Vote de confiance, jours fériés, «boomers»... Ce qu’il faut retenir de l’interview de François Bayrou aux chaînes d’information
À une semaine du vote de confiance convoqué par François Bayrou, le 8 septembre à l’Assemblée, sur la nécessité des efforts à consentir pour lutter contre le surendettement du pays, le sort du premier ministre semble scellé. Et pour cause : la volonté commune de la gauche et du Rassemblement national (RN), qui disposent ensemble d’une majorité arithmétique à la Chambre basse, de faire tomber le chef du gouvernement rend aujourd’hui la fin de son bail à Matignon quasiment inéluctable.
Si tout laisse à penser que le premier ministre sera forcé de remettre sa démission à Emmanuel Macron dans quelques jours, le Béarnais ne s’avoue pourtant pas vaincu. À la veille d’un nouveau cycle de consultations avec les chefs de parti et de groupe parlementaires qui le souhaitent - les Insoumis et les Écologistes boycotteront ce rendez-vous - François Bayrou affiche une détermination intacte. Moins dans l’espoir de prolonger son bail à Matignon que dans la volonté de prendre l’opinion publique à témoin.
Passer la publicitéPour ce faire, il a accordé, ce dimanche soir, un long entretien télévisé aux quatre chaînes d’information en continu (BFMTV, CNews, LCI et France Info). L’occasion pour lui de revenir sur la situation budgétaire de la France, d’évoquer les négociations à venir avec les partis, d’exposer les éventuelles marges de manœuvre à sa disposition, de rappeler l’enjeu du vote de confiance et enfin d’aborder l’après-8 septembre. «Persuadé» que «ça peut bouger» d’ici là, il a surtout mis en garde contre «une période de désordre, de chaos» dans l’hypothèse inverse. Le Figaro vous résume ce qu’il faut retenir de cette interview.
Bayrou «pas là» pour dire «au revoir»
Alors que le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, a déclaré ce dimanche attendre de François Bayrou qu’il dise «au revoir», à quelques jours d’une chute qui semble inévitable, l’intéressé s’y refuse catégoriquement : «Sûrement pas», rétorque-t-il quelques heures plus tard. «La question n’est pas le destin du premier ministre, c’est celle du destin de la France», plaide le Béarnais, pour qui «si le gouvernement tombe (...) ça veut dire qu’on changera de politique. On abandonnerait la politique pour moi vitale pour le pays».
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«On ne peut pas discuter de la gravité du mal», déplore Bayrou
«Les jours à venir sont cruciaux», a martelé François Bayrou sur un ton grave, déplorant qu’on «ne puisse pas discuter la gravité du mal et la précision du diagnostic» avec l’ensemble des forces politiques. Un sombre constat sur l’explosion de la dette (3300 milliards d’euros) qu’il illustre ainsi : «Un bateau qui a un trou dans la coque. La cale du bateau se remplit d’eau chaque jour qui passe depuis cinquante ans». À ses yeux, «si les Français le savaient (le diagnostic), nous n’en serions pas là. Il y aurait eu de leur part et des politiques un mouvement de mobilisation.»
«Le seul qui n’était pas en vacances, c’est moi» : Bayrou persiste et signe
Quelques jours après avoir suscité l’ire des oppositions en justifiant l’absence de négociations estivales par le fait que ses responsables «étaient en vacances », François Bayrou persiste et signe. «Le seul qui n’était pas en vacances, c’est moi. Je peux en attester, à Paris il n’y avait personne», a insisté le premier ministre, appelant ses interlocuteurs politiques à poursuivre le dialogue tout au long du mois de septembre. À condition, reconnaît-il, que son gouvernement passe l’étape fatidique du 8 septembre.
Deux jours fériés ? Bayrou «prêt à la discussion»
L’idée avait provoqué une levée de boucliers dans la classe politique. Un mois et demi après avoir proposé de supprimer deux jours fériés - le lundi de Pâques et le 8 mai - afin de générer des recettes supplémentaires pour les finances publiques, François Bayrou affirme que cette mesure «est tout à fait discutable et amendable». «Ça pourrait être un (jour férié, NDLR) supprimé sans difficulté», assure le premier ministre, qui se dit «prêt à la discussion» sur cette question.
