Pour réduire le déficit public de 30 milliards d'euros et le ramener à 4,7% du PIB en 2026, le gouvernement a proposé de multiples pistes d'économies dans son projet de budget, présenté mardi 14 octobre. Outre le gel du barème de l'impôt sur le revenu ou l'année blanche, l'exécutif prévoit notamment de supprimer une vingtaine de niches fiscales jugées "obsolètes ou inefficaces" parmi les 474 existantes – dont le coût est estimé à 85,1 milliards d'euros. Ces dispositifs, dont la suppression est loin d'être acquise puisque les députés et les sénateurs débattront de ces mesures lors de l'examen du budget, se décomposent en trois catégories : les niches fiscales jugées inefficaces par le gouvernement, celles qui profitent à "un faible nombre de bénéficiaires" et enfin les dispositifs qui ne profitent à personne.
Les niches considérées comme inefficaces
La réduction d'impôt pour frais de scolarité dans le secondaire et le supérieur figure parmi les niches "dont la justification ou l'efficacité sont contestables", selon le gouvernement. En 2025, cette réduction atteignait ainsi 61 euros pour un collégien, 153 euros pour un lycéen et 183 euros pour un étudiant dans l'enseignement supérieur, lorsque l'enfant n'est pas en garde alternée. Dans un rapport daté d'octobre 2024, le Conseil des prélèvements obligatoires, rattaché à la Cour des comptes, estimait que cette niche fiscale bénéficiait principalement aux foyers les plus aisés, en plus d'être non incitative.
Dans son projet de loi de finances, le gouvernement propose aussi de supprimer l'exemption d'impôt sur les indemnités journalières pour affection longue durée (ALD) mais aussi le tarif particulier pour le carburant B100, qui profite au secteur des transports routier ou ferroviaire, ainsi que la réduction de l'avantage fiscal pour le carburant E85 (éthanol). Ce biocarburant – un mélange d'essence et d'éthanol agricole venant principalement de betteraves – est en plein essor chez les particuliers.
Considéré comme une niche fiscale, l'abattement de 10% sur les revenus des retraités (plafonné à 4 399 euros par an) pourrait être remplacé par un plafond forfaitaire de 2 000 euros par an et par retraité.
Les niches qui ne concernent presque personne
Six dispositifs figurent dans la catégorie des niches fiscales qui profitent à "un faible nombre de bénéficiaires et pour des gains unitaires souvent limités". On y trouve notamment le dispositif qui permet aux lauréats de prix Nobel de ne pas être imposés sur les sommes perçues grâce leur récompense. Les Français Philippe Aghion et Michel Devoret, récompensés en 2025, pourraient être concernés après qu'ils ont reçu près d'un million d'euros, selon le site du prix Nobel.
L'exonération d'impôt sur le revenu du traitement attaché à la Légion d'honneur et à la médaille militaire (mais aussi à la médaille du travail) est aussi concernée. Selon le projet de loi de finances 2024, 115 768 légionnaires et médaillés militaires percevaient ce traitement qui varie de 4,57 euros (pour un médaillé militaire) à 36,59 euros (pour un Grand-Croix). Le gouvernement veut aussi supprimer les déductions des dépenses engagées par les sportifs professionnels pour leur reconversion.
Plusieurs exonérations fiscales pourraient aussi passer à la trappe : l'exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur des zones humides, l'exonération de taxe à l'essieu sur les véhicules lourds de collection ou encore l'exonération de TVA sur des frais versés aux sociétés de partage de biens meubles et immeubles. Ces dernières sont des structures juridiques comme des sociétés civiles immobilières (SCI) dont le but est de gérer collectivement des biens.
Les niches qui sont devenues obsolètes
Le gouvernement propose enfin "la suppression de dispositifs éteints qui ne produisent plus aucun effet budgétaire", soit des dispositifs existants mais inutilisés qui ne rapportent donc rien à l'Etat. Dix niches fiscales sont listées, parmi lesquelles l'exonération d'impôt sur les sociétés des aides touchées par les entreprises affectées par la crise de l'eau à Mayotte en 2023, le crédit d'impôt pour la formation du chef d'entreprise ou celui pour le rachat d'une entreprise par ses salariés ou encore l'amortissement exceptionnel pour la robotisation et pour la fabrication additive.
Plusieurs dispositifs techniques d'exonération d'impôt sur le revenu (aide financière à la création ou à la reprise d'une entreprise, intérêts du différé de paiement accordé lors de la transmission d'une exploitation agricole) sont aussi mentionnés. Comme ces niches ne profitent à personne, le gouvernement veut les supprimer. Il justifie aussi la suppression de l'exonération d'impôt sur les sociétés des aides "French Tremplin", un programme qui promeut la diversité et l'égalité des chances, par sa non-utilisation.
Enfin, la suppression de dérogations sur des impôts spécifiques lors de transmissions (rachat sous conditions d'une entreprise par une entreprise nouvelle avant 2023, donations d'immeubles neufs sous conditions 2020) suit la même logique.