Donald Trump réélu président des États-Unis après une défaite, une première depuis... 1892

45e président des États-Unis, Donald Trump s’apprête à en devenir le 47e après avoir remporté l’élection du 5 novembre 2024. Un come-back fracassant à la Maison-Blanche qui n’est pas pour autant inédit. L’ex et nouveau président marche aujourd'hui sur les pas d’un lointain prédécesseur, Grover Cleveland, qui en 1892 sortit vainqueur des urnes après avoir essuyé une défaite en 1888. Il avait auparavant occupé les bureaux de la Maison-Blanche de 1885 à 1889.

Monsieur «anti-corruption»

Mais la comparaison s’arrête là car le démocrate Grover Cleveland n’a que peu de traits communs avec le flamboyant milliardaire investi par les Républicains. Fils d’un pasteur presbytérien, ce natif du New Jersey construit sa carrière sur sa réputation d’homme intègre. Avocat, il était entré dans la profession par la petite porte après avoir interrompu ses études pour soutenir sa famille à la mort de son père. Dans la ville de Buffalo où il exerce, il entre en politique au parti démocrate. Maire de la ville en 1882, il mène une politique anti-corruption qui le fait remarquer. Et c’est ainsi que son nom est suggéré pour briguer le poste de gouverneur de l’État de New York, élection qu’il remporte la même année. 

La voie est ouverte. Grover Cleveland est désigné par son camp, candidat à l’élection présidentielle de 1884. Il a la charge de combattre le républicain James G. Blaine à la réputation tellement douteuse qu’il a été lâché par les réformateurs de son parti, les Mugwumps, qui préfèrent soutenir le candidat démocrate. 

Vainqueur en novembre, le premier président démocrate depuis la guerre de Sécession, prête serment en janvier 1885 à l’âge de 47 ans sans jamais avoir eu, semble-t-il, l’ambition d’atteindre la fonction suprême. C’est ce que note à l’époque Le Figaro. Le journal, en novembre 1892, citera un passage d'une lettre inédite du gouverneur Cleveland, en date du 20 octobre 1884: «Imaginez-vous un homme à ma place sans ambition aucune pour une situation plus élevée que celle qu'il occupe, appréhendant constamment d'être appelé à assumer les charges et les devoirs les plus lourds et les plus élevés qui puissent incomber à un homme. La perspective du succès, au lieu de me réjouir, m'inspire une sorte de terreur. Il en a été de même toute ma vie...» 

«Ugly honest» se marie

D’abord célibataire, le 22e président des États-Unis marque aussi l’histoire américaine en étant le seul hôte de la Maison-Blanche à y organiser son mariage. Cleveland est, il est vrai, surnommé «Ugly honest». Le Figaro dresse ainsi son portrait: «Gros et fort, il a la face d'un bull-dog. Les yeux sont petits et les lèvres larges. Le nez est court et gros surtout au bout. Les cheveux sont comme des baguettes de saule pleureur en hiver. Il les brosse en arrière mais ils retombent de chaque côté de sa figure. Ce n'est pas un bel homme, c'est mieux, c'est un bon homme.» 

Frances Folsom Cleveland épouse à 21 ans en 1886 le président américain de 27 ans son aîné. Elle est la première dame la plus jeune des États-Unis. Ils auront cinq enfants. / Bridgeman Images

Lui qui avait dû essuyer les attaques de son adversaire lors de la campagne présidentielle au sujet d’une liaison et d’un enfant illégitime, surprend en épousant en 1886 une très jeune fille de 21 ans dont il était le tuteur après la mort de son père. La très charmante Frances Cleveland, plus jeune première dame de l’histoire, est aussi très charismatique. Elle gagne le cœur des Américains. Lorsque son mari perd l’élection suivante en 1888 face au républicain Benjamin Harrison, tout en remportant le suffrage populaire, elle prédit leur retour «dans quatre ans pile» et demande au majordome de bien garder les meubles en l’état.

La question des droits de douane que Cleveland n’avait pas réussi à baisser malgré ses promesses lors de son premier mandat domine encore la campagne de 1892 après quatre ans de protectionnisme et une augmentation considérable du prix des produits importés. Le démocrate, également opposé au bimétallisme (deux étalons, or et argent) source d’inflation, l’emporte une nouvelle fois. Mais ce deuxième mandat est vite entaché par la «panique de 1893», un krach financier qui fait chuter la bourse, entraîne une crise économique et monétaire et des mouvements sociaux. En 1896, il ne brigue pas de troisième mandat. Grover Cleveland meurt en 1908 à Princeton. «J’ai essayé si fort de bien faire», sont ses derniers mots.

Après lui, seul Theodore Roosevelt tentera de briguer un nouveau mandat quatre ans après avoir quitté la Maison-Blanche. En vain.

En partenariat avec RetroNews , le site de presse de la BnF