Dans le Larousse, l’empathie est «la faculté intuitive de se mettre à la place d’autrui, de percevoir ce qu’il ressent». Une faculté si prisée que, depuis 2024, elle est enseignée dans les écoles françaises ; pour lutter contre le harcèlement scolaire, on ne ferait pas mieux. Plus généralement, l’empathie est décrite comme une vertu, seule susceptible de créer du lien dans un monde fragmenté. Sur les réseaux sociaux, les internautes sont invités à manifester leur sensibilité en «likant», en partageant des publications qui relatent des faits très éloignés de leur vie quotidienne. Après un évènement dramatique, gare au politique qui n’aura pas l’attitude adéquate destinée à montrer qu’il rejoint la souffrance des victimes.
Dans son livre L’empathie est politique paru en octobre chez Lattès, la biologiste Samah Karaki, déjà auteur de l’essai à succès Le talent n’existe pas - qui apprend que pour faire réussir un enfant, il vaut mieux éviter de lui dire «tu es intelligent» - plaide pour qu’on sorte de la sphère des sentiments et qu’on en revienne au débat politique. Docteur en neurosciences, elle remet l’empathie à sa place. Celle d’une information livrée par le cerveau, conditionnée par notre expérience, découlant de notre vision du monde, «biaisée, peu fiable, et inadaptée comme boussole morale».
LE FIGARO. - Vous êtes sèche envers l’empathie. Vous écrivez qu’elle n’est qu’une «information de notre cerveau qui n’aide pas à saisir le réel» ? Comment expliquer qu’on l’enseigne aux élèves français contre le harcèlement scolaire ?
Sur ce sujet, la France suit le chemin des États-Unis, où depuis trente ans les discours affectifs occupent un espace que d’autres façons de faire de la politique n’occupent plus. Après une tuerie de masse dans une école, Barack Obama a ainsi conseillé à ceux qui l’écoutaient «d’enlacer» ce soir-là leurs enfants. Tandis que son administration…