosa. Paru en 1963. Il se situe au Pérou, au collège Leoncio Prado de Lima, où quatre garçons, surnommés « les chiens », décident de s’opposer à la discipline. Le vol, les mensonges et la violence vont devenir leurs maîtres mots dans ce récit couronné du Prix de la critique espagnole. L’oeuvre a contribué à l’émergence du mouvement littéraire appelé «boom latino-américain».

Conversation à La Cathédrale (1969)

Il est inscrit parmi les cent meilleurs romans en espagnol du XXe siècle. S’il ne devait « sauver qu’un seul de [ses] romans », Mario Vargas Llosa aurait sauvé « celui-ci ». Conversation à La Cathédrale est considéré comme l’ouvrage le plus ambitieux de l’auteur. Le récit se déroule au milieu des années 1950, durant et juste après la dictature d’Odria. Son incipit, «À quel moment le Pérou avait-il été foutu?», est devenu l’un des plus célèbres de la littérature hispanophone. Découpé en quatre parties, l’ouvrage plus philosophique qu’historique, expose un dialogue entre deux hommes dans une cathédrale. Vargas Llosa y raconte, à travers les lignes, les chemins qui conduisent un pays entier à la soumission ou à la collaboration avec un dictateur.

La maison verte (1966)

Avec pour décor la ville côtière de Piura, dans le nord du Pérou, et la jungle amazonienne, ce roman entremêle trois histoires dans une maison close nommée la « maison verte ». Son fondateur, Don Anselmo, est un homme d’affaires au passé inconnu et sans scrupule. Adepte d’une technique narrative complexe, Vargas Llosa construit son œuvre comme un puzzle, avec des dialogues simultanés et différents plans spatiotemporel. Dans une lettre antérieure à la publication du roman et adressée à l’auteur, l’écrivain argentin Julio Cortázar faisait ainsi l’éloge du roman : « Il suffit que tu racontes à ta façon pour que tout tienne dans une même instance narrative, sans cette séparation scolaire entre la » description et l’action « propre au romancier lambda ».

La guerre de la fin du monde (1981)

Situé dans une région pauvre du nord-est du Brésil à la fin du XIXe siècle, le roman traite de la guerre de Canudos, un conflit entre l’élite économico-militaire de la toute jeune république brésilienne et une rébellion de paysans regroupés autour d’Antonio Conselheiro, un prédicateur messianique. Une incursion de Vargas Llosa hors de ses décors habituels et dont la genèse est due à l’étonnement provoqué par un livre de l’auteur brésilien Euclides da Cunha, Hautes Terres : la guerre de Canudos (1902). « Pour moi, c’était la première description strictement américaine d’un événement américain », avait expliqué l’auteur péruvien.

Le Poisson dans l’eau (1993)

Longtemps militant communiste au Pérou, où il s’opposait à la dictature du général Odría, Mario Vargas Llosa se présente en 1990 à l’élection présidentielle sous l’étiquette de la droite libérale. Sa défaite au second tour face à Alberto Fujimori lui inspire sa première autobiographie, Le Poisson dans l’eau, récit fiévreux de sa longue bataille électorale. Il y raconte son adolescence brimée par un père sévère, son séjour au collège militaire Leoncio Prado, son mariage précoce à l’âge de 19 ans avec sa tante et son voyage à Paris qui avait déterminé à jamais sa vocation d’écrivain.

Éloge de la marâtre (1990)

Ce roman érotique se concentre sur le personnage de Don Rigoberto, amoureux de doña Lucrecia. Problème, son propre fils la convoite. Mario Vargas Llosa y conte parfaitement la façon « paradoxale et perverse » de la « déréliction péruvienne » avec ironie et truculence, où un garçon tente de séduire sa belle-mère.

Les Cahiers de Don Rigoberto (1997)

Dans Les Cahiers de Don Rigoberto, suite logique d’Éloge de la marâtre, Mario Vargas Llosa aborde le thème de la nostalgie. Tristesse et solitude s’emparent des rues de Lima. Le personnage de Don Rigoberto, séparé de doña Lucrecia, fantasme du bonheur perdu. La mémoire de sa dulcinée le hante. L’auteur emploi un style parodique et multiplie les références culturelles et les liens avec l’actualité.

La Llamada de la tribu (2018)

Deuxième partie de son autobiographie, La Llamada de la tribu est un portrait intellectuel de Mario Vargas Llosa. À la place d’un récit factuel et personnel, comme c’était le cas dans Le Poisson dans l’eau en 1993, l’auteur dresse une liste des sept écrivains qui ont marqué sa vie. On y retrouve notamment Adam Smith, José Ortega y Gasset, Friedrich August von Hayek, sir Karl Popper, Raymond Aron, sir Isaiah Berlin et Jean-François Revel. Ces personnalités du monde de la littérature l’ont fait passer du marxisme le plus orthodoxe au libéralisme.