Le calvaire qu’ont subi les proches de Samuel Paty n’est donc pas terminé. Mickaëlle Paty, sœur du professeur assassiné par un terroriste islamiste tchétchène le 16 octobre 2020, a déposé plainte contre un «doctorant à la Sorbonne», Pierre Jacquel, qui a accusé l’enseignant d’«islamophobie» dans une publication datant du 3 décembre dernier. «Sans islamophobie, ce drame ne serait jamais arrivé. Patty (sic) était probablement un islamophobe laïc, mais si un musulman le dit, on parlerait d’apologie du terrorisme. Le père de famille musulman (Brahim Chnina , NDLR) fait le coupable idéal, et ce procès va encore alimenter l’islamophobie», avait-il écrit.
Depuis début novembre, la cour d’assises spéciale de Paris juge huit personnes mises en cause dans l’assassinat du professeur, parmi lesquelles figurent une collégienne pour dénonciation calomnieuse, et son père, Brahim Chnina, Marocain de 52 ans, soupçonné de participation à une association de malfaiteurs terroristes. Il est soupçonné, aux côtés du militant islamiste Abdelhakim Sefrioui, d’avoir massivement relayé les mensonges de l’adolescente sur les réseaux sociaux dans le but de «désigner une cible», «susciter un sentiment de haine» et «ainsi préparer plusieurs crimes», selon l’accusation.
Dans une publication sur X, l’avocate de Mickaëlle Paty, Carine Chaix, a annoncé ce jeudi 5 décembre un dépôt de plainte pour apologie du terrorisme à l’encontre du «doctorant de la Sorbonne». Cette plainte a été effectuée au nom de la sœur de l’enseignant assassiné et de l’association Défense des Serviteurs de la République - créée en 2023 pour défendre la liberté d’expression et protéger les agents publics, les élus et les citoyens engagés contre les menaces -, aujourd’hui présidée par Didier Lemaire, professeur de philosophie qui avait «alerté sur l’islamisme» dans la ville de Trappes.
«Discours habituellement tenus par les plus intégristes des islamistes»
«Ces propos salissent volontairement la mémoire de Samuel Paty en le traitant d’islamophobe qui a bien cherché ce qui lui est arrivé et visent à justifier sa décapitation en raison de sa prétendue islamophobie», peut-on lire dans le communiqué de l’avocate. «Si cet individu ne va pas jusqu’à glorifier explicitement l’acte terroriste, il tend à le justifier en lui donnant comme seule source l’islamophobie prétendue de Samuel Paty, des profs “laïcs” et plus généralement de notre société. Il ose ainsi affirmer que c’est “l’islamophobie de la société et de nombreux profs laïcs qui sont la racine du terrorisme», poursuit Me Carine Chaix.
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Pour l’avocate, une telle affirmation est digne «des discours habituellement tenus par les plus intégristes des islamistes qui participent à la menace terroriste dans notre pays et au climat de peur qui règne à l’école. Son discours attise volontairement la haine envers les “nombreux” professeurs (non musulmans puisque “islamophobes” qui font respecter la laïcité», écrit-elle. Et de souligner : «Mes clients déposent plainte car la propagande haineuse qui arme idéologiquement ceux qui passent à l’acte doit cesser.»
De son côté, l’homme qui se présente comme «doctorant de la Sorbonne» a réagi dans une publication sur X. «Il est triste de voir la liberté d’expression et la justice instrumentalisées», a-t-il écrit. «Expliquer une cause A par un facteur B n’est pas de l’apologie du terrorisme, même si l’explication ne vous plait pas. Comme d’habitude, je me bas pour ce qui est juste, qu’importe les adversaires. Lutter contre l’islamophobie est à la fois un acte moral, participer à diffuser des connaissances scientifiques, et aider à éviter de nouveaux drames.» Et de conclure : «En attendant, la lutte contre l’islamophobie est un combat qui me comptera toujours comme allié.»