L’un est mince comme une corde de violoncelle. L’autre a la carrure d’une contrebasse. Lorsqu’ils se rencontrent à Paris, dans les années 1840, Jacques Offenbach est un long jeune homme à la crinière blonde, à la figure pâle en lame de couteau, à l’allure de poète romantique. Hippolyte de Villemessant est un géant moustachu au visage rond et rose, gai luron rabelaisien à l’énergie indomptable. Quoi de commun entre l’immigré allemand arrivé à Paris sans le sou à l’âge de 14 ans et l’héritier de la petite noblesse ? Entre le virtuose et l’homme de médias ? Le Juif ashkénaze et le catholique de province ?
Pourtant, entre le Rastignac de la musique et celui du journalisme, les affinités sont nombreuses : une ambition dévorante qui les portera tous deux au sommet de leur époque, le génie d’entreprendre, l’art de la légèreté. Truculents et inclassables, ces deux maestros vont régner sur les boulevards, ce cœur battant de la vie parisienne du second Empire, ce monde de cafés…