«Je n’ai pas l’intention de partir» : à Marseille, le restaurant étoilé L’Épuisette au cœur d’un conflit de succession

Le Figaro Marseille

L’affaire a tout du panier de crabes marseillais : un restaurant étoilé, reconnu pour ses produits de la mer et niché le long du célèbre Vallon des Auffes, se retrouve emmêlé dans un conflit de succession avant les fêtes de fin d’année. «Il reste un mois et demi, on n’en dort pas. Ce qui est sûr, c’est qu’on ne va pas se laisser faire», souffle Bernard Bonnet, propriétaire de L’Épuisette, auprès du Figaro.

L’exploitant, qui a hérité des murs de l’établissement en 1992 jadis géré par son père, devrait en perdre l’usage dès le 31 décembre. L’autorisation d’occupation temporaire (AOT) du site dont bénéficie le restaurant depuis 1976 prendra fin à compter de cette date, comme l’a indiqué la métropole d’Aix-Marseille-Provence dans un courrier adressé aux propriétaires de L’Épuisette le 22 octobre. Étant situé le long du littoral et relevant donc de la gestion de l’État, le site est soumis à une réglementation européenne qui impose sa mise en concurrence.

«Notre autorisation d’occupation a été renouvelée il y a 5 ans par la métropole, qui expliquait que nous n’étions pas concernés par la mise en concurrence», plaide Bernard Bonnet, en évoquant l’appel d’offres organisé par la collectivité et finalement remporté par un concurrent, «The Social Club» et la chef étoilée Coline Faulquier. «Là où ça tourne à la marseillaise, c’est qu’on s’est retrouvés à deux candidats pour le renouvellement de cette délégation. La métropole affirme que l’offre de ce candidat était meilleure. Mais il n’en donne pas les raisons», peste le propriétaire de L’Épuisette désormais contraint de quitter les lieux.

Une candidature qui répond à «tous les critères»

D’après la métropole, la candidature du «Social Club» répondait à «tous les critères» requis par la commission qui lui a attribué l’AOT, comme l’a précisé Didier Réault, vice-président de la métropole délégué à la mer et au littoral, auprès de nos confrères de France 3 . Le partenariat qu’a noué le candidat avec Coline Faulquier semble avoir convaincu la commission. Cette dernière devrait ainsi succéder à Guillaume Sourrieu, étoilé au guide Michelin depuis plus de 20 ans et à la tête d’une équipe de 22 salariés.

«Les termes de l’appel d’offres sont très clairs. Il n’y a pas de débat, ce n’est pas une prise de pouvoir mais la suite logique des choses», souffle Coline Faulquier auprès du Figaro. «Tout le monde a toujours su que L’Épuisette se trouvait sur le domaine public et nul n’en a le droit exclusif. On a juste répondu à une autorisation d’occupation temporaire et notre dossier a été retenu. Je comprends la peine d’une personne qui a exploité ce restaurant aussi longtemps. Mais The Social Club et moi n’y sommes pour rien», balaye d’un revers de la main celle qui assure vouloir «rendre hommage» à Guillaume Sourrieu et «faire briller la ville de Marseille par sa gastronomie».

Des arguments qui ne sont pas du goût de Bernard Bonnet, ulcéré à l’idée de plier bagage le 31 décembre. «Je n’ai pas l’intention de partir. L’Épuisette est une affaire qui marche très bien, avec 12.000 couverts par an. On s’était même organisés pour assurer notre succession en construisant une équipe autour de celui qui aurait repris la suite de Guillaume Sourrieu», assure le futur ex-propriétaire, aujourd’hui prêt à en découdre. «Ce qui est sûr, c’est qu’on ne va pas se laisser faire. On a fait de L’Épuisette un symbole touristique et culturel du Vallon des Auffes et j’y ai investi des sommes colossales. S’il le faut, je partirai en ne laissant que les murs», lance très sérieusement Bernard Bonnet.