TÉMOIGNAGES. "L'attente est en train de me tuer" : après l'accord de cessez-le-feu au Proche-Orient, les familles des otages israéliens entre espoir et crainte
Israël et le Hamas ont accepté, mercredi 15 janvier, un accord pour un cessez-le-feu à Gaza et la libération d'otages, qui doit mettre fin à un an et demi de guerre. La première phase de l'accord doit durer 42 jours et entrer en vigueur dimanche avec les premiers otages libérés.
"J'ai bon espoir. J'ai peur. Je suis sous pression." Yossi Schneider vit des montagnes russes émotionnelles. Cet Israélien se demande s'il reverra Shiri Bibas, sa cousine, kidnappée avec ses deux enfants, Ariel et Kfir, et leur père Yarden le 7 octobre 2023. "Nous ne savons pas s’ils sont vivants ou non. S’ils vont revenir ou pas. Sont-ils blessés ? Quelle est leur situation mentale ? On ne sait rien. C'est effrayant", poursuit Yossi Schneider.
Pour Yossi Schneider, les retrouvailles avec ses proches sont à portée de main, et pourtant, c'est maintenant que l'attente est la plus insoutenable : "Ce que fait le Hamas en libérant 33 personnes, en 42 jours avec d'abord trois personnes dimanche et quatre personnes après une semaine, c'est... Je ne sais pas si vous avez une famille, et des enfants, mais imaginez : vous attendez un texto et dans ce message on va vous dire si votre famille est toujours en vie ou pas. C'est ce qui s'est passé lors du dernier deal. Nous avons attendu tous les jours pour recevoir un texto pour voir si ma famille allait revenir ou non. Ils étaient censés être relâchés dans le premier deal et ça n'a pas été le cas. Personne ne garantit qu'ils le seront dans le cadre de cet accord. Ils peuvent répéter qu'ils ne les ont pas trouvés comme ils l'ont fait la première fois. Le Hamas joue avec nous. L'attente est en train de me tuer."
"Tant que ce n'est pas fini, ce n'est pas fini !"
La famille Sharabi a perdu quatre des siens depuis le 7 octobre 2023 et elle attend maintenant le retour d'Elie, le seul survivant présumé. "Nous ferons tout pour le récupérer, affirme Sharon, son frère. Tout d'abord c'est un moment très intense de l'histoire du pays après un périple, très long, éprouvant et exténuant, de pratiquement 16 mois. Ce n'est pas seulement un événement privé de notre famille. C'est une célébration pour tout le peuple israélien."
Malgré l'émotion qui est intense, la prudence est de rigueur. Car tout le monde le comprend. En particulier les familles d'otages il s'agit d'un accord d'une très grande fragilité. Originaire d'Irak, Shlomo Mantzur, 86 ans, est le doyen des otages. Sa sœur, Hadassah se dit remplie de foi et d'espoir : "Mais nous sommes en plein déluge d'émotions. Tant que ce n'est pas fini, ce n'est pas fini ! Tant que nous ne voyons pas Shlomo ici, que nous ne pouvons l'embrasser, je ne pourrai pas me calmer."
Pour Yossi Schneider, les images qui proviennent de Gaza après l'annonce du cessez-le-feu ont du mal à passer : "Je viens de voir des vidéos de Gaza. Dans certaines d'entre elles on voit des célébrations, ils tirent en l'air et ils crient en arabe : Merci au Hamas ! Ils ne célèbrent pas la fin des combats. Ils célèbrent le fait qu'ils ont gagné." Et quand on lui demande s'il pense que le Hamas a gagné, il répond : "Vous avez vu ce qui s'est passé à Gaza ? Quand des enfants meurent, personne ne gagne."
Samedi, la veille de la libération des premiers otages, ce sera l'anniversaire du petit Kfir Bibas. Il aura 2 ans. "J'espère que dimanche il sera là, et que nous pourrons lui apporter un gâteau, un cadeau d'anniversaire et lui faire un énorme câlin", déclare Yossi Schneider. Le cauchemar prendra fin lorsque les otages "reviendront tous", ajoute-t-il.