Guerre en Ukraine : l'Europe et Kiev redoutent les négociations de paix entre Trump et Poutine

Washington tente de rassurer. L'initiative prise par Donald Trump directement avec Vladimir Poutine sur l'Ukraine n'est pas une "trahison" de ce pays, a assuré jeudi 13 février le chef du Pentagone lors d'une réunion avec les alliés européens qui, pris de court, réclament une place à la table des négociations.

"Il n'y a pas de trahison", a déclaré Pete Hegseth depuis le siège de l'Alliance à Bruxelles. "Il y a la reconnaissance que le monde entier et les États-Unis sont investis dans la paix, une paix négociée", a-t-il ajouté.

Pour le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius, il est toutefois "regrettable" que les États-Unis aient fait d'emblée des concessions "avant même le début des discussions", tandis que le chancelier Olaf Scholz a dit à Politico refuser une "paix imposée" à l'Ukraine.

"À mon avis, il aurait été préférable de parler de la question de l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan ou de possibles pertes de territoire à la table des négociations", a affirmé Boris Pistorius devant la presse. 

Le secrétaire américain à la Défense avait jugé mercredi qu'une adhésion de l'Ukraine à l'Otan dans la foulée d'un éventuel accord de paix entre Kiev et Moscou n'était "pas réaliste", tout comme un retour de l'Ukraine dans ses frontières d'avant 2014, c'est-à-dire avec la Crimée, annexée par Moscou.

Tout accord de paix sur l'Ukraine négocié dans le dos des Ukrainiens et des Européens est voué à l'échec, a averti pour sa part la cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas, devant la presse, à son arrivée au siège de l'Otan à Bruxelles.

Réagissant également, le président du Conseil européen Antonio Costa, a estimé que la paix en Ukraine doit être plus qu'un "simple cessez-le-feu".

"Nous continuons, nous sommes forts"

Alors que les responsables russes affichaient leur satisfaction après l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine, la partie ukrainienne est elle, restée très prudente et discrète jeudi.

"Il y a trop de rumeurs inutiles et de théories du complot autour des négociations et des positions", a estimé sur Telegram Daria Zarivna, conseillère en communication auprès du chef du cabinet du président Volodymyr Zelensky, appelant à la prudence.

"Nous sommes forts", a affirmé quant à lui le ministre ukrainien de la Défense Roustem Oumarov. "Là maintenant, le message est que nous continuons. Nous sommes forts, nous sommes capables".

Aucune paix "juste et durable sans les Européens"

Les chefs des diplomaties de six pays européens et celui de l'Ukraine avaient déjà de leur côté insisté mercredi soir sur la nécessité que rien ne se fasse sans l'Ukraine et que l'Europe soit bien présente à la table des futures discussions.

L'Ukraine doit être "étroitement engagée" dans toute négociation de paix et tout accord doit être "durable", avait averti de son côté le secrétaire général de l'Otan Mark Rutte.

"Nous souhaitons échanger sur la voie à suivre avec nos alliés américains", indiquait pour sa part un communiqué publié à l'issue d'une réunion à Paris des chefs de la diplomatie française, allemande, polonaise, italienne, espagnole, britannique et ukrainienne.

"L'Ukraine doit bénéficier de solides garanties de sécurité. Une paix juste et durable en Ukraine est une condition nécessaire à une sécurité transatlantique forte", ajoute le texte, qui rappelle l'engagement des pays européens en faveur de l'"indépendance, la souveraineté et l'intégrité territoriale" de l'Ukraine "face à l'agression russe".

"Il n'y aura aucune paix juste et durable en Ukraine sans la participation des Européens", avait lancé avant le début de la réunion le Français Jean-Noël Barrot, tandis que l'Allemande Annalena Baerbock et l'Espagnol José Manuel Albares Bueno assuraient qu'aucune décision sur l'Ukraine ne pouvait être prise "sans l'Ukraine".

Cette réunion s'est tenue après que Donald Trump et Vladimir Poutine se sont parlé pendant plus d'une heure et ont décidé, selon la présidence américaine, de lancer des négociations "immédiates" pour mettre fin au conflit en Ukraine.

Donald Trump a promis une rencontre prochaine avec son homologue russe et prédit un cessez-le-feu "dans un futur pas si lointain" en Ukraine. Le président américain a ensuite informé son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky de l'appel avec Vladimir Poutine.

De son côté, Vladimir Poutine a dit à Donald Trump vouloir trouver une "solution de long terme" au conflit ukrainien via des "pourparlers de paix", a annoncé le Kremlin.

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Avec AFP