Quand Jacques Delors renonçait à se présenter à l’élection présidentielle dans «7 sur 7» sur TF1

Figure de la gauche française et de la construction européenne, Jacques Delors est décédé ce mercredi 27 décembre à 98 ans. C’est sa fille Martine Aubry qui a annoncé la triste nouvelle.

Alors que les sondages en 1994 lui servaient sur un plateau une victoire dans la course à l’Élysée, Jacques Delors annonçait ne pas se présenter. Pourtant la querelle à droite entre Édouard Balladur et Jacques Chirac lui était plus que favorable. Ce dernier l’emportera avec 52.6% des suffrages en 1995. C’est sur le plateau de «7 sur 7», face à Anne Sinclair que l’homme politique avait partagé sa décision avec les Français.

«Mes exposés, je les fais d’habitude à partir de peu de notes, mais c’est trop important. Comme beaucoup le savent, je n’ai jamais organisé ma vie en fonction d’une carrière à réaliser ou de postes à conquérir. J’ai toujours essayé de choisir de travailler et de militer là où j’estimais être le plus utile pour les valeurs que je défends, pour la société et pour mon pays. Et c’est dans ce même esprit que j’ai orienté mes réflexions de ces derniers mois», a-t-il déclaré le 11 décembre 1994 sur TF1.

Les déceptions de demain seraient pires que les regrets d'aujourd'hui

Jacques Delors dans «7 sur 7»

«J’ai décidé de ne pas être candidat à la présidence de la République. Ce n’est pas une décision qui fut facile à prendre», assure ensuite l’homme politique avant d’évoquer dans un premier temps des «raisons personnelles». «Je vais atteindre 70 ans. Je travaille sans relâche depuis 50 ans. Il est plus raisonnable dans ces conditions d’envisager un mode de vie plus équilibré entre la réflexion et l’action», explique-t-il.

L’argumentation de Jacques Delors face à Anne Sinclair est aussi politique pour celui qui était convaincu que son pays avait besoin de «profondes réformes pour rénover la démocratie». «Je suis arrivé à la conclusion que l’absence d’une majorité pour soutenir une telle politique quelles que soient les mesures prises après l’élection ne me permettrait pas de mettre mes solutions en œuvre», poursuit-il.

«Je ne souhaiterais pas, après avoir été élu, être obligé de cohabiter avec un gouvernement ne partageant pas mes orientations», exprime avec franchise Jacques Delors avant d’ajouter : «J’aurai alors le sentiment d’avoir menti aux Français en leur ayant proposé un projet pour la France qui ne pourrait pas être mis en œuvre. Là est mon devoir qui rejoint la nécessité d’apporter plus de cohérence et plus de transparence dans la vie démocratique».

«Ne pas donner d’illusion aux Français. En effet, les déceptions de demain seraient pires que les regrets d’aujourd’hui», conclut l'homme politique ce soir-là sur TF1.

À VOIR AUSSI - Anne Sinclair ne veut plus interviewer les politiques : «J'ai fait mon temps, j'estime qu'il faut laisser la place aux autres»