Festival de Cannes 2025 : "Woman and Child" de Saeed Roustaee, un manifeste féministe dissimulé sous un mélo
À l'instar de son compatriote Jafar Panahi, en compétition avec Un simple accident, le réalisateur iranien Saeed Roustaee défie le régime islamique iranien avec une veine cinématographique sociale "de résistance".
Sélectionné en compétition au Festival de Cannes en 2022, son film, Leila et ses frères, avait été interdit en Iran et la projection sur la Croisette lui avait valu une condamnation à six mois de prison pour "propagande de l'opposition contre le système islamique", et à cinq ans d'interdiction de tourner. L'actrice principale, Taraneh Alidoosti, avait aussi subi les foudres du régime islamique en écopant de cinq mois de prison après avoir publié une photo d'elle sans voile. Leurs peines ont finalement toutes deux été levées.
Woman and Child ("Zan o Bacheh"), son quatrième film, était présenté sur la Croisette jeudi 22 mai après-midi. Cette nouvelle chronique familiale en forme de tragédie grecque raconte le quotidien de Mahnaz, veuve, la quarantaine, qui élève avec l'aide de sa jeune sœur et de sa mère ses deux enfants, Aliyar (Sinan Mohebi), un ado intelligent mais turbulent, et Neda (Arshida Dorostkar), une fillette adorable qui fait les devoirs de toute la famille. Aliyar, qui joue le chef de famille à la maison et le caïd à l'école, se voit exclu pour une semaine.
Hamid (Payman Maadi), le petit ami de Mahnaz, très pressé de l'épouser, exige d'elle qu'elle débarrasse l'appartement familial de toute trace de ses enfants pour la cérémonie de présentation avec ses parents. Elle cède à ses exigences et confie pour deux jours Aliyar et Neda à leur grand-père, le père de son mari défunt. Cette cérémonie marque le début d'une série de tragédies pour Mahnaz, qui ne pourra désormais compter que sur elle-même pour obtenir réparation et préserver ce qu'il lui reste de sa famille.
Corruption et patriarcat
Avec ce quatrième film, Saeed Roustaee creuse sa veine sociale à la Ken Loach. À travers le destin tragique de Mahnaz, il livre le portrait d'une femme frappée par le destin, qui se bat avec courage pour garder sa dignité dans une société où les droits des femmes sont sans cesse bafoués.
Malgré la censure et les contraintes imposées par les autorités islamiques, comme celle de faire porter le voile à tous les personnages féminins, ce nouveau film de Saeed Roustaee n'élude pas les aspects les plus sombres de la société iranienne, patriarcale et corrompue.
En montrant la ténacité de Mahnaz, vaillante et combative face à l'enchaînement des événements qui s'acharnent sur elle, Saeed Roustaee signe un véritable manifeste féministe qu'il emballe habilement dans un mélo. Ce manifeste, déployé dans une réalisation d'une très grande vivacité, est porté par l'intensité du jeu de l'actrice Parinaz Izadyar, et de son éclatant jeune partenaire, Sinan Mohebi.
La fiche
Genre : Drame
Titre original : "Zan o Bacheh"
Réalisation : Saeed Roustaee
Avec : Parinaz Izadyar, Sinan Mohebi, Payman Maadi
Pays : Iran
Durée : 2h11
Sortie : prochainement
Distributeur : Diaphana Distribution
Synopsis : Mahnaz, une infirmière de 45 ans, élève seule ses enfants. Alors qu'elle s'apprête à épouser son petit ami Hamid, son fils Aliyar est renvoyé de l'école. Lorsqu'un accident tragique vient tout bouleverser, Mahnaz se lance dans une quête de justice pour obtenir réparation...