Vente de Rafale à Kiev : "un pari sur la survie de l'Ukraine", estime Aline Le Bail Kremer, co-fondatrice du collectif Stand with Ukraine

Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.


Emmanuel Macron a reçu ce lundi 17 novembre la visite de son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky. Un accord a été signé entre les deux hommes prévoyant de possibles contrats à venir pour l'acquisition par l'Ukraine d’une centaine de Rafale.

France Télévisions : C'est un message que vous saluez de la part du président Emmanuel Macron.

Aline Le Bail Kremer, journaliste, co-fondatrice du collectif Stand with Ukraine : Ce type d'investissement et d'engagement, ça dit surtout qu'on parie sur la survie de l'Ukraine, sur son existence, sur son intégrité, sur son indépendance. On n'est pas du tout dans quelque chose de défaitiste, ne serait-ce que d'un point de vue cyniquement industriel. Je doute qu'un gros industriel, comme il est question sur une telle commande, le fasse ou s'engage là-dessus si les questions de défaite de l'Ukraine étaient à la carte. Il y a quelque chose de l'ordre de la pulsion de vie qui voit un futur à l'Ukraine et qui parie aussi sur très exactement ce qu'elle demande pour son existence future, c'est-à-dire de pouvoir compter sur elle-même, compter sur une aviation. Il est question d'ajout aussi de Gripen, de F-16, donc de constituer une force de 150 avions de combat soit, 250 potentiels avions de chasse dans le ciel ukrainien. Ça veut dire une protection absolue le moment venu de ce ciel ukrainien, donc des villes, donc des civils, donc des Ukrainiens.

Ce Rafale, c'est un défi industriel pour Dassault, puisque c'est lui qui produit ce Rafale. Mais c'est aussi un signal envoyé à Vladimir Poutine et aux Ukrainiens en disant : "on sera avec vous, quoi qu'il advienne dans les décennies à venir."

Arthur Kenigsberg, fondateur du think tank Euro Créative, spécialiste de l’Europe centrale : Oui. L'un des objectifs de Vladimir Poutine qu'on ne rappelle pas assez, mais que les Russes rappellent à longueur d'interviews, c'est la démilitarisation de l’Ukraine. Et c'est là qu’effectivement, il y a un signal stratégique très clair des Ukrainiens qui disent "de toute façon, il n'en est pas question", mais aussi des Français et des Européens dans leur ensemble, de dire "nous serons aux côtés des Ukrainiens dans les deux, trois ou cinq prochaines années". C'est une lettre d'engagement de dix ans. C'est un partenariat stratégique dans la durée que viennent de signer Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky. Les 100 Rafale français ne seront pas dans le ciel ukrainien demain. On sait que Dassault aujourd'hui met tout en place pour essayer de produire 50 avions par an. Et l'Ukraine n'est pas le seul client de Dassault. Demain il faudra aussi livrer à l'Inde, à l'Indonésie peut-être, à la Serbie. Et surtout, ce qui est très intéressant et ce qui va continuer de se passer dans la journée, c’est ce qui se passe au niveau des drones : une collaboration entre des acteurs très intéressants de la BITD (Base industrielle et technologique de défense) française et ukrainienne. Et qu'une collaboration entre ces deux États soit en train de naître, c'est très intéressant à observer parce que ça dit aussi beaucoup pour l'autonomie stratégique européenne de demain.

On comprend bien qu'effectivement, ils ne vont pas changer la face du conflit dans les mois qui viennent.

Général Jean-Paul Palomeros, ancien chef d’état-major de l’Armée de l’Air : Pour revenir sur l'utilisation de l'aviation de combat en Ukraine, le problème, c'est que l'Ukraine n'a pas une aviation de combat de dernière génération, donc elle ne peut pas se permettre d'engager ses avions là où elle devrait, où elle pourrait, si elle avait des Rafale, par exemple. J'imagine le scénario où un Rafale porteur d'un missile qui s'appelle le missile météore, qui porte à plusieurs centaines de kilomètres, pourrait s'en prendre à des bombardiers qui larguent aujourd'hui des bombes planantes. Ça soulagerait quand même considérablement les Ukrainiens d'une menace qui est permanente.