«Je me dégoûte» : au procès de P. Diddy, une ex-petite amie raconte les sévices sexuels qu’il lui imposait jusqu’au vomissement

Son témoignage ressemble tristement à celui de Cassie, la compagne de P. Diddy pendant plus de dix ans, qui a pris la parole dès la deuxième semaine du procès. Jeudi 5 et vendredi 6 juin, une autre ex-petite amie du rappeur américain, Sean Combs de son vrai nom, a elle aussi raconté les sévices sexuels qu’elle a subis durant deux ans. Son intervention est intéressante car elle est la dernière partenaire du producteur jusqu’à son arrestation en septembre 2024. Présentée sous le pseudonyme de Jane, la jeune femme a décrit pendant plusieurs heures avoir été contrainte d’avoir des relations sexuelles avec des escorts masculins - pouvant durer plusieurs jours - et de transporter de la drogue pour le compte de P. Diddy.

Depuis le 5 mai, la star déchue de 55 ans comparaît dans le tribunal fédéral de New York pour «trafic sexuel», «transports à des fins de prostitution» et «complot de racket», l’équivalent en France d’«association de malfaiteurs». Le puissant producteur de hip-hop qui plaide non coupable est accusé d’avoir «soumis ses victimes à des violences physiques, psychologiques et verbales» pour les forcer à participer à des soirées sexuelles, connues sous le nom de «Freak offs», sous l’emprise de drogues. Pour ce faire, Sean Combs se serait servi de son empire musical, «ses employés, ses ressources et son influence (...) créant ainsi une entreprise criminelle dont les membres se sont livrés (…) à la traite à des fins sexuelles, au travail forcé, aux enlèvements, à la corruption et à l’entrave à la justice», détaille l’acte d’accusation rendu public par la justice américaine.

Trafic sexuel

Jane a décrit ce qu’elle surnomme les «nuits d’hôtel», ces soirées durant lesquelles elle était obligée d’avoir des rapports sexuels avec des prostitués. Elles se sont rapidement transformées en des marathons sexuels pouvant durer entre 24 et 30 heures, rythmées en plusieurs «rounds». «Une nuit de plaisir s’est transformée en toute notre relation», a-t-elle affirmé, expliquant avoir «ouvert la boîte de Pandore» sans «réussir à la refermer».

Aucun préservatif n’était utilisé malgré les demandes répétées de la jeune femme. L’influenceuse de profession a précisé qu’elle avait toujours mal à l’issue de ces rencontres et souffrait régulièrement d’infections. Cette description ressemble fortement à celle faite par Cassie des «Freak offs», ces soirées orgiaques durant lesquelles Diddy la contraignait à avoir des relations sexuelles avec des prostitués.

Alors que les procureurs tentent de prouver que Diddy était à l’origine d’un trafic sexuel, d’hommes et de femmes, Jane a déclaré qu’elle avait un temps été chargée - ainsi que les assistants du rappeur - de réserver le transport des escorts d’un État à l’autre, dont le prix s’élevait parfois à plusieurs milliers de dollars.

Emprise financière

En larmes, Jane a par ailleurs raconté la fois où elle a avoué à P. Diddy qu’elle n’aimait pas avoir ces relations sexuelles pendant lesquelles le rappeur ne faisait qu’observer. Quand elle protestait ou réclamait vouloir être seule avec Sean Combs, celui-ci réagissait avec «dédain», a-t-elle affirmé. Elle a plusieurs fois supplié son petit ami célèbre d’arrêter, notamment dans un texto : «Je suis bien plus que ça, être aimée dans le noir dans des chambres d’hôtel faisant des choses qui me dégoûtent», a-t-elle lu à la barre. «Je ne veux plus jouer ce rôle dans ta vie».

«C’est sombre, sordide et ensuite je me dégoûte», a-t-elle poursuivi, ajoutant avoir l’impression de se prostituer. «Je ne veux pas me sentir obligée de faire ces nuits dans la peur de perdre mon toit». Mère célibataire, la jeune femme a en effet expliqué être devenue dépendante financièrement du rappeur qui «payait (son) loyer».

L’impression d’être sous l’emprise du rappeur a été renforcée, a poursuivi Jane, par un «pacte d’amour» verbal conclu par le couple en 2023, stipulant que les «nuits d’hôtels» faisaient partie de leur relation tout comme un versement mensuel de 10.000 dollars. Jane a ajouté que le rappeur continuait à lui transférer cette somme alors même qu’il est en prison. De son côté, la défense a fait valoir que les relations entre Jane et le producteur étaient consensuelles.

Transport de drogue

En outre les rapports sexuels, la témoin a affirmé avoir transporté de la drogue à deux reprises pour le rappeur. Devant les membres du jury, la jeune femme a raconté avoir confié à un employé de Diddy qu'elle ne se sentait «pas à l'aise» de transporter de la drogue entre Los Angeles et Miami, il lui aurait répondu qu'il n'y avait «pas de problème (...) Je le fais tout le temps».

Jane a néanmoins avoué consommer de la drogue, et en particulier de l’ecstasy, devenue indispensable pour tenir lors des marathons sexuels. La témoin a décrit une fois où elle avait tenté de rester sobre durant une «nuit d’hôtel» avec plusieurs hommes à l'instigation de Sean Combs, jusqu'au point de vomir, se disant «révulsée». «Sean est rentré et je lui ai dit que je venais de vomir et il était genre “C'est bien, tu vas te sentir mieux”». «“On y va parce que le gars est là, le troisième gars”», a-t-il ajouté, selon la témoin.

L’audition de Jane pourrait se poursuivre plusieurs jours. Le procès, au terme duquel P. Diddy risque la perpétuité, pourrait quant à lui durer encore au moins un mois.