Assassinat dans une mosquée du Gard : les avocats de la famille d’Aboubakar Cissé demandent que la justice considère le caractère terroriste du meurtre

«L’acharnement de l’auteur des faits sur cet homme qu’il ne connaissait pas démontre que son intention dépassait la seule intention de tuer un homme.» Près d’une semaine après le meurtre d’Aboubakar Cissé, jeune fidèle d’une mosquée de La Grand-Combe, dans le Gard, les avocats de sa famille, Mes Yassine Bouzrou et Mourad Battikh, demandent que la justice considère le caractère terroriste de l’affaire, selon des informations du Parisien, confirmées au Figaro par les deux conseils.

Les avocats s’apprêtent à déposer plainte avec constitution de partie civile pour «assassinat à caractère terroriste» ce vendredi. Dans ce document, consulté par Le Figaro, Mes Bouzrou et Battikh réclament que les investigations soient confiées au Parquet national antiterroriste (PNAT). Pour l’heure, une information judiciaire pour «assassinat aggravé», en raison du caractère antimusulman de l’attaque, a été ouverte et confiée à un juge d’instruction du pôle criminel de Nîmes, le 28 avril.

«Les circonstances de cet assassinat démontrent que cette atteinte volontaire à la vie» constitue «un acte terroriste», affirment Mes Bouzrou et Battikh, avant de lister plusieurs éléments et circonstances du drame en attestant, selon eux. Ils pointent le mode opératoire, «choisi par l’auteur des faits pour terroriser». Vers 8h30, vendredi 25 avril, Aboubakar Cissé, Malien de 22 ans, croisait la route d’Olivier H., devant le lieu de culte qu’il fréquentait, et où il était particulièrement impliqué. Les deux hommes, qui ne se connaissent pas, entament alors une brève discussion avant de se diriger vers la salle de prière, selon les images filmées par la vidéosurveillance de la mosquée.

Acharnement

D’autres images, dans la salle, montrent ensuite Aboubakar Cissé se prosternant debout, puis à genoux. Le meurtrier présumé l’imite avant de se relever subitement et de sortir un grand couteau. Avec détermination, il poignarde alors sa victime, encore au sol, à une quarantaine de reprises, notamment au torse et à l’abdomen, puis sort son téléphone et filme la victime en train d’agoniser. «Ton Allah de merde», «Je l’ai fait», déclare-t-il dans une succession de propos décousus.

Il savait ainsi que des personnes fréquentant la mosquée trouveraient son corps sans vie et atrocement mutilé à leur arrivée dans le lieu de culte

Maîtres Yassine Bouzrou et Mourad Battikh

Outre l’acharnement du mis en cause sur le jeune fidèle, les avocats soulignent qu’il a pris le temps de le mettre en scène lors de son agonie, d’une façon particulièrement barbare, en extrayant volontairement de son corps certains de ses organes, avant de le filmer. Ils précisent que le suspect a agi en conscience, sous l’œil de plusieurs caméras de vidéosurveillance, ce «qu’il mentionne dans sa vidéo de revendication».

«Il savait ainsi que des personnes fréquentant la mosquée trouveraient son corps sans vie et atrocement mutilé à leur arrivée dans le lieu de culte», pointent les avocats, avant de noter : «Le choix de l’auteur des faits de diffuser ces images au public sur les réseaux sociaux démontre également son entreprise individuelle de terroriser le plus grand nombre de personnes possibles.» Tout comme le fait qu’il explique, dans cette séquence, vouloir «commettre d’autres actes similaires».

«Lieu de paix»

Pour la famille de la victime, le meurtrier d’Aboubakar Cissé ne cherchait pas seulement à commettre un acte visant la religion musulmane. Si tel avait été le cas, il «aurait pu commettre une atteinte à la vie dans la rue, ou en tout état de cause ailleurs qu’au sein même d’un lieu de culte», «censé représenter un lieu de paix pour les croyants», concluent leurs conseils.

Lundi, la cavale du meurtrier présumé, Olivier H., avait pris fin à plus de 700 kilomètres de la petite commune gardoise. Le mis en cause, d’origine bosnienne, de culture chrétienne, et apparenté à une communauté de gens du voyage, avait bénéficié de la complicité de proches pour se cacher dans l’Hérault pendant le week-end, puis faire route vers Menton et l’Italie. Avant de se rendre de lui-même dans un commissariat de Pistoia, une petite commune toscane située au Nord de Florence, 72 heures plus tard.