«En tant que postiers, nous avons honte» : plus d’un million de lettres en attente au centre de tri de La Poste près de Bordeaux
À la plateforme industrielle de courrier de La Poste, à Cestas, la direction fait face à l’ire des employés, dont 50% des effectifs étaient en grève jeudi. Ils dénoncent une surcharge de travail, liée à la fermeture des centres de tri de la Charente (16) et la Charente-Maritime (17), qui a entraîné un «retard structurel» dans l’aiguillage et la distribution du courrier.
D’après les calculs réalisés par François Daurel, le délégué syndical de la CGT de ce centre de tri, plus d’1,2 million de courriers n’ont pas été remis à leurs destinataires et les plus anciens datent du 26 novembre. «Depuis le début, nous prévenons qu’il sera structurellement impossible de trier ce nouvel afflux de courriers en temps et en heure. En tant que postiers, nous avons honte car ces lettres qui n’arrivent jamais ce sont aussi des factures payées par chèque, des amendes, des cartes grises, des courriers attendus pour l’ouverture d’un compte ou la création d’une PME...», se désole le syndicaliste.
Priorité à la publicité
Une évaluation du nombre de plis non distribué démentie par la direction qui, sans avancer le moindre chiffre, évoque un retard de «plusieurs jours» et de «bien moindre mesure». Le service public, qui s’excuse auprès de ses clients, justifie ces délais par des «absences inopinées liés aux épidémies saisonnières» telle que la grippe et annonce sept embauches en intérim pour les compenser et trois recrutements en cours.
«Une grosse blague» pour François Daurel, qui estime plutôt que La Poste comprime la masse salariale de la branche courrier car elle n’est plus rentable. Avant de dévoiler la méthodologie de son calcul : «J’ai compté les chariots ce mardi : il y en a 400, qui contiennent chacun 15 bacs dans lesquels il y a en moyenne 150 lettres. Cela fait environ 900.000 plis, auxquels s’additionne le courrier mécanisable, soit 150 cubes contenant 2000 lettres, ce qui nous porte à 300.000 courriers supplémentaires et à ce chiffre d’1,2 million de plis en retard.»
La colère des employés du centre de tri de Cestas est d’autant plus grande que La Poste leur demande de prioriser la «publicité» et les «clients sensibles» qui disposent de grands comptes auprès du service public. «Une marque qui envoie des cartes de produits de beauté à gratter sera ainsi privilégiée sur les particuliers, car 10 personnes de 70 ans qui n’ont pas reçu leur carte postale à temps feront moins de bruit si elles venaient à râler», déplore ainsi François Daurel. Le syndicaliste dénonce également des conditions de travail dégradées et «dangereuses» en raison de l’encombrement des entrepôts.