Coupe du monde des clubs, la compétition de la discorde

C’est une compétition qui fait couler beaucoup d’encre avant même d’avoir vu le jour. Voulue par Gianni Infantino, le patron de la Fédération internationale de football, la première édition du Mondial des clubs se tiendra aux États-Unis du 15 juin au 13 juillet 2025. Dans un contexte de grogne, en raison d’un calendrier surchargé et malgré l’opposition des joueurs, des Ligues européennes et de l’UEFA, le patron de la Fifa, qui rêve de se développer sur le segment lucratif du football de clubs, a réussi à imposer sa nouvelle épreuve, après avoir échoué en 2022 à mettre en place la Coupe du monde tous les deux ans.

Un intérêt sportif sujet à caution

À un an du Mondial 2026 organisé aux États-Unis, au Canada et au Mexique, cette nouvelle épreuve quadriennale, qui se jouera dans dix stades de Los Angeles à New York, regroupera 32 équipes (douze européennes dont le Real Madrid, Manchester City, le Bayern Munich ou le PSG, seul représentant français, six d’Amérique du Sud, quatre d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Nord, une venue d’Océanie et l’Inter Miami de Lionel Messi pour représenter le pays hôte). L’intérêt sportif est déjà sujet à caution avec l’invitation, par exemple, du RB Salzbourg, écrasé par Brest (0-4) en Ligue des champions en octobre, l’absence de Liverpool, la meilleure équipe en Europe (leader de la Premier League et de la Ligue des champions) ou encore la qualification de l’Inter Miami de Lionel Messi malgré son absence de palmarès.

Pour Gianni Infantino, la Coupe du monde des clubs a viré au projet personnel. Après avoir proposé une version à 32 équipes quelques mois après son élection à la tête de la Fifa en 2016, alors que l’épreuve n’implique depuis 2000 que sept formations chaque hiver sur dix jours, puis une autre version en 2017 à 24 à partir de 2021, balayée par le Covid, le patron de la Fifa a annoncé en décembre 2022 un Mondial des clubs à 32 équipes pour 2025. Et peu importe s’il y a déjà une Coupe intercontinentale de la Fifa annuelle à six équipes dont la finale de la première édition a été remportée par le Real Madrid face aux Mexicains du CF Pachuca (3-0), le 18 décembre dernier.

Plaintes contre la Fifa

Pour mettre un terme aux cadences infernales, le syndicat mondial des joueurs (Fifpro) et l’Association européenne des ligues ont déposé plainte en octobre contre la Fifa, auprès de la Commission européenne, pour abus de position dominante dans l’élaboration du calendrier. Gianni Infantino, qui s’appuie sur le soutien des clubs, notamment de la puissante Association des clubs européens (ECA), dirigée par le président du PSG Nasser Al Khelaïfi, se défend en rappelant régulièrement que l’instance mondiale n’est responsable que d’une très faible part des rencontres des clubs et qu’elle ne fait que remplir son devoir en trouvant de nouvelles sources de revenus pour les fédérations.

Très enthousiaste après le tirage au sort en décembre, Nasser Al Khelaïfi ne voit pas où est le problème. « Notre entraîneur (Luis Enrique) n’est pas inquiet, a-t-il fanfaronné. Si un technicien le dit, alors ce n’est pas inquiétant. » Et d’ajouter : « Les blessures arrivent chaque année, le risque est permanent, je pense que les managers doivent mettre l’accent sur la rotation de leurs effectifs. » Ce n’est pas du tout l’avis de Carlo Ancelotti, l’entraîneur du Real Madrid, à l’incommensurable palmarès. « L’objectif est de jouer moins de matchs pour éviter les blessures, a-t-il déclaré en septembre. (…). Les joueurs n’ont aucun problème à baisser leur salaire s’ils jouent moins. »

Une histoire de gros sous

Pour s’assurer la présence de clubs, la Fifa leur a promis un énorme chèque. Alors que le chiffre de 50 millions d’euros par club est évoqué, le journal espagnol « Marca » indiquait le 6 décembre que le vainqueur pourrait toucher plus de 111 millions, soit la somme maximale offerte par l’UEFA au vainqueur de la Ligue des champions, faisant ainsi du Mondial des clubs la compétition la plus rémunératrice. Un pactole rendu possible par l’attribution des droits TV internationaux à DAZN pour environ un milliard d’euros et la signature de contrats de sponsoring avec le groupe chinois Hisense, le brasseur belge AB InBev, Bank of America et alors qu’un accord serait imminent avec Coca-Cola.

Pas sûr que cela rassure les joueurs. Après le défenseur néerlandais Virgil Van Dijk (Liverpool) ou le Français Aurélien Tchouaméni (Real Madrid), c’est l’Espagnol Rodri, Ballon d’or 2024, qui a tapé du poing sur la table en évoquant l’idée d’une grève alors que le nombre de matchs en phase préliminaire de Ligue des champions est passé de six à huit. « Si cela continue, à un moment, on n’aura pas d’autres choix », a menacé le milieu de terrain de Manchester City avant de se blesser gravement au genou (rupture du ligament croisé du genou droit). « Nous devons prendre soin de nous, nous sommes les personnages principaux de ce sport, ou de ce business, peu importe comment vous l’appelez. »

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