D’autres pistes ont-elles été étudiées ? «J’en avais envisagé une : qu’on passe de 35 heures à 36 heures de travail par semaine. Puis je ne l’ai pas fait, parce que je vois l’ampleur des réactions et aussi parce que c’est le seuil à partir duquel se déclenchent les heures supplémentaires», fait valoir le chef du gouvernement.
«Je n’ai jamais dit qu’il fallait cibler les boomers dont je suis» : Bayrou s’explique après la polémique
Quatre jours après avoir pointé du doigt sur TF1 les «boomers» - accusés d’avoir endetté le pays «pour leur confort» - et appelé, lors de la foire agricole de Châlons-en-Champagne, cette génération née après la Seconde Guerre mondiale à ne «pas se désintéresser de la situation faite aux jeunes», François Bayrou dit n’avoir «jamais dit qu’il fallait cibler les boomers dont (il est)». Tout en appelant les retraités à aider les plus jeunes, qu’il juge pour une partie «sacrifiés» et «sans destin». «Je veux réveiller les aînés parce que je suis sûr qu’ils sont solidaires avec ce que je dis. Ce sont leurs enfants et leurs petits-enfants», a exhorté le premier ministre, qui a écarté l’hypothèse d’une suppression de l’abattement de 10% pour frais professionnels dont bénéficient les retraités.
Contrairement à la jeunesse de 2025, «quand nous avions 20 ans, la France avait zéro dette et une croissance magnifique. Nous avons trouvé facilement du travail. Nous n’avions pas cette charge de la dette sur le dos», a également témoigné le premier ministre.
Les propositions du PS, «ça veut dire qu’on ne fait rien» pour réduire la dette
Au lendemain de la présentation des pistes budgétaires du Parti socialiste - qui propose notamment de réduire le déficit de 21,7 milliards d’euros en 2026, soit environ deux fois moins que les 44 milliards mis sur la table par le gouvernement - François Bayrou a balayé ce dimanche ce plan, estimant «ça veut dire qu’on ne fait rien» pour réduire la dette. «Le PS propose de laisser repartir la dépense en créant, selon mes comptes, 32 milliards d’euros d’impôts sur les entreprises», a dénoncé le premier ministre, s’appuyant sur les confidences de certains cadres socialistes qui lui auraient dit : “Ils sont devenus fous”».
Malgré la virulence de ses attaques, François Bayrou dit «tendre la main à tout le monde», car «si on n’est pas d’accord sur le diagnostic, aucune politique ne marchera». La tâche s’annonce pourtant ardue : «Je suis depuis dix jours sous le feu continu d’adversaires et d’observateurs car j’ai osé dire qu’il y avait un problème vital au sujet de la dette», se lamente-t-il.
Passer la publicité«Très gros risque si on ne paye pas» la contribution à l’UE : la pique de Bayrou contre le RN
En réponse à la lettre que la chef de file des députés RN, Marine Le Pen, lui a adressée cet été - dans laquelle elle plaidait pour une baisse de la contribution de la France à l’Union européenne et une réduction des dépenses liées à l’immigration - François Bayrou a alerté : «C’est un très gros risque si on ne la paie pas». Sur le second point, le premier ministre a indiqué ne pas «aimer qu’on présente la situation du pays comme étant la conséquence de la présence des immigrés», tout en se disant «d’accord pour qu’on regarde» certaines dépenses de la politique migratoire.
Déplorant que le taux d’exécution des OQTF (obligations de quitter le territoire) ne soit pas suffisant, François Bayrou a appelé à faire «évoluer notre politique de l’immigration».
Sans «assentiment minimal des Français et de ceux qui les représentent», pas de «politique courageuse»
Une semaine après avoir pris de court toute la classe politique en convoquant un vote de confiance à l’Assemblée, François Bayrou a justifié sa démarche : «Si je n’ai pas l’assentiment minimal des Français et de ceux qui les représentent, il n’y a aucune politique courageuse possible. Vous êtes obligé de battre en retraite sur chaque mesure, et après, vous vous retrouvez censuré.» En clair : il refuse de «conduire une politique contre» les Français.