Nantes : le retour retardé des voitures sur le pont Anne-de-Bretagne irrite les commerçants
Un certain flou a gagné le calendrier des travaux. Il y a un bientôt un an, la métropole de Nantes lançait le coup d’envoi d’un chantier phare du second mandat de Johanna Rolland, la maire socialiste de la cité des ducs. Au cœur du projet : l’élargissement et la transformation du pont Anne-de-Bretagne. Cet ouvrage stratégique du centre-ville, censé devenir le plus large pont d’Europe, a été fermé en avril 2024 à la circulation automobile. En lien avec les travaux, diverses voies d’accès de part et d’autre du pont ont aussi été interdites aux voitures, au prix d’une profonde perturbation des mobilités en centre-ville. Grognons, voire furibards, les automobilistes nantais s’étaient vus rétorquer que ces désagréments seraient levés «en avril 2025». Or, à quelques semaines de l’échéance, la métropole n’est plus en mesure d’indiquer quand les voitures seront de nouveau les bienvenues.
«La réouverture du pont interviendra avant la fin d’année 2025», indique désormais Nantes-Métropole, en précisant au Figaro que «les entreprises travaillent actuellement à définir toutes les optimisations possibles pour les phases suivantes de ce grand chantier». Autrement dit, la réouverture à la circulation automobile du pont Anne-de-Bretagne devrait intervenir à une date indéterminée, entre ce printemps et décembre 2025. Pas de quoi réjouir les automobilistes, contraints de prendre leur mal en patience depuis un an. La nouvelle scandalise surtout les commerçants des quartiers voisins de l’ouvrage.
«On nage en plein flou»
Présidente de l’association des commerçants du quai de la Fosse, Éléonore Kurtz déplore une «visibilité absolument nulle». «Les travaux ont fait fuir la clientèle. Nous avons eu des pertes de chiffres d’affaires immédiates après la fermeture du pont à la circulation automobile», explique-t-elle, en décrivant un invraisemblable chaos de mobilités sur les quais. «C’est devenu la jungle à cause des vélos , qui ont - eux - toujours le droit d’emprunter le pont, aux côtés des piétons. Des clients âgés ont pris peur et n’osent plus venir», ajoute la professionnelle. La fourchette pour le moins imprécise de Nantes-Métropole n’aide pas non plus les commerçants à se projeter et à anticiper au mieux le printemps et l’été, en particulier alors que la période des terrasses doit s’ouvrir le 15 avril. «C’est du travail supplémentaire, pour lequel nous devons bloquer des prestataires trois mois à l’avance, or nos interlocuteurs ne savent pas quoi nous répondre. Nous savons que nos trottoirs vont finir par sauter, mais on ne sait pas quand, témoigne Éléonore Kurtz. On nage en plein flou».
«Avant c’était avril, maintenant c’est potentiellement décembre… Peut-être bien que le pont sera bloqué jusqu’à l’année prochaine, qui sait ?», rit jaune une représentante de l’association des commerçants de Lamoricière, qui souffrent de l’enclavement de leur quartier, désormais coupé d’un accès direct au centre-ville. «On se croirait enfermés ! Plusieurs petits commerces s’inquiètent de la baisse notable de leur chiffre d’affaires. Et la mairie n’a répondu à aucune de nos demandes de réouverture ponctuelle de nos rues pendant les travaux», soupire-t-elle.
Pour soutenir les commerçants pendant la durée des travaux, une commission de règlement à l’amiable (CRA) a été chargée d’accompagner les demandes d’indemnisation des entreprises lésées par les travaux. Le chantier s’étale en effet largement autour de l’ouvrage, en raison des travaux de rénovation d’anciens réseaux souterrains, préalable à l’installation de la future ligne de tramway qui empruntera, à terme, la version achevée du pont Anne-de-Bretagne. Lors d’un point d’étape du chantier, fin février, la métropole s’était félicitée de l’indemnisation de 19 commerçants, pour un total de 684.641 euros. «Ce n’est pas bien merveilleux, quand on sait qu’il y a près de 200 commerçants sur le périmètre», nuance Éléonore Kurtz. En février, plusieurs professionnels avaient confié au Figaro se trouver «en grande difficulté» et déploraient le «deux poids, deux mesures» des indemnisations, qui ont été refusées à plusieurs nouveaux commerces. Les travaux du pont Anne-de-Bretagne doivent s’achever fin 2027.