À l’approche de la date limite du 13 octobre, l’étau se resserre sur le gouvernement tenu par les calendriers budgétaires. Une note rédigée par le président socialiste de la Commission des finances au Sénat Claude Raynal, repérée par BFM Business, affirme qu’il n’est pas certain qu’un budget soit adopté d’ici la fin de l’année. «Désormais, l’examen du PLF 2026 dans les délais constitutionnels et d’ici à la fin de l’année semble compromis» écrit le sénateur de la Haute-Garonne. «Maintenant que le Gouvernement nommé hier a démissionné, il devient peu réaliste - même si techniquement c’est encore possible - qu’un projet de loi de finances puisse réellement être présenté en Conseil des ministres lundi prochain 13 octobre» formule le document, que Le Figaro a pu consulter.
Selon l’article 47 de la Constitution, le Parlement a un délai total de 70 jours pour examiner le projet de loi de finances: 40 jours sont consacrés à la première lecture à l’Assemblée nationale, puis 20 jours au Sénat, et enfin 10 jours pour les derniers échanges entre les deux chambres. Ensuite, le Conseil constitutionnel doit avoir 8 jours pour rendre son avis. C’est-à-dire qu’un dépôt postérieur au 13 octobre rend très difficile l’adoption des textes financiers avant le 31 décembre. Or sans budget adopté, l’État est dans l’impossibilité de percevoir les impôts ou d’engager des dépenses. Dès lors, la note décrit plusieurs scénarios.
Passer la publicitéScénario 1: le texte n’est pas présenté en Conseil des ministres avant le 13 ou 14 octobre
Le délai de 70 jours n’est pas tenable si aucun texte n’est présenté en Conseil des ministres avant le 13 ou 14 octobre. Dans ce cas, deux options sont possibles.
Le gouvernement peut, avant le 11 décembre, demander à l’Assemblée nationale et au Sénat d’adopter la première partie de la loi de finances, conformément au 4e alinéa de l’article 47 de la Constitution. Cette partie a trait aux recettes puisqu’elle autorise la perception de l’impôt. Ou alors, le gouvernement peut demander au Parlement d’adopter une loi spéciale. C’est ce qui s’est passé après la censure de Michel Barnier. Dans ce cas, prévu par l’article 45 de la LOLF, l’exécutif demande au Parlement l’autorisation de prélever les impôts. Les dépenses sont, quant à elles, fixées par décret chaque mois sans pouvoir excéder les crédits prévus par le budget de l’année précédente, jusqu’à ce que le pays parvienne à se doter d’un budget.
Scénario 2: l’Assemblée nationale est dissoute
Le problème en cas de dissolution est que «les délais nécessaires pour organiser de nouvelles élections et reconstituer l’Assemblée nationale seraient tels qu’ils ne permettraient probablement pas l’examen complet du texte avant la fin de l’année» prévient Claude Raynal. Dès lors, deux scénarios sont possibles: voter la première partie de la loi de finances, ou une loi spéciale limitée à la perception des impôts. Mais ce scénario n’est possible que si l’Assemblée nationale est reconstituée avant le 19 décembre, car c‘est la date limite de dépôt d’une loi spéciale, précise le sénateur.
Ce ne serait pas inédit. À l’automne 1962, la chambre basse est dissoute et Georges Pompidou remet sa démission. Mais les deux assemblées ont pu voter la première partie de la loi de finances avant le 31 décembre et ont examiné la seconde partie au début de 1963.
Scénario 3: le projet de loi de finances est déposé d’ici la semaine prochaine, mais le Parlement ne se prononce pas dans le délai de 70 jours
Dans ce cas le projet de la loi de finances peut être mis en application par ordonnance. Cette hypothèse implique que le projet de loi de finances soit déposé dès la semaine prochaine sur le bureau du Sénat, ce qui semble peu probable. Le cas étant inédit, Claude Raynal s’interroge: quel texte serait retenu ? Le projet de loi déposé par le Gouvernement sans modification ou avec la prise en compte de certains amendements ?
Passer la publicitéScénario 4: le projet est déposé, mais le Parlement le rejette
Le dernier scénario évoqué par le sénateur dépeint l’hypothèse dans laquelle Sébastien Lecornu n’est pas censuré et le Parlement rejette la loi de finances faute de majorité. Un scénario probable car Lecornu a dit qu’il n’utiliserait pas le 49.3. Dans ce cas, une loi spéciale ou un nouveau projet de loi finances serait nécessaire. «Si un accord n’était pas conclu pour permettre une adoption plus rapide que le délai de 70 jours, la loi de finances ne pourrait pas être promulguée avant le début du mois de mars 2026». En attendant, l’État fonctionnerait pendant plusieurs mois en « services votés », c’est-à-dire avec les crédits indispensables à la continuité des services publics.