Redoublement, groupes de niveau... Ce que va annoncer Gabriel Attal après la dégringolade de la France au classement Pisa

«Élever le niveau de l’école» et «redonner de l’autorité aux enseignants». Tel est, depuis la rentrée scolaire, le mantra de Gabriel Attal qui, le 5 octobre, avait lancé la mission «exigence des savoirs». Deux mois plus tard jour pour jour, l’heure est déjà aux annonces choc. «D'année en année, de réforme en réforme, l'autorité de votre expertise pédagogique a pu être progressivement affaiblie», écrit Gabriel Attal dans un mail envoyé aux enseignants ce 5 décembre, que le Figaro a pu consulter, en amont de ses annonces médiatiques prévues en début d’après midi.

Le redoublement

Dans sa lettre aux enseignants de ce mardi, l'homme politique a fait savoir que les enseignants «auront désormais le dernier mot s'agissant du redoublement» afin de «donner toutes les chances à nos élèves de réussir». «Votre avis quant aux conditions de passage de vos élèves dans la classe supérieure a été rendu accessoire dans le texte même du Code de l'éducation», poursuit le ministre qui annonce dans ce courrier mettre fin dès le premier trimestre de l’année 2024.

Les professeurs pourront par ailleurs «recommander, voire prescrire» des stages de réussite «conditionnant le passage des élèves en classe supérieure» pendant les vacances scolaires.

Le redoublement est une pratique en perte de vitesse en France depuis plusieurs années. Le classement Pisa 2022 publié ce mardi montre que 10% des élèves français âgés de 15 ans avaient redoublé au moins une fois dans leur scolarité, contre 40% en 2003, «ce qui dénote un grand changement en vingt ans». Aujourd'hui, la part des redoublants en France est à peine supérieure à celle de la moyenne des pays de l'OCDE. Ce qui convient plutôt bien aux organisations syndicales, qui estiment que le redoublement «n'est efficace que pour certains élèves dans des situations bien particulières».

Primaire : nouveaux programmes et méthode de Singapour obligatoire

«Tant se joue dès l'école primaire», estime Gabriel Attal. Le ministre annonce donc que de nouveaux programmes s'appliqueront à l'école primaire, à commencer, dès septembre prochain, par les classes de la maternelle au CE2, avec pour ligne directrice «la clarification», l'intégration d'objectif annuel et «le choix clair de la pédagogie explicite.»

« Dès la rentrée prochaine, la révision des programmes de l'école primaire nous permettra d'adopter progressivement la méthode de Singapour pour les mathématiques, anticipant par exemple l'apprentissage des fractions et des nombres décimaux dès la classe de CE1 », explique aussi le ministre, affirmant que cette méthode, désormais appliquée par 70 pays, «a fait ses preuves».

Des groupes de niveau au collège

Mi-novembre, après la publication des résultats des évaluations nationales de septembre dernier, Gabriel Attal avait fait part de son «inquiétude» concernant le niveau des élèves de quatrième dans un entretien accordé au Parisien . La «réponse» pourrait être «des groupes de niveau» au collège, avait-il alors estimé, reprenant une piste qu'il avait déjà évoquée lors de la Journée mondiale des enseignants, début octobre. Ce mardi, il a confirmé que des groupes de niveau en français et en mathématiques seraient instaurés dès 2024 en sixième et en cinquième. À partir de 2025, cette organisation sera étendue aux classes de quatrième et troisième.

La plupart des syndicats enseignants voient d'un mauvais œil cette mesure, dont ils craignent l'effet «stigmatisant». Le Snes et le SE-Unsa rappellent par ailleurs l'importance de l'hétérogénéité des groupes, «qui ne freine pas les meilleurs et accélère les progrès des plus fragiles». Le Snalc, en revanche, souligne à quel point il est difficile pour les professeurs d'enseigner à des élèves de niveaux très divers. Et défend un projet de collège modulaire dans lequel le français et les mathématiques seraient dispensés en groupes de niveau «à effectif réduit» pour les élèves les plus en difficulté.

Le brevet obligatoire pour entrer au lycée

À l’heure actuelle, un élève ayant raté son brevet des collèges peut tout de même passer au lycée. À partir de 2025, ce ne sera plus le cas. Désireux de «donner une véritable exigence au diplôme national du brevet», Gabriel Attal a décidé de «conditionner l'accès direct au lycée» à l'obtention du brevet. Ceux qui ne l'obtiendront pas rejoindront une classe «prépa-lycée» afin de «consolider leur niveau, rattraper leur retard et être mieux armés pour la suite». Par ailleurs, les épreuves terminales représenteront désormais 60% de la note finale du brevet, au lieu de 50% actuellement.

Une nouvelle épreuve de bac en fin de première

Le bac change à nouveau. À l'épreuve de français de fin de première va s'ajouter, à partir de l'année scolaire 2025-2026, une nouvelle épreuve anticipée de mathématiques et de culture scientifique, «pour l'ensemble de nos élèves».

Des manuels scolaires labellisés

Début octobre, lors de son discours à l’occasion de la Journée mondiale des enseignants, Gabriel Attal abordait la question des manuels scolaires. Il pointait notamment du doigt la trop grande « hétérogénéité» de ces manuels. Au congrès des maires, en novembre, il est revenu sur ce sujet, proposant de labelliser certains manuels, «quand on considère que leurs méthodes sont prouvées scientifiquement comme efficaces».

Dans sa lettre aux enseignants, il a finalement confirmé que les manuels scolaires de l'école primaire seront labellisés, sur la base d'une efficacité «prouvée par la science et la pratique». À l’avenir, l'État financera des manuels scolaires en lecture et mathématiques. «Je souhaite, à l'instar des modèles appliqués au Japon ou au Portugal, que les modalités de labellisation intègrent la participation de professeurs du terrain, précise le ministre. Tant d'études le disent : les manuels jouent un rôle clé. Or, 60 % des élèves n'en bénéficient pas en CP. Pour renforcer les chances de réussite sur tout le territoire, et même s'il s'agit d'une compétence des collectivités locales, l'État financera désormais des manuels scolaires en lecture et mathématiques des élèves de CP et de CE1 (...) Je lancerai les achats pour la rentrée 2024.»