Le climat, absent des débats sur une planète en surchauffe

Cinq pays d'Asie centrale (le Kazakhstan, le  Kirghizstan, le Tadjikistan, le Turkménistan et l'Ouzbékistan, d'anciennes républiques soviétiques qui séparent la Russie de la péninsule indienne) ont connu au mois de mars une vague de chaleur intense et inhabituelle. D'après l'étude réalisée par le World Weather Attribution, un réseau de référence, les températures y étaient supérieures de 10 degrés par rapport à la moyenne préindustrielle. Tout simplement "délirant" pour les observateurs, pourtant habitués désormais à voir le thermomètre s'affoler, et qui précisent en plus que les résultats sont probablement sous-estimés.

La région aride n'est pourtant pas connue pour ses chaleurs écrasantes à à la sortie de l'hiver, mais à l'image d'un mois de mars, qui a été de loin le plus chaud jamais enregistré en Europe, selon l'observatoire Copernicus, le réchauffement de la planète se traduit par une succession de records de températures incessants depuis deux ans maintenant.

Et ce réchauffement a déjà des conséquences dans ces pays d'Asie centrale, principalement sur deux aspects essentiels à la vie humaine : l'accès à l'eau et les récoltes. Cette vague de chaleur précoce est arrivée à une saison cruciale pour l'agriculture, au moment où le blé est semé et où des arbres fruitiers comme les amandiers, les abricotiers ou les cerisiers fleurissent, ce qui inquiète les producteurs pour les prochaines moissons. Or le secteur agricole représente 20% de l'économie de la région et emploie un travailleur sur deux au Tadjikistan et en Ouzbékistan. Concernant les ressources en eau, elles sont essentiellement liées aux glaciers, qui fonctionnent comme des châteaux d'eau dans cette région aride, éloignée des littoraux. Des glaciers dont la fonte atteint jusqu'à 30% sur les deux principaux massifs qui alimentent les fleuves de la zone, et donc les habitants.

Le dérèglement climatique absent des débats

Malgré cette réalité chiffrée et documentée, le climat se retrouve relégué au second plan face aux préoccupations du moment, de la guerre commerciale aux impératifs de réarmement. Des inquiétudes légitimes mais qui n'empêchent pas le réchauffement de progresser, comme un rouleau compresseur, pendant que nous regardons ailleurs. Période paradoxale où les effets du réchauffement n'ont jamais été aussi visibles et manifestes, mais où la question environnementale recule dans l'ordre des priorités politiques.

Dans un monde troublé et dominé par des discours de plus en plus simplistes, les questions climatiques, parfois complexes, peinent à exister. Peut-être parce qu'elles inquiètent, qu'elles bouleversent nos habitudes, et qu'elles n'offrent guère de succès de court terme, dans les urnes ou dans l'opinion. Il y a sans doute une réflexion à mener sur la manière de parler du sujet, d'intégrer les politiques environnementales aux réalités du quotidien, et de favoriser l'acceptation sociale des mesures qu'elles impliquent. Les réponses à ce défi planétaires demandent surtout des actions concertées, sur la durée.

Pas vraiment la tasse de thé d'un Donald Trump, par exemple, qui entre deux appels à forer davantage, multiplie les marches arrière sur les mesures climatiques. Le président américain envisage ainsi la fermeture du centre de mesure de l'atmosphère de Manau Loa à Hawai, un observatoire considéré comme le berceau de la surveillance du climat